Les participants au rendez-vous de Rabat sont appelés à formuler des recommandations qui devront être portée au Forum mondial. Dans ce cadre, ils échangent à Rabat autour de trois axes : la justice transitionnelle et la mémoire, la migration et les mobilités, ainsi que le changement climatique.
A. Bouayach a rappelé que ces thématiques étaient « extrêmement interdépendantes » pour les deux continents. « Les pays dits ‘émergents’ peuvent beaucoup apporter à ce débat, comme l’ont montré les rencontres lors de la préparation du Pacte mondial de la migration, ou lors de son adoption à Marrakech », a-t-elle déclaré.
La présidente du CNDH n’a pas manqué de critiquer les pays du Nord, en matière de protection des droits humains dans la gestion internationale des migrations, surtout au cours de dernières années. Elle a estimé qu’il était « d’ailleurs préoccupant de voir qu’aucun pays ‘occidental’ n’a ratifié la Convention internationale de protection des migrants et de leurs familles, alors que nos pays se soumettent volontairement à l’examen et à l’évaluation universelle, comme si une certaine couleur de peau ou une certaine croyance religieuse dictait la dignité de l’Humain ou prédisposait à une certaine injustice innée ». Ajoutant qu’ « au moment où certaines démocraties dites traditionnelles usent des droits humains comme armes dans d’obtus jeux politiques, trahissant leur essence même, nous avons choisi de dialoguer dans un conclave à haute symbolique morale.»
A.Bouayach a assuré que « malgré la distance géographique, la différence de langue et de culture, nous avons une histoire commune et partagée » rappelant que « d’abord, nous partageons le statut d’anciennes colonies, avec toutes les répercussions économiques, politiques et sociales de cette période douloureuse ». « Ensuite, nos trajectoires en matière de consolidation de l’Etat de droit se recoupent. Les ‘démocraties émergentes’, comme désignées par certains, partagent, pour beaucoup d’entre elles une dynamique de construction similaire : un passé lourd des violations graves des droits de l’Homme, une expérience unique de justice transitionnelle, une contribution remarquée à la Jurisprudence internationale en matière de réparation et de garantie de non répétition, une dynamique inégalée de leurs sociétés civiles », a-t-elle ajouté.
Pour les défenseurs des droits humains, « l’appartenance au Pays du Sud est une fierté », selon la présidente du CNDH. « Nous avons fait ce chemin et nous nous devons de protéger la mémoire de ces victoires, tout en étant conscients des défis qui nous attendent », a-t-elle souligné. « Notre contribution à la conception et à l’élaboration des normes et valeurs universelles n’est pas un incident d’étape, il est bien la tracée de nouveaux chemins, NOS chemins, vers l’Etat de droit.»
Elle a relevé qu’au Maroc, « comme dans beaucoup d’autres pays », on est « à l’étape d’implémentation d’une horizontal accountability / responsabilidad horizontal, pour user des termes du penseur Argentin Guillermo O’Donnell ». En d’autres termes, « après une première étape de construction des procédures et cadres généraux – des élections libres et transparentes, une constitution démocratique, une justice indépendante – nous en sommes à l’étape de construction institutionnelle, en un réseau efficient qui puisse évaluer, avertir et intervenir lorsqu’une violation des droits fondamentaux des citoyens advient ou est susceptible d’advenir ».