La ville de Khan Younès, dans le sud de Gaza, est bombardée sans relâche depuis des semaines. Les hôpitaux du territoire ravagé, sous pression, sont au centre des préoccupations. Parallèlement, les chefs de plusieurs organisations de l’ONU ont alerté mercredi que la suspension par plusieurs pays de leurs financements à l’Unrwa, aura des « conséquences catastrophiques » pour la bande de Gaza. Francesca Albanese, rapporteuse spéciale des Nations unies, a déclaré que les gouvernements qui suspendent les fonds destinés à l’agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens font preuve de « deux poids, deux mesures » lorsqu’ils continuent à soutenir Israël, dont les actions constituent « plausiblement » un génocide. Une douzaine de pays, principalement occidentaux, ont suspendu le financement de l’Unrwa dans l’attente des résultats d’une enquête sur les allégations selon lesquelles 12 anciens membres du personnel auraient participé aux attaques du 7 octobre contre Israël.
Pour sa part, Martin Griffiths, secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et coordonnateur des secours d’urgence de l’ONU, a rendu compte mercredi devant le Conseil de sécurité de la situation à Gaza, lors d’une réunion convoquée par l’Algérie. Quatorze des 36 hôpitaux de Gaza sont fonctionnels, dit-il, et seulement partiellement. Ils sont confrontés à de graves pénuries de personnel et de fournitures. Des patients sérieusement blessés, ou malades, ne peuvent plus être soignés à Gaza et doivent être évacués rapidement. M. Griffiths constate que de violents combats se sont poursuivis à proximité des hôpitaux Nasser et al-Amal de Khan Younès, et que les affrontements intenses dans la ville continuent de pousser des milliers de personnes vers Rafah, où déjà plus de la moitié des 2,2 millions d’habitants de Gaza tentent de trouver refuge dans une situation parfaitement délétère.
Selon lui, plus de 60% des logements seraient détruits ou endommagés dans toute l’enclave. Ses services estiment que 75% de la population gazaouie a été déplacée. Le secrétaire adjoint rappelle que les fortes pluies inondent les camps de fortune, obligeant les enfants, les parents et les personnes âgées à dormir dans la boue. L’eau potable devient de plus en plus inaccessible, les maladies évitables se développent et continueront à se propager, prévient le dirigeant onusien. Elles deviendront même, prédit-il, la principale cause de mortalité chez les Palestiniens de Gaza si ce n’est déjà le cas.
M. Griffith précise par ailleurs que cette situation catastrophique se répercute de manière croissante sur les États limitrophes, en raison des déplacements massifs de Palestiniens vers d’autres pays. « Je tiens également à souligner que toute personne déplacée de Gaza doit avoir le droit de rentrer volontairement, comme l’exige le droit international », conclut le diplomate britannique.
Le secrétaire général de l’ONU s’est exprimé mercredi, lors d’une réunion au siège de l’organisation à New York. « J’ai rencontré hier des donateurs pour écouter leurs inquiétudes et pour détailler les démarches entreprises pour les régler », a-t-il confié, avant de réaffirmer que l’agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens est « la colonne vertébrale de toute réponse humanitaire à Gaza ». « J’appelle tous les États membres à garantir la continuité du travail de l’Unrwa qui sauve des vies », implore Antonio Guterres, déplorant que « tout le système humanitaire à Gaza était en train de s’effondrer ». « C’est une population qui meurt de faim. C’est une population qui est poussée au bord du gouffre », a déclaré Michael Ryan, directeur du programme des urgences sanitaires de l’Organisation mondiale de la santé, lors d’une conférence de presse à Genève. Ses propos sont rapportés par l’AFP.
La situation dans les hôpitaux Nasser et al-Amal de la ville de Khan Younès, épicentre des combats dans la bande de Gaza, est désastreuse et « empire » encore, prévient le ministère dans un communiqué. Elle « menace de mort de nombreux blessés et malades en raison du ciblage et du manque de capacités médicales », poursuit le communiqué, ajoutant que les deux centres hospitaliers sont à court de nourriture. Le ministère lance un appel à la Croix-Rouge et à l’ONU.
Dr Mohammed Salha, de l’hôpital al-Awda, dans le nord de la bande de Gaza, a confirmé à Al Jazzera que ses bâtiments et sa cour avaient été bombardés à l’aube. C’est la quatrième fois que cet établissement médical est visé depuis le début de la guerre et la deuxième fois en 48 heures. « Nous sommes un hôpital non gouvernemental qui s’efforce de fournir des services aux citoyens, en particulier dans le domaine de l’obstétrique et de la gynécologie. Nous sommes le seul hôpital à fournir ces services dans le nord de la bande de Gaza à l’heure actuelle », a déclaré M. Salha.
A signaler que l’armée d’occupation israélienne a retiré une de ses brigades de réserve de la bande de Gaza, la troisième en une semaine. Alors que les autorités de Gaza signalent la découverte d’un charnier au nord de la bande comprenant les cadavres décomposés de plus de 30 Palestiniens qui ont été tués les yeux bandés et les mains menottées. La radio de l’armée d’occupation a déclaré que la Cinquième Brigade de Réserve a quitté la bande de Gaza la nuit dernière après avoir terminé sa mission. Il est question que ce sont les équipes de sécurité locales qui entreprendraient le processus de riposte aux incidents de sécurité dans ces zones. Selon le journal Yedioth Ahronoth, cette décision de retrait intervient aussi bien dans la bande de Gaza que dans les zones adjacentes à la frontière libanaise.
Dimanche, l’armée d’occupation a annoncé le retrait de deux brigades de réserve de la bande de Gaza, après la fin de leur mission, selon la chaîne Kan, affiliée à la Société de radiodiffusion officielle israélienne. La première brigade Kiryati a quitté le sud de Gaza samedi soir, après que des milliers de ses membres ont participé à de violents combats contre la résistance palestinienne à Khan Younes au sud de l’enclave. La seconde est la Brigade Parachutiste, connue sous le nom de « Pointe de Lance » et composée de 5 bataillons, selon Kan.
En moins d’un mois, l’armée d’occupation a retiré plusieurs brigades de ses forces à Gaza, dont le bataillon 7107, la division 36 et le bataillon 13 de la brigade Golani.
En cette fin de janvier, l’armée d’occupation a reconnu la mort de 3 militaires, un officier et deux soldats, et d’autres militaires blessés, lors de combats au nord et au sud de la bande de Gaza. Elle avait annoncé la veille mardi 30 janvier que 26 soldats avaient été blessés en 24 heures lors des combats dans la bande de Gaza, ce qui porte selon elle leur nombre à 2.797 depuis le début de la guerre, dont 1.283 blessés depuis le lancement de l’offensive terrestre le 27 octobre 2023.
Selon le bilan officiel, le chiffre des militaires israéliens tués s’élèverait à 560 depuis le début de l’offensive israélienne, dont les 223 qui ont été tués lors de l’attaque du Hamas dans l’enveloppe de Gaza le 7 octobre. Ces chiffres officiels ont été contestés par les médias qui ont cité des sources dépendantes de milieux médicaux israéliens. En décembre, le Yediot Aharonot a avancé le chiffre de 5.000 blessés dont 2.000 qui sont des mutilés de guerre. Un mois plus tard, le site électronique du média Walla indiquait que le chiffre des blessés serait 30.000, dont 4.000 handicapés à vie.
Dans son édition du 30 janvier, le Telegraph britannique a révélé que le chiffre des tués et blessés dans les rangs de l’armée israélienne est le plus élevé en quatre décennies, se référant aux chiffres officiels. Citant un haut-responsable médical de l’armée d’occupation, il a rapporté que le chiffre des militaires israéliens qui souffrent de blessures graves à Gaza est le double de celui de la guerre 2014.
« Les soldats de l’armée israélienne perdent des membres et souffrent de blessures aux yeux et au visage, ce qui affecte et change leur vie, à cause des explosifs utilisés par le Hamas sur le champ de bataille », a déclaré pour le journal le colonel Avi Panov, chirurgien général adjoint du corps médical. « Le champ de bataille à Gaza est plus dense que lors des guerres précédentes, ce qui met en évidence la nature des combats de rue à rue et la géographie étroite de la bande » a-t-il ajouté. « Un quart de ces personnes ont été grièvement blessées, contre 12 % lorsqu’Israël a mené la Seconde Guerre du Liban contre le Hezbollah en 2006 », a aussi précisé le chirurgien israélien.
La résistance palestinienne continue à riposter à l’armée d’occupation. Ainsi, les Brigades Al-Quds assurent avoir mené des opérations de bombardement simultanées avec des obus de mortier et des missiles (Badr 1 et 107) sur les attroupements des soldats et des véhicules ennemis à l’est, au sud et à l’ouest de la ville de Khan Younes. Plusieurs véhicules militaires israéliens, dont des chars de combat, ont aussi été neutralisés, mercredi, dans plusieurs zones de la bande de Gaza. Des opérations réussies aussi bien par les Brigades Al Qassam que celle d’Al-Quds.
La Radio de l’armée a assuré que les forces israéliennes avaient aussi mis fin au projet d’inonder les tunnels du Hamas en y injectant de l’eau de mer, après que celui-ci n’ait pas obtenu le résultat souhaité dans le nord de Gaza et ait complètement échoué au centre de la bande de Gaza.