Rien n’a changé depuis l’annonce par Joe Biden du plan en trois phases dont la première comprend une trêve israélienne de 6 semaines, la libération d’otages vulnérables et un retrait israélien des zones les plus peuplées de la Bande de Gaza. C’est toujours le langage de la canonnière qui est privilégié par Tel-Aviv. L’armée israélienne affirme avoir lancé un nouveau raid ciblé dans le quartier de Sabra, à l’ouest de la ville de Gaza et avoir « éliminé des dizaines d’hommes armés et détruit un dépôt militaire ». Un porte-parole de l’armée fait état de combats intenses dans le secteur de Rafah, notamment de corps-à-corps dans des tunnels. Plusieurs factions palestiniennes, dont Al-Qassam, Al-Qods entre autres, ont ciblé les forces israéliennes à l’est et au sud de Rafah.
L’armée israélienne a révélé, selon les médias israéliens, que 20.000 de ses soldats ont été blessés depuis le début des opérations, dont 8.298 resteront handicapés à vie.
Les opérations se concentrent en particulier dans l’ouest de la ville, dans le quartier de Tal al-Sultan, où des habitants ont signalé des raids aériens, des tirs de chars et des mouvements de véhicules militaires. Des tirs d’artillerie intenses ont également été signalés par des témoins dans l’est et le centre de Rafah. Au moins 95 personnes ont été tuées ces dernières vingt-quatre heures, selon des sources palestiniennes. Le ministère de la santé du Hamas a annoncé un nouveau bilan de 36 379 personnes tuées depuis le début de la guerre à Gaza il y a près de huit mois. La vie est devenue « apocalyptique » dans certaines zones du sud de la bande de Gaza, s’est alarmée l’ONU.
Et pour la seconde fois depuis le discours de J. Biden la veille et toujours en plein Shabbat, le bureau du Premier ministre Netanyahu a publié une réaction, en anglais cette fois-ci, pour éviter tout malentendu. En assurant que les conditions posées par Israël pour mettre fin à la guerre n’ont pas changé. L’idée qu’Israël accepte un cessez-le-feu permanent avant le retour de tous les otages et la destruction du Hamas ne tient tout simplement pas la route, souligne le texte.
Pendant ce temps, la situation humanitaire continue de se détériorer dans la bande de Gaza. Sur ce point, l’Égypte doit accueillir dimanche une réunion sur « la réouverture du passage-frontalier de Rafah » vers la bande de Gaza. Selon des sources égyptiennes, il s’agit d’une rencontre israélo-égyptienne au Caire mais qui sera supervisée par les États-Unis. Le principal objectif de cette réunion sera la réouverture du point de passage de Rafah à l’extrémité sud de la Bande de Gaza.
Depuis le 7 mai dernier, Israël a pris le contrôle du côté palestinien de ce terminal et les Égyptiens bloquent depuis cette date l’envoi de camions humanitaires car ils exigent le retrait total de ce point de passage. Les Égyptiens ont annoncé qu’ils refusaient de changer l’accord conclu en 2005 avec l’autorité palestinienne et de traiter avec les Israéliens. Ils y voient une reconnaissance de l’occupation israélienne de Rafah. Sous pression US, le président égyptien al-Sissi a donné le feu vert la semaine dernière pour le passage de l’aide humanitaire via le terminal israélien de Kerem Shalom mais c’est loin d’être suffisant. Il faut donc s’attendre demain à un véritable bras de fer américain face à l’Egypte et Israël pour permettre la réouverture du terminal frontalier égypto-gazaoui.
Le Hamas évalue l’offre
Antonio Guterres, Secrétaire général des Nations unies, a appelé la veille, vendredi, les parties au conflit à Gaza à « saisir » l’opportunité offerte par un plan proposé par Israël pour un cessez-le-feu et la libération des otages. Plan dont le Hamas avait déclaré considérer « positivement » l’exposé qu’en avait fait J. Biden. « Nous avons été témoins de trop de souffrances et de destructions à Gaza. Il est temps d’arrêter », a fait valoir A. Guterres dans un message posté sur X qui appelle « toutes les parties » au conflit à Gaza « à saisir cette opportunité » afin d’arriver à une « paix durable au Moyen-Orient ».
Plus tôt, depuis la Maison Blanche, J. Biden a annoncé qu’Israël avait soumis la veille, via le médiateur qatari, une nouvelle feuille de route au Hamas en vue d’un cessez-le-feu. « Il est temps d’entamer cette nouvelle étape, que les otages rentrent chez eux, qu’Israël soit en sécurité, que les souffrances cessent. Il est temps que cette guerre se termine, que le jour d’après commence », a enjoint le président américain.
Toujours selon le président américain, ce plan se composerait de trois phases d’une quarantaine de jours chacune. La première prévoirait un retrait des forces israéliennes des « zones habitées de Gaza », permettant le retour des Palestiniens déplacés ainsi que l’acheminement de l’aide humanitaire dans l’enclave. Durant cette première étape, des prisonniers palestiniens seraient libérés ainsi que « certains » otages israéliens (femmes, personnes âgées et les blessés). Les derniers otages de nationalité américaine rentreraient alors « à la maison », a promis l’hôte du Bureau ovale. Le reste des otages israéliens seraient libérés lors de la deuxième phase, si les négociations aboutissent, menant à un arrêt définitif des hostilités. Les contours de cette phase restent néanmoins à définir durant les six semaines de trêve de la première phase.
Enfin, dans un troisième temps, un vaste plan de reconstruction de Gaza serait lancé avec le soutien de la communauté internationale et la restitution des dernières dépouilles d’otages israéliens à leurs familles. Les partenaires régionaux veilleraient à ce que le Hamas ne reconstitue pas ses capacités de combat. Chacune de ces phases durerait une quarantaine de jours.
« Le Hamas considère positivement ce qui a été inclus aujourd’hui dans le discours du président américain Joe Biden quant à un cessez-le-feu permanent, le retrait des forces israéliennes de Gaza, la reconstruction et l’échange de prisonniers », a réagi par communiqué le mouvement palestinien. Dans la journée, Ismaïl Haniyeh, chef politique du Hamas, avait indiqué que son mouvement avait de nouveau informé les médiateurs que ses « exigences », tout particulièrement celle d’un cessez-le-feu permanent et du retrait total d’Israël de la bande de Gaza, n’étaient « pas négociables ». D’ailleurs, le Hamas devrait prendre en considération l’avis des diverses factions de la résistance qui s’arcboutent sur la feuille de route qu’elles avaient fait valoir il y a quelques semaines aux intermédiaires.
L’annonce de ce plan intervient au moment où l’armée sioniste a progressé, jusqu’au centre de Rafah, devenue l’épicentre du conflit, malgré l’injonction de la Cour internationale de Justice (CIJ) adressée le 24 mai à Israël de cesser ses opérations militaires dans cette ville du sud de Gaza.
« Le gouvernement israélien est uni dans son désir de ramener nos otages aussi vite que possible, le Premier ministre a autorisé l’équipe de négociations à présenter un plan pour atteindre cet objectif, tout en insistant sur le fait que la guerre ne s’arrêtera pas tant que tous ses buts ne sont pas atteints », a indiqué le 31 mai le bureau de B.Netanyahou dans un communiqué, citant « le retour » de tous les otages et « l’élimination des capacités militaires et gouvernementales du Hamas ».