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Retrouvailles maroco-espagnoles : P. Sanchez ne lâche rien sur les Présides

A l'ouverture de la séance plénière de la Réunion de haut niveau, le chef du gouvernement espagnol a souligné, jeudi à Rabat, le caractère stratégique des « questions de souveraineté » entre les deux pays. Si Madrid a révisé sa politique sur le dossier saharien dans le sens de l’appui de l’offre d’autonomie, il n’en reste pas moins que sur l’avenir des Présides et des iles qui s’y rattachent, c’est le statut quo que les responsables espagnols font valoir.
Retrouvailles maroco-espagnoles

« Nous avons assumé un engagement de respect mutuel, par lequel dans notre discours et dans notre pratique politique, nous allons éviter tout ce qui offense l’autre partie, notamment tout ce qui affecte nos sphères de souveraineté respectives », a précisé Pedro Sanchez. Il a loué l’engagement de Rabat et Madrid « à la transparence et à la communication permanente » et « au dialogue et non au fait accompli » sur ces dossiers territoriaux hautement sensibles pour les deux royaumes.

P. Sánchez a, ainsi, salué « le grand sens de responsabilité et la conscience historique » avec lesquels le Maroc et l’Espagne abordent cette nouvelle étape qui, selon lui, sera « bénéfique pour les deux peuples ». 

Il s’est félicité de « la validité et l’intégrité de tous les accords entre les deux parties », y compris « ceux qui établissent nos frontières et ceux qui établissent des mécanismes de coopération avancés ». Et d’annoncer une prochaine mise à jour du Traité de bon voisinage, d’amitié et de coopération. En effet, la Déclaration conjointe du 7 avril, indique dans son point 15, que « les deux pays entameront des échanges sur la mise à jour du Traité de Bon Voisinage, d’Amitié et de Coopération, de 1991, sur la base des principes, des paramètres et des priorités devant guider leurs relations bilatérales, dans les années à venir ».

Si le Maroc continue de saluer l’appui du chef du gouvernement espagnol au plan d’autonomie au Sahara, P. Sanchez a fait publiquement grand cas, et depuis Rabat, de sa satisfaction sur une autre « sphère de souveraineté ». Il a, ainsi, salué « le succès de la première expédition commerciale qui a eu lieu vendredi dernier à travers les douanes de Ceuta et Melilla ». Celle de Melilla était fermée depuis août 2018. Le point 3 de la Déclaration conjointe du 7 avril annonce, d’ailleurs, « la pleine normalisation de la circulation des personnes et des marchandises sera rétablie de façon ordonnée, y compris des dispositifs appropriés de contrôle douanier et des personnes au niveau terrestre et maritime ».

En mettant l’accent sur les douanes des Présides, P. Sanchez fait taire les voix de l’opposition de droite, Parti Populaire et Vox qui, dans un bel ensemble, l’accusent, depuis des mois, d’avoir « renoncé à la souveraineté espagnole » sur les deux présides. Un « succès »  qui pourrait jouer en faveur de son parti, le PSOE, alors que les élections communales et régionales auront lieu en mai prochain.

Pour rappel, un haut responsable du ministère marocain des Affaires étrangères avait affirmé, en octobre dernier, que la Déclaration conjointe du 7 avril reconnaît l’existence de « frontières terrestres » entre les deux pays. Il apportait ainsi un démenti à une lettre du ministère marocain de l’Intérieur adressée au Haut-commissariat de l’ONU aux droits de l’Homme, portant sur le drame de Melilla du 24 juin, niant l’existence de frontières terrestres entre le Maroc et l’Espagne.

Reste à savoir si cette question cruciale pour le Royaume a été abordée lors de la réunion à huis clos entre les responsables des deux pays. D’autant que des voix sages, y compris parmi le PSOE, appellent à solder définitivement le passif colonial de l’Espagne en Afrique.

Aziz Akhannouch qui a co-présidé au côté de l’hôte espagnol, mercredi à Rabat, la séance de clôture des travaux du forum économique Maroc-Espagne, a attribué la « nouvelle ère » dans les relations entre les deux pays « à la position de votre gouvernement concernant nos provinces du Sud. L’Espagne a eu le courage du réalisme historique. Et pour cela, le Maroc vous rend hommage ». Référence est ainsi faite au soutien de P. Sanchez au plan marocain d’autonomie au Sahara occidental, exprimé le 14 mars 2022 dans une lettre adressée au roi Mohammed VI.

Le chef de l’exécutif a souligné, dans son allocution, que l’humanité « vit depuis plusieurs années un désordre mondial, aggravé par une pandémie planétaire, le retour de la guerre en Europe et un réchauffement climatique qui nous affecte tous. La meilleure réponse à donner à ce désordre est de travailler main dans la main pour construire ensemble, un avenir meilleur ».

Il s’est félicité aussi de l’excellence des relations entre Rabat et Madrid, citant particulièrement la « coopération sécuritaire et de lutte contre le terrorisme », ainsi que « l’effort fourni par le Maroc dans la régulation des flux migratoires, dans le respect des valeurs humanistes ».

A. Akhannouch n’a pas oublié de citer le partenariat énergétique. « Pendant 25 ans, le Gazoduc Maghreb-Europe a permis d’alimenter l’Espagne en gaz, en traversant le Maroc. Face à la nouvelle donne géopolitique, nos deux pays ont montré l’ingéniosité et la flexibilité de leur collaboration, en maintenant l’outil disponible et en inversant le flux du gazoduc afin d’alimenter le Maroc en GNL via l’Espagne », a-t-il indiqué. Pour mémoire, le gouvernement Sanchez avait ignoré les menaces algériennes et activé, le 28 juin, le flux inverse du GME.

L’hôte espagnol a salué de son côté « la nouvelle association économique avancée » et « l’intense processus de modernisation de l’économie marocaine », soulignant que « 17 600 entreprises espagnoles exportent vers » le royaume. « Il est stratégique que les deux pays favorisent le développement des énergies propres dans des secteurs à énorme potentiel comme l’hydrogène vert ou la biomasse », ajoutant que le Maroc et l’Espagne « réunissent toutes les conditions pour mener et être des références pour un véritable changement de paradigme » dans la nouvelle économie verte.

P. Sanchez a ajouté que la réunion de haut niveau servira à promouvoir la coopération et « consolider les accords conclus avec le roi Mohammed VI, le 7 avril 2022 ».

Ces entretiens ont été sanctionnés par une Déclaration conjointe, véritable feuille de route pour la nouvelle étape dans les relations entre les deux pays. Le chef du gouvernement s’est dit, par ailleurs, convaincu que les bonnes relations entre le Maroc et l’Espagne bénéficient aussi à l’Union européenne. Madrid veut ainsi jouer un rôle d’apaisement dans la crise que vit Rabat avec Bruxelles. C’est ce qui se verra à l’aune de la présidence de l’ensemble européen dont hérite l’Espagne. Par ailleurs, une vingtaine d’accords de coopération ont été signés entre les deux pays voisins dans plusieurs domaines d’intérêt commun.

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