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Le mal est profond en Algérie: Le système sape jusque ses propres pompiers !

Dimanche 2 mai 2021, le centre d’Alger est bloqué par des manifestants en uniformes. Habitués aux marchés hebdomadaires du Hirak populaire, les Algérois ont découvert, médusés, la présence de centaines de pompiers en colère décidés à revendiquer leurs droits devant la présidence de la République. Une première pour les membres de ce corps constitué soumis à une discipline militaire. Leur avancée vers le quartier d’El Mouradia, siège de la présidence, est stoppée net par un important cordon de sécurité et ils ont été repoussés à coups de matraques et de gaz lacrymogène.
Les agents de la protection civile changent d’itinéraire pour se rassembler devant le siège de leur direction, dans le quartier résidentiel huppé de Hydra. Sur place, ils font entendre leurs revendications: hausse de salaire, amélioration des conditions professionnelles et paiement des heures supplémentaires. Les pompiers exigent également le versement d’une prime Covid-19, au même titre que le personnel médical.
Aux journalistes, ils disent être les oubliés de la gestion de la crise sanitaire et tiennent à rappeler qu’ils mettent leurs vies en danger au quotidien en transférant les personnes atteintes vers les hôpitaux. C’est également eux qui sont chargés de l’inhumation des personnes décédées. Mais le gouvernement n’a pas du tout apprécié cette démonstration de force. Le ministère de l’Intérieur, département de tutelle de la protection civile, réagit immédiatement et accuse les pompiers qui ont manifesté d’être manipulés par des parties étrangères. «Nourri par des parties servant des agendas hostiles à l’égard de l’Algérie, ce mouvement intervient au moment où la tutelle a procédé à l’examen des préoccupations socioprofessionnelles des affiliés de ce corps et à la prise en charge des revendications soulevées dans le cadre de la loi», indique ce un communiqué du ministère. Les mesures disciplinaires ont suscité l’ire de toute la corporation. Ainsi, les pompiers organisent des actions pour exiger la réintégration de leurs collègues. À Béjaïa, à 250 kilomètres à l’est d’Alger, les agents manifestent dans les rues de la ville. A Biskra, les pompiers empêchent leur chef d’accéder à son bureau en signe de protestation. L’officier fait appel à la police qui entre en force dans la caserne.
Sur les réseaux sociaux, des collectifs de pompiers ont accordé un délai de 10 jours aux autorités pour réintégrer dans leurs postes les 230 agents et mettre en application la plateforme de revendications. Dépassée la date du 15 mai, les pompiers menacent de déposer une démission collective. Résultat des courses, l’Intérieur revient à la charge pour annoncer, dans un second communiqué, la suspension de 230 agents qui ont manifesté dans les rues d’Alger et l’engagement de poursuites judiciaires contre eux pour avoir violé «le statut particulier des fonctionnaires relevant des corps spécifiques de la protection civile». Ironie du calendrier, les sanctions interviennent la veille de la journée internationale des pompiers.
A l’occasion du 1er mai, le Président par défaut Abdelmadjid Tebboune a déclaré que «la volonté politique s’est renforcée en vue d’accélérer la relance économique dans le cadre d’un large dialogue avec les partenaires sociaux et les opérateurs économiques». Les autorités sont donc prêtes à dialoguer avec les syndicats et les représentants des travailleurs pour trouver des solutions. Mais pas à n’importe quel prix. Dans la dernière édition d’El Djeich, l’éditorialiste accuse «des éléments subversifs» d’inciter «les travailleurs et les salariés de certains secteurs à lancer des grèves, apparemment motivées par la revendication de certains droits» dans le seul but de «faire échec aux prochaines élections législatives» prévues le 12 juin 2021.
Mais la réalité est toute autre ! La pandémie de Covid-19 et la crise économique provoquée par la chute des prix du pétrole ont mis les finances de l’Algérie à rude épreuve. Les réserves de change sont passées de 194 milliards de dollars en décembre 2013 à 42 milliards en décembre 2020. Selon une récente étude du Fonds monétaire international (FMI), le pays a besoin d’un baril de brut à 169 dollars pour équilibrer son budget en 2021. Une chimère, le baril s’écoulant pour l’heure à 65 dollars.

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