Les frappes, effectuées dans la nuit du 11 au 12 janvier, par les forces américaines et britanniques contre des objectifs au Yémen font grincer des dents à Capitol Hill. Plusieurs élus, tous bords confondus, ont brandi la constitution des États-Unis, estimant que J. Biden avait outrepassé ses droits en ordonnant ces bombardements. Si, sans surprise, des républicains, à l’instar de la médiatique représentante de Géorgie Marjorie Taylor Greene, ont souligné que les frappes au Yémen n’avaient pas reçu l’aval du Congrès, les démocrates ont été les premiers à donner de la voix. « Le président doit se présenter au Congrès avant de lancer une frappe contre les Houthis au Yémen et de nous impliquer dans un autre conflit au Moyen-Orient », a réagi sur X le démocrate Ro Khanna dans la foulée de l’annonce de ces frappes. « C’est l’article premier de la Constitution. Je défendrai cela, que la Maison Blanche soit démocrate ou républicaine », a ajouté ce représentant de Californie.
« La Constitution compte, quelle que soit l’affiliation à un parti », a abondé Mike Lee, sénateur républicain de l’Utah. « Ro a tout à fait raison sur ce point », a également soutenu Matt Gaetz, représentant républicain de Floride. « Exactement. Nous n’avons pas déclaré la guerre. Biden doit s’adresser au Congrès ! », a surenchéri Anna Paulina Luna, également représentante républicaine de Floride. « Seul le Congrès a le pouvoir de déclarer la guerre », a insisté leur homologue du Kentucky, le républicain Thomas Massie. « Il s’agit d’une violation inacceptable de la Constitution. L’article 1 exige que l’action militaire soit autorisée par le Congrès », a dénoncé Pramila Jayapal, représentante démocrate de Washington. « Ces frappes aériennes n’ont pas été autorisées par le Congrès », a fustigé également son homologue de l’Oregon, Val Hoyle. « La Constitution est claire : le Congrès est seul habilité à autoriser l’implication militaire dans des conflits à l’étranger. Chaque président doit d’abord se présenter au Congrès et demander une autorisation militaire, quel que soit son part i», a-t-elle insisté. « Les gens ne veulent pas qu’une plus grande partie de l’argent de nos contribuables soit consacrée à des guerres sans fin et au massacre de civils. Arrêtez les bombardements et faites mieux avec nous », s’est émue Cori Bush, représentante démocrate du Missouri. « Le peuple américain est fatigué de la guerre sans fin », a dénoncé la représentante socialiste démocrate Rashida Tlaib, d’origine palestinienne. « Les États-Unis ne peuvent pas risquer de s’enliser dans un autre conflit qui durera plusieurs décennies sans l’autorisation du Congrès », a estimé le représentant démocrate du Wisconsin Mark Pocan. « La violence ne fait qu’engendrer davantage de violence », a brandi la représentante démocrate du Texas, Barbara Lee, qui a rappelé avoir voté contre la guerre en Irak. « Nous avons besoin d’un cessez-le-feu maintenant pour empêcher une escalade de la violence meurtrière, coûteuse et catastrophique dans la région », a-t-elle poursuivi.
Aux États-Unis, la loi sur les pouvoirs de guerre, votée sous Richard Nixon, impose au président d’obtenir l’aval du Congrès pour engager plus de 60 jours des troupes US à l’étranger. Elle laisse toutefois la possibilité à la Maison Blanche d’engager l’armée dans des hostilités en cas de déclaration de guerre, d’« autorisation statutaire spécifique » ou d’« urgence nationale créée par une attaque contre les États-Unis, ses territoires ou possessions, ou ses forces armées ».
Il s’agit de « l’une des lois fédérales les plus souvent déformées », « souvent utilisée à tort pour justifier des pouvoirs de guerre présidentiels inconstitutionnels », dénonce le représentant libertarien du Michigan Justin Amash. Citant les trois cas de figure où le président américain peut engager les forces armées du pays, l’élu assure qu’« aucun n’indique qu’il existe un pouvoir présidentiel pour entreprendre une action militaire offensive unilatérale [sans l’approbation du Congrès] ».
D’autres élus américains estimant quant à eux que J.Biden n’avait pas à demander l’autorisation du Congrès pour frapper au Yémen, remontent plus loin encore dans l’histoire. Selon le journaliste Michael Tracey, le gouverneur républicain de Floride Ron DeSantis lui aurait confié que « les pères fondateurs avaient déjà autorisé le président à frapper les pirates barbaresques en 1801, et que ce même principe s’appliquerait aujourd’hui aux Houthis au Yémen ».