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Armes britanniques pour Riyad : Londres justifie ses exportations

Le gouvernement britannique a défendu mardi devant la justice britannique la légalité de ses ventes d’armes à l’Arabie Saoudite, brocardé par plusieurs ONG de violer le droit international lors de son intervention au Yémen.
Armes britanniques pour Riyad

Les bombardements répétés d’hôpitaux et d’autres cibles civiles attribués à la coalition régionale menée par Riyad, auraient dû conduire le gouvernement britannique à identifier des violations du droit international humanitaire, contraires aux règles régissant la vente d’armes, a plaidé Ben Jaffey, l’avocat de l’ONG Campaign against arms trade (CAAT), devant la Haute Cour de Londres.

L’Arabie Saoudite intervient militairement au Yémen depuis 2015, menant une coalition régionale en soutien aux forces pro-gouvernementales opposées aux rebelles Houthis, soutenus par l’Iran. Le conflit a fait des dizaines de milliers de morts et a provoqué la pire crise humanitaire au monde, selon les Nations unies.

Le gouvernement « ne devrait pas armer l’Arabie Saoudite. Ces ventes d’armes sont illégales et elles devraient cesser », a insisté auprès de l’AFP Emily Apple, porte-parole de CAAT. Une dizaine de personnes s’étaient rassemblées mardi devant le tribunal à l’ouverture de cette procédure dite de Judicial Review, qui porte sur le contrôle de la légalité de l’action de l’administration.

En 2019, après une précédente procédure lancée par CAAT, Londres avait été obligé d’interrompre ses ventes d’armes au régime saoudien. La justice avait estimé que le gouvernement n’avait pas évalué au préalable si la coalition menée par Ryad avait commis des violations du droit international humanitaire. Elle lui demandait donc de réétudier la légitimité de ses ventes.

Un an plus tard à l’été 2020, le gouvernement avait repris ses ventes, arguant qu’après examen il n’y avait pas de risque évident que l’exportation d’équipements militaires vers l’Arabie saoudite puisse être utilisée pour commettre une violation grave du droit international humanitaire. C’est cette reprise des ventes que conteste CAAT dans cette procédure.

Devant les deux juges en charge de l’affaire, James Eadie, l’avocat du ministère du Commerce, en charge de délivrer les licences d’exportation d’armes, a estimé que depuis 2019, « il y a eu une analyse attentive et détaillée » des évènements sur le terrain et « une tentative honnête de traiter le problème identifié » par la justice. Et « il n’y a aucune irrationalité dans la manière dont cela a été fait », a-t-il ajouté.

L’avocat de la défense a cependant jugé « absurde » l’argument du gouvernement qui a justifié la reprise des ventes par le fait que les violations du droit international humanitaire qui ont été documentées sont des cas « isolés ». Et il a énuméré de nombreux exemples, comme le bombardement en 2016 d’un hôpital de Médecins Sans Frontières (MSF) qui avait fait une dizaine de morts.

« Le gouvernement a perdu en 2019, et a accepté de modifier ses procédures pour évaluer le risque que de futurs crimes de guerre soient commis (avec des armes vendues avec son feu vert). Puis il a passé une année à réétudier les licences qu’il avait accordées et a décidé qu’il n’avait pris aucune mauvaise décision », a pointé auprès de l’AFP Martin Butcher, en charge des armes et conflits au sein de l’ONG Oxfam, partie prenante de la procédure.

Selon les analyses de CAAT basées sur des données fournies par le gouvernement, le Royaume-Uni a accordé pour au moins 7,9 milliards de livres de licences de vente d’armes à l’Arabie Saoudite depuis le début de sa campagne au Yémen en 2015.

Dans un communiqué, l’ONG Human Rights Watch (HRW) a réfuté toute idée selon laquelle les violations du droit international par la coalition seraient « isolées ». « Des armes britanniques ont été utilisées dans certaines de ces violations en toute impunité », a affirmé Niku Jafarnia, chercheur à HRW.

Interpellé mardi au Parlement sur le sujet, James Cleverly, ministre des Affaires étrangères a réaffirmé l’engagement du Royaume-Uni pour « travailler avec le gouvernement yéménite et les autres pays de la région pour rétablir une paix durable au Yémen », sans répondre sur les ventes d’armes.

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