Mohsen Eslami, porte-parole du siège électoral du pays, a annoncé le résultat final lors d’une conférence de presse suivant l’annonce du décompte final des voix. Il a déclaré que sur 24,5 millions de suffrages exprimés, l’ancien ministre de la Santé et député de haut rang M. Pezeshkian en a obtenu 10,4 millions tandis que l’ancien négociateur en chef sur le nucléaire S. Jalili en a reçu 9,4 millions. Ce dernier bénéficie d’ores et déjà de l’appui de Mohammad Baqer Qalibaf.
Les deux autres candidats – M.B. Qalibaf, président du Parlement et Mostafa Pourmohammadi, ancien ministre de l’Intérieur, sont à la traîne avec respectivement 3,3 millions et plus de 206 000 de voix.
M. Pezeshkian et S. Jalili se dirigeront vers un second tour prévu le 5 juillet. Le second tour est requis si aucun candidat n’obtient 50 % des voix, plus un.
Dans ce cas, le choix des abstentionnistes sera déterminant pour le second tour. Ces prochains jours diront si les réformateurs vont réussir à mobiliser davantage leur électorat traditionnel. Mais les choses s’annoncent plutôt difficiles.
Ahmad Vahidi, ministre de l’Intérieur, a déclaré que le gouvernement était prêt à organiser le second tour des élections et a salué le peuple iranien et les autorités électorales pour avoir organisé le scrutin sans aucun incident. « Une fois de plus, au cours des derniers mois, nous avons pu remporter un autre succès ensemble. Les élections se sont déroulées en toute sécurité et solidité, avec une concurrence sérieuse et une forte participation des gens dans les bureaux de vote », a-t-il déclaré aux journalistes après le décompte final des voix. « J’espère (…) que nous assisterons à des élections vigoureuses dans tout le pays vendredi », a-t-il ajouté.
Les deux candidats sont autorisés à commencer leur campagne électorale de dimanche à mercredi, a indiqué A. Vahidi. La campagne doit s’arrêter 24 heures avant le vote.
Au décompte final, M. Pezeshkian est arrivé en tête avec 10 415 991 voix (42,45%) sur 24 535 185 voix, tandis que S. Jalili est en seconde position avec 9 473 298 voix (38,61%). M.B. Qalibaf et M. Pourmohammadi sont tous deux arrivés loin derrière, troisième et quatrième, avec respectivement 3 383 340 (13,78 %) et 206 397 voix (0,84 %). Le vote a été prolongé à trois reprises vendredi, chaque fois de deux heures, après 18h (heure locale) à laquelle le scrutin était censé se terminer, conformément à l’exigence constitutionnelle d’une période de vote de 10 heures.
Les bureaux de vote ont finalement été fermés à minuit, après quoi le décompte des voix a commencé dans des milliers de bureaux de vote disséminés à travers le pays, dont plus de 6 000 dans la capitale Téhéran.
Ces élections anticipées ont pour but de choisir un successeur au président Ebrahim Raïssi, qui a perdu la vie dans un crash d’hélicoptère le 19 mai, aux côtés du ministre des Affaires étrangères et d’autres membres de la délégation présidentielle.
Plus de 61 millions d’Iraniens étaient éligibles pour voter lors des élections de vendredi, dont beaucoup étaient des primo-votants.
Si le réformateur M. Pezeshkian est sorti en tête du premier tour de l’élection présidentielle, il n’est pourtant pas le favori malgré ses 42 % des voix contre 38 % pour son rival, l’ultraconservateur S. Jalili. Alors qu’il s’agira de la première fois depuis 2005 qu’un second tour sera nécessaire, le scrutin du 5 juillet opposera deux candidats aux visions très différentes.
Considéré comme appartenant au camp réformateur, M. Pezeshkian est un candidat quasiment inconnu quand il s’est engagé dans la course. Un grain de sable dans la campagne pour certains, un faux espoir pour d’autres, ce candidat connu pour son franc parler n’a pas hésité à critiquer le pouvoir en place lors du mouvement de protestation provoqué par la mort de Mahsa Amini en septembre 2022. Sans remettre en cause le système, le candidat réformateur a dénoncé les méthodes de répression des manifestations contre le port du voile. Pendant cette campagne électorale, il s’est notamment démarqué de ses adversaires en diffusant l’hymne du mouvement de protestation « Femme, vie, liberté » dans son QG. Ce chirurgien de profession, âgé de 69 ans, est député de Tabriz, grande ville au nord-ouest de l’Iran. Son expérience gouvernementale se résume à un seul poste : celui de ministre de la Santé entre 2001 et 2005 dans le gouvernement du réformateur Mohammad Khatami.
Pendant la campagne, ce candidat a prôné un réchauffement avec les pays occidentaux, États-Unis en tête, pour lever les sanctions qui pèsent sur l’économie iranienne. Mais en Iran, la politique étrangère est une prérogative du Guide suprême Ali Khameneï : la marge de manœuvre de M. Pezeshkian, s’il est élu, serait donc étroite.
De l’autre côté, S. Jalili a lui la confiance du guide suprême Ali Khameneï. Cet ultraconservateur et ancien négociateur du dossier nucléaire entre 2007 et 2013 plaide pour la poursuite d’une politique anti-occidentale et souhaite se rapprocher de la Chine sur le plan économique. Concernant la défense, S. Jalili espère compter sur la Russie et le rival historique de Téhéran, l’Arabie saoudite.
Cette élection a toutefois une influence limitée car les pouvoirs du président sont restreints. Il doit appliquer les grandes lignes politiques fixées par le guide suprême.