Le Hamas qui, indirectement, mène des négociations avec Israël via l’entremise du Qatar et de l’Egypte a fermement condamné le plan israélien d’annexer davantage de terres palestiniennes, un plan qui fait preuve de la nature agressive et des ambitions expansionnistes du régime. « Les allégations hostiles des dirigeants de l’occupation exigent une réponse ferme des gouvernements arabo-musulmans pour faire face à ces ambitions et mettre un terme à leurs crimes », a déclaré mardi le Hamas.
Le Hamas a émis ce communiqué en réaction à la diffusion d’une carte fallacieuse sur les comptes officiels des réseaux sociaux israéliens montrant les territoires palestiniens ainsi que la Jordanie, la Syrie et le Liban annexés au régime. Cette carte est une preuve supplémentaire de la nature coloniale d’Israël et son plan d’escalade de l’agression pour assujettir la région et s’emparer de ses ressources, a indiqué le mouvement avant d’appeler la Ligue arabe et les nations arabes et musulmanes à faire face aux machinations d’Israël et mettre fin à ses crimes contre les Palestiniens.
« Ces politiques agressives et ces rodomontades récurrentes, au moment où une guerre brutale de génocide et de nettoyage ethnique est en cours à Gaza et en Cisjordanie, exigent une action décisive de la part de la Ligue arabe et des États arabo-musulmans. Il est essentiel de leur faire face, de mettre un terme à la poursuite des crimes sionistes contre le peuple palestinien et d’apporter tout le soutien et la solidarité nécessaires pour contrer les plans fascistes qui visent l’ensemble de la région », a averti le Hamas.
La carte a été rendue publique après que Bezalel Smotrich, ministre israélien d’extrême droite, a fait part de ses aspirations à conquérir non seulement tous les territoires palestiniens allant jusqu’au Jourdain, mais aussi la Syrie, la Jordanie et le Liban. Il a également exprimé son ambition d’annexer des territoires arabes allant jusqu’à l’Irak et l’Arabie saoudite.
Le Hamas a préalablement exhorté les populations arabes et musulmanes, ainsi que les peuples épris de liberté partout dans le monde, à exercer davantage de pression sur les gouvernements et les organisations internationales pour qu’ils aillent au-delà de la simple condamnation et « assument leur responsabilité en mettant fin à cet holocauste commis par l’occupation sioniste, qui se sent en sécurité dans ses crimes grâce au soutien des États-Unis ».
Des responsables palestiniens et jordaniens ont condamné le même jour la mise en ligne de cette carte fallacieuse sur les réseaux sociaux de l’entité sioniste qui revendiquait des territoires de plusieurs pays arabes comme faisant partie du soi-disant « Grand Israël ». Nabil Abu Roudeina, porte-parole de l’Autorité autonome palestinienne basée à Ramallah, a décrit la carte comme une violation flagrante de toutes les résolutions et lois internationales. Il a déclaré que les politiques d’occupation israéliennes, les attaques des colons et l’assaut incessant sur l’esplanade de la mosquée al-Aqsa nécessitent « une position internationale urgente pour mettre un terme au calvaire subi par le peuple palestinien sous forme de guerre et de destruction ». Il a également appelé le gouvernement américain à cesser de soutenir inconditionnellement toutes les politiques israéliennes qui portent préjudice à la sécurité et à la paix en Asie de l’Ouest.
A Amman, le ministère jordanien des Affaires étrangères a lui aussi qualifié le document de « provocateur et infondé ».
L’AHA dénonce Tel-Aviv et Washington
L’American Historical Association (AHA), plus grande et plus ancienne association professionnelle d’historiens aux États-Unis, a adopté lundi une résolution condamnant le « scolasticide » d’Israël à Gaza, dénonçant ainsi « l’effort intentionnel pour détruire systématiquement le système éducatif palestinien » . La résolution, adoptée par une majorité écrasante de 428 voix contre 88, critique en outre l’aide militaire américaine à Israël, de « plus de 12,5 milliards de dollars entre octobre 2023 et juin 2024 ».
Selon la résolution, l’armée israélienne a détruit 80 % des écoles de Gaza, laissant plus de 625 000 enfants sans accès à l’éducation, ainsi que les 12 campus universitaires de l’enclave assiégée.
Le texte affirme laconiquement que l’armée israélienne a « effectivement anéanti le système éducatif de Gaza ». Le caractère intentionnel de cet anéantissement, selon l’organisation, justifie la qualification de « scolasticide ».
Après avoir détaillé l’ampleur des destructions à Gaza, la résolution conclut que l’AHA, « qui soutient le droit de tous les peuples à enseigner et à apprendre librement leur histoire, condamne la violence israélienne à Gaza qui sape ce droit ».
La résolution de l’Association US appelle ainsi à « un cessez-le-feu permanent pour mettre fin au scolasticide », ainsi qu’à la formation d’ « un comité pour aider à reconstruire les infrastructures éducatives de Gaza ».
Bruxelles au défi de l’IA qui tue
L’utilisation par Israël de technologies d’intelligence artificielle (IA), financées par des programmes de recherche de l’Union européenne (UE), pour cibler des civils, suscite des critiques croissantes.
Depuis le début des attaques israéliennes sur Gaza, le 7 octobre 2023, l’UE a alloué plus de 238 millions d’euros (246 millions de dollars) à des institutions israéliennes pour des projets de recherche et d’innovation. Ces fonds auraient soutenu le développement de technologies d’IA permettant de « localiser et tuer » des civils, utilisées par Israël dans la bande de Gaza.
Nozomi Takahashi, membre du conseil d’administration de la Coordination Européenne des Comités et Associations pour la Palestine, a déclaré à Anadolu être au courant des accusations concernant l’utilisation de fonds européens pour financer des technologies ciblant les civils. Il a précisé que le sujet avait été abordé dans des lettres adressées à des responsables de haut niveau de l’UE, dont l’ancien chef de la diplomatie européenne Josep Borrell. Elle a évoqué les systèmes basés sur l’IA utilisés par l’armée israélienne, tels que Habsora (L’Évangile), Lavender et Where is Daddy? (Où est Papa?). Selon elle, ces systèmes servent « à identifier, localiser et éliminer les cibles dans le cadre du génocide actuel à Gaza ».
Soulignant que ces technologies sont utilisées de manière indiscriminée contre les civils, Takahashi a déclaré que « de telles exécutions extrajudiciaires sont interdites par le droit international. L’ampleur et la fréquence des victimes civiles à Gaza, tuées à l’aide de ces systèmes d’IA, sont accablantes.»
N. Takahashi a mis en lumière l’attention particulière de l’Union européenne sur le développement de l’IA, en précisant que des institutions de recherche israéliennes participent également à divers projets financés par l’UE dans ce domaine. Elle a souligné que l’identification des projets financés par l’UE à l’origine de ces technologies utilisées par l’armée israélienne est impossible en raison de la confidentialité et du secret qui les entourent. Elle a ajouté que « les risques potentiels élevés associés à de telles technologies entre les mains d’un gouvernement ayant un passé marqué par des violations des droits de l’Homme devraient alerter la communauté internationale ».
N. Takahashi a affirmé que seuls les projets civils sont éligibles au financement dans le cadre du programme Horizon Europe. « Le développement de telles technologies basées sur l’IA brouille encore davantage la frontière entre les applications civiles et militaires » a-t-elle souligné.
Elle a critiqué l’Union européenne pour son « approche étroite » dans l’évaluation des objectifs des projets qu’elle finance, jugée insuffisante pour assurer un suivi rigoureux et prévenir leur potentiel usage militaire. Et rappelé que les principes éthiques d’Horizon Europe exigent que les projets financés respectent « la dignité humaine, la liberté, la démocratie, l’égalité, l’Etat de droit et les droits de l’Homme, y compris ceux des minorités ». Cependant, selon elle, l’historique des entités de recherche impliquées, qu’il s’agisse d’activités militaires ou de violations des droits de l’Homme, « n’est ni questionné ni requis » lors des évaluations éthiques.
Eman Abboud, enseignante à Trinity College Dublin, a souligné, pour sa part, qu’il a été démontré que des fonds européens ont financé des entreprises d’armement sous couvert de recherches en sécurité civile et en technologies. Elle a déclaré que l’Union européenne est « coupable » de soutenir l’industrie militaire israélienne -actuellement visée par des accusations de génocide devant la Cour internationale de justice (CIJ) – à travers ses programmes de financement.
« Des organisations israéliennes comme Elbit Systems Ltd. et Israel Aerospace Industries, qui tirent profit et sont profondément impliquées dans l’oppression violente et l’apartheid de longue date imposés par Israël, ainsi que dans le génocide actuel du peuple palestinien, ont reçu des financements pour des recherches en sécurité via des programmes européens », a affirmé E. Abboud.
Critiquant la possibilité pour des organisations contribuant à des violations des droits de l’Homme et sapant le droit humanitaire international de bénéficier de fonds européens, elle a déclaré que « l’Union européenne a refusé de rompre ses liens commerciaux avec Israël ou de l’exclure du programme Horizon Europe »,malgré le dossier en cours à la CIJ contre Israël. Elle a évoqué le projet EU-GLOCTER, programme de « lutte contre le terrorisme » impliquant des institutions israéliennes, et a souligné leurs liens avec l’armée et les services de renseignement israéliens, notamment l’Institut international de lutte contre le terrorisme (ICT) de l’Université Reichman, cofondé par un ancien chef des renseignements. « Nous devons comprendre que ces institutions fournissent les moyens de créer l’appareil de renseignement utilisé pour cibler des civils spécifiques à Gaza et au Liban. Nous ne pouvons pas les dissocier, étant donné l’utilisation stratégique duale des financements pour la recherche académique et la recherche militaire, »a-t-elle ajouté.
La technologie IA développée par l’armée israélienne, appelée Habsora, génère des cibles automatisées en temps réel et frappe fréquemment des infrastructures civiles et des zones résidentielles, avec un bilan de victimes civiles souvent connu à l’avance. La technologie Lavender analyse les données de près de 2,3 millions de personnes à Gaza en utilisant des critères ambigus pour évaluer la probabilité qu’un individu soit lié au groupe palestinien Hamas. Des sources ont confié aux médias basés à Tel Aviv, +972 et Local Call, qu’au début des attaques sur Gaza, l’armée était « entièrement dépendante » de Lavender, ciblant automatiquement les hommes identifiés par le système, sans supervision ni critères spécifiques. Grâce au système basé sur l’IA intitulé “Where is Daddy?” (Où est Papa?), Israël suit simultanément des milliers d’individus et leurs entrées dans leurs domiciles. Les maisons des personnes ciblées sont ensuite bombardées, sans tenir compte de la présence de civils, y compris des femmes et des enfants. Ces technologies basées sur l’IA sont connues pour commettre fréquemment des erreurs de calcul, ignorer le principe de « proportionnalité » et ont joué un rôle significatif dans la mort de plus de 45 850 Palestiniens depuis le 7 octobre 2023.