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Grandes manœuvres dans le Haut Karabakh : Erevan s’attaque à Moscou

Le président turc a rencontré lundi son homologue azerbaïdjanais dans l'enclave azerbaïdjanaise du Nakhitchevan, frontalière de la Turquie et nichée entre l'Iran et l’Arménie.
Grandes manœuvres dans le Haut Karabakh : Erevan s’attaque à Moscou

Officiellement, la rencontre entre Recep Tayyip Erdogan et Ilham Aliev devait lancer la construction d’un gazoduc de 85 km entre l’est de la Turquie et le Nakhitchevan. Mais il a surtout été question du Haut Karabakh, où l’armée azerbaïdjanaise a mené la semaine dernière une offensive militaire et poussé les séparatistes arméniens à accepter un cessez-le-feu. La Turquie, alliée de Bakou, s’en est réjouie et espère avancer ses pions.

Vu d’Ankara, soutien indéfectible de Bakou, la victoire contre les séparatistes arméniens est aussi une victoire pour la Turquie, d’autant plus appréciée qu’elle a été rapide. C’est sur ce point qu’a insisté R.T. Erdogan à l’issue de sa visite. Le président turc a qualifié cette victoire de « motif de fierté » pour son pays, tout en avançant qu’elle ouvrait de « nouvelles opportunités pour une normalisation » dans la région.

Le chef de l’État turc, qui a amorcé ces dernières années un rapprochement avec l’Arménie, a profité de cette visite dans l’enclave du Nakhitchevan pour appeler Erevan à saisir « la main pacifique qui lui est tendue ».

Alors qu’I. Aliev et le Premier ministre arménien Nikol Pachinian ont prévu de se rencontrer dans la ville de Grenade, en Espagne, le 5 octobre en présence de plusieurs dirigeants européens, R.T. Erdogan pousse à une résolution de la question du Haut-Karabakh qui inclurait la Turquie et la Russie, et exclurait les Occidentaux. Quant à I. Aliev, il a prétendu que les droits des Arméniens du Haut-Karabakh seraient « garantis ». Tous les habitants du Nagorny Karabakh, « quelle que soit leur ethnie, sont des citoyens de l’Azerbaïdjan », a déclaré I. Aliev.

Dans la soirée du lundi 25 septembre, l’explosion d’un dépôt de carburant a fait plus de 200 blessés poussant les autorités séparatistes du Haut-Karabakh à demander une assistance extérieure urgente pour faire face à cette catastrophe.« Le nombre de blessés après l’explosion d’un dépôt de carburant dépasse les 200. La majorité sont dans un état grave ou très grave », a déclaré Gegham Stepanyan, chargé des droits de l’Homme de la république autoproclamée, sur les réseaux sociaux. « Les possibilités médicales sont insuffisantes. Il faut que des avions médicalisés atterrissent au plus vite pour sauver des vies », a ajouté ce responsable de la région séparatiste à majorité arménienne en Azerbaïdjan, pays dont les forces armées viennent d’en reprendre le contrôle.

Moscou tance Erevan

Le même jour, depuis Moscou, le ministère russe des Affaires étrangères a vivement réagi aux propos du Premier ministre arménien qui, la veille, avait qualifié d’« inefficaces » les alliances de son pays, dans une allusion voilée aux relations de longue date d’Erevan avec Moscou. « On tente de se dégager de la responsabilité des échecs de la politique intérieure et étrangère, en rejetant la faute sur Moscou» a tancé la diplomatie russe, dans une déclaration fustigeant des «attaques inacceptables contre la Russie ». La veille, dans une allocution télévisée, N. Pachinian avait en partie rejeté sur les forces de maintien de la paix russe la responsabilité de la situation au Haut-Karabagh. Selon lui, si les Arméniens devaient « quitter leur patrie comme seul moyen de sauver leur vie et leur identité », la « responsabilité d’une telle évolution des événements incombera entièrement à l’Azerbaïdjan, qui a adopté une politique de nettoyage ethnique, et au contingent de maintien de la paix de la Fédération de Russie au Haut-Karabagh ».

Au-delà de l’offensive déclenchée le 19 septembre par Bakou contre le Haut-Karabagh, le Premier ministre arménien avait également évoqué « le blocage illégal » du corridor de Lachine, parmi les évènements qui à ses yeux « soulèvent de sérieuses questions quant aux objectifs et aux motivations du contingent de maintien de la paix de la Fédération de Russie dans le Haut-Karabagh ». Assurant que son pays « n’a jamais abandonné ses engagements envers ses alliés et ne les a jamais trahis », N. Pachinian avait également estimé que « l’analyse des événements montre que les systèmes de sécurité et les alliés sur lesquels nous nous sommes appuyés au fil des ans se sont donnés pour mission d’étaler notre vulnérabilité et de justifier l’impossibilité pour le peuple arménien de disposer d’un État indépendant ».

« Les dernières déclarations de Nikol Pachinian confirment nos conclusions précédentes indiquant que des processus, inspirés par l’Occident et incités par Erevan, et qui détruisent leur propre pays et nos relations bilatérales, ne sont pas épisodiques, mais systémiques », estime la diplomatie russe dans son communiqué. « Ces démarches destinées à lancer une nouvelle politique pro-occidentale de l’Arménie sont justifiées sans preuve par de soi-disant erreurs commises par la Fédération de Russie », insiste-t-on. « Nous sommes convaincus que les dirigeants d’Erevan commettent une grave erreur en essayant délibérément de détruire les liens multiformes et vieux de plusieurs siècles entre l’Arménie et la Russie et en faisant du pays l’otage des jeux géopolitiques de l’Occident », conclut le document. « Nous sommes catégoriquement contre les tentatives de faire porter une responsabilité sur la partie russe et les forces russes de maintien de la paix, qui font preuve d’héroïsme », avait déclaré plus tôt dans la journée, Dmitri Peskov, également en réaction au discours de N. Pachinian. « L’Arménie reste notre allié, un gouvernement proche, un peuple qui nous est proche », ajoutait le porte-parole du Kremlin, soulignant que « le dialogue » entre Moscou et Erevan se poursuivait à différents niveaux diplomatiques « en particulier en ces jours difficiles ». 

Membres de l’Organisation du traité de sécurité collective (OTSC), la Russie et l’Arménie sont liées depuis plusieurs décennies par un traité de défense commune. Le 20 septembre, moins de 24 heures après le lancement de l’offensive azerbaïdjanaise, la présidence de Stepanakert, capitale du Haut-Karabagh, avait annoncé qu’« un accord sur une cessation complète des hostilités » avait « été conclu avec la médiation du commandement des forces de paix russes ». Accusé de passivité face à l’Azerbaïdjan, N. Pachinian fait face depuis plusieurs jours à la colère de la rue dans son pays, les opposants lui reprochant d’avoir abandonné le Haut-Karabagh.

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