Mohamed Charfi, président de l’autorité électorale, a précisé à la presse, que A. Tebboune a recueilli 5,320 millions des voix exprimées, selon les résultats provisoires qui devraient être encore validés par le Conseil constitutionnel. Abdelaali Hassani, candidat du Mouvement de la société pour la paix (MSP-Islamiste), est arrivé en deuxième position (3,17%) suivi de Youcef Aouchiche, candidat du Front des forces socialistes (FFS parti d’opposition historique qui participe à une présidentielle pour la première fois depuis 1999), (2,16%). En privé, de nombreux d’Algériens qualifient de « guignols » les out siders de la présidentielle. Y. Aouchiche et A. Hassani Cherif ne se sont jamais opposés au climat d’oppression politique qui règne dans le pays. Ces deux candidats ont vaguement promis plus de libertés en cas de victoire.
Boudé par l’électorat chiffré à 24 millions, le scrutin a engendré une polémique autour des résultats, notamment le chiffre de la participation. Après avoir estimé la veille la participation à « un taux moyen de 48 % », la commission électorale n’a pas fourni dimanche de nouveau chiffre officiel « mais a déclaré que 5,6 millions d’électeurs ont voté sur un électorat d’environ 24 millions » remarque le Financial Times. Cela suggère un taux de participation d’environ 24 % – un revers pour A. Tebboune, qui, selon les analystes, espérait un mandat populaire fort pour son second mandat. » Mais l’enjeu principal de ce scrutin reste le taux de participation, la jeunesse et la population se sentant « désabusés ».
Dans une démarche inédite, les équipes de campagne des trois candidats dont celle d’Abdelmadjid Tebboune ont dénoncé dans un communiqué commun, peu avant minuit, « des irrégularités et contradictions dans les résultats annoncés par l’Anie », disant vouloir « informer l’opinion publique du flou et des contradictions des chiffres de participation. »
Pour le présidentréconforté dans son statut par un score des plus soviétiques sa légitimité est fonction du taux de participation. Or seuls 5 millions d’électeurs l’auront adoubé. Soutenu par le Front de libération nationale (FLN), ancien parti unique en perte de vitesse, et par le mouvement islamiste El Bina, le président de 78 ans ambitionne de poursuivre son projet d’« Algérie nouvelle » à travers le second mandat. L’hôte d’El Mouradiya n’a pas pipé mot du Hirak et de ses acteurs embastillés alors qu’il avait béni ce mouvement de protestation aux premières heures. Alors que les deux rivaux promettaient, eux, davantage de libertés s’ils sont élus. Le candidat du FFS s’est même engagé à « libérer les prisonniers d’opinion par le biais d’une amnistie et à réexaminer les lois injustes ». Celui du MSP prône, lui, « le respect des libertés réduites à néant ces dernières années » après l’extinction du Hirak.
Avec plus de 50% de la population âgée de moins de 30 ans, soit 23 millions de personnes, le chômage endémique qui touche près d’un jeune sur trois, pousse beaucoup d’entre eux à nourrir le rêve d’émigration clandestine. Désabusée par les processus électoraux, cette jeunesse, qui constituait la base des manifestations du Hirak réclamant un profond changement du système politique, a perdu foi en la capacité des urnes à apporter un quelconque changement. Le taux d’abstention qui avait atteint les 60 % lors de la précédente présidentielle devrait, selon les observateurs, être de la même ampleur cette année, si ce n’est pas plus. Une réponse du berger à la bergère face à l’immobilisme du système et à la répression, qui, selon les militants et les ONG de défense des droits humains, s’est intensifiée ces dernières semaines.
Selon Amnesty international, les autorités algériennes « continuent d’étouffer l’espace civique en maintenant leur répression sévère des droits humains. » Son dernier rapport dévoilé à la veille du scrutin, critique les autorités algériennes pour leur gestion des droits humains. Selon l’organisation, le gouvernement continue d’« étouffer l’espace civique » et de maintenir une « répression sévère des droits humains ». Le bilan du président Tebboune, en termes de libertés, est catastrophique. Il a été épinglé à plusieurs reprises par Amnesty International et d’autres ONG.
Le suffrage est apparenté par Le Matin d’Algérie à une mascarade. « Comme les réjouissances ne sont pas finies, demain, le taux de participation au niveau national franchira allègrement les 50 %. Voilà qui confortera l’oncle Tebboune qui s’estimait mal élu en décembre 2019. Ainsi, il pourra poursuivre, sans retenue, son œuvre d’immobilisme mortifère du pays », avait-il écrit. Ankylosé, le système peine à se renouveler sous l’œil vigilant de l’armée et des services. Trahi par ses états de santé sur lesquels l’omerta règne, A. Tebboune risque de ne pas durer. Le spectre d’Abdelaziz Bouteflika n’est pas si étranger à l’inconscient collectif des Algériens…