PBB News, suivi par 1.1 million de personnes sur Instagram, et générant jusqu’à 20 millions de visites hebdomadaires, a multiplié les partages de vidéos, pour alerter sur la situation à Gaza. Très vite, son compte a fait l’objet de signalements massifs conduisant à sa désactivation définitive par META. Le 9 octobre prochain, le tribunal judiciaire de Paris, rendra son verdict après avoir été saisi par le propriétaire du média indépendant qui conteste le bienfondé de cette décision unilatérale. Le fondateur de PBB News, dénonce « une censure » et pointe une volonté « de réduire au silence, les voix qui s’élèvent pour la Palestine ».
« Depuis la création de mon média, j’ai toujours défendu les causes qui me tenaient à cœur, avec des campagnes de dons, et d’appel à la mobilisation par exemple après les séismes qui ont frappé le Maroc et la Turquie en 2023. Je me suis toujours engagé pour les populations civiles et pour dénoncer les injustices, et je pensais qu’il était impossible que quelqu’un puisse m’empêcher de dénoncer des crimes », confie-t-il à Anadolu. Avant de poursuivre que « depuis le 7 octobre 2023, nous subissons un véritable black-out médiatique, auquel META contribue en réduisant au silence ceux qui dénoncent ces horreurs. Nous sommes déterminés à dénoncer cette situation et à exposer les dangers que cela représente pour notre démocratie. META entrave nos libertés. Après avoir pris le contrôle de l’espace numérique, une armée d’algorithmes est désormais prête à nous enchaîner dans ce qui est inacceptable: la dictature du silence ».
Le propriétaire de PBB News souligne par ailleurs que les méthodes du groupe META sont mises en lumière par de nombreuses organisations internationales qui pointent une censure « systémique et mondiale » des contenus en lien avec le sort des Palestiniens. C’est le cas notamment de HRW (Human Rights Watch), qui a publié, dès 2021, un rapport long de 51 pages, intitulé « Les promesses non tenues de META: censure systémique de contenus propalestiniens sur Instagram et Facebook ». L’ONG y « documente une tendance excessive à la suppression de discours protégés, y compris l’expression pacifique en faveur de la Palestine et le débat public sur les droits humains des Palestiniens ».
Dans une publication diffusée le 2 janvier 2024 sur son site internet, HRW indique avoir constaté « que le problème provient des politiques de META qui sont problématiques et de leur mise en œuvre incohérente et erronée, d’une dépendance excessive à l’égard d’outils automatisés de modération et d’une influence excessive des gouvernements sur les suppressions de contenus ». « Au lieu d’excuses déjà entendues et de promesses vides, META devrait démontrer sa volonté sérieuse de s’attaquer une fois pour toutes à la censure liée à la Palestine en prenant des mesures concrètes en faveur de la transparence et de la remédiation » plaide à cet effet, Deborah Brown, directrice adjointe de la division « technologies et droits humains » de HRW.
De fait, et face à la censure de son compte, le propriétaire du site qui a saisi la justice pour tenter d’obliger META à rétablir le compte de PBB News et de ses filiales, déplore la capacité, pour le groupe propriétaire d’Instagram et Facebook « de provoquer une amnésie générale » en « appuyant sur un bouton ».
De son côté, META refuse non seulement de rétablir le compte du média indépendant, mais accuse également son détenteur d’avoir violé les conditions d’utilisation d’Instagram en publiant certaines vidéos dans lesquelles le Hamas est présenté comme un mouvement de résistance. Dans son argumentaire présenté au tribunal, le géant US demande au tribunal judiciaire de Paris de se déclarer incompétent, et dans l’hypothèse où il déciderait de statuer, de rejeter la requête de PBB News.
Si le requérant est l’un des rares internautes à avoir assigné META en justice, de nombreux comptes et utilisateurs propalestiniens, font régulièrement l’objet de sanctions allant de la restriction temporaire à la suppression ferme et définitive du compte Instagram ou Facebook mis en cause. C’est le cas notamment du journaliste Palestinien Motaz Azaiza, dont les publications sont suivies par 17.7 millions de personnes, et qui fait régulièrement l’objet de restrictions suite à la diffusion de vidéos jugées en contradiction avec les règles d’utilisation d’Instagram.