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M. Abbas à Jénine : L’AP à la reconquête du peuple palestinien

Mahmoud Abbas, président de l’Autorité palestinienne, est arrivé mercredi à Jénine pour effectuer sa première visite depuis plus de dix ans dans cette ville du nord de la Cisjordanie, une semaine après la plus grande opération israélienne menée au sein de la localité depuis des années.
L’AP à la reconquête du peuple palestinien

Douze Palestiniens – qui, selon Israël, étaient des combattants – et un soldat israélien ont été tués lors de ce raid de quarante-huit heures qui a mobilisé des centaines de soldats, des drones et des bulldozers de l’armée israélienne à Jénine et dans le camp de réfugiés adjacent, un endroit où les affrontements entre les forces israéliennes et les factions palestiniennes sont réguliers.

Peu après cette opération militaire d’envergure, plusieurs hauts-responsables du Fatah, le parti d’Abbas – et notamment son vice-président Mahmoud Aloul – s’étaient rendus au camp où ils avaient été accueillis sous les huées des résidents furieux. M. Abbas, de son côté, est venu mercredi en hélicoptère. Il a déposé une gerbe « au cimetière des nouveaux martyrs », selon l’agence de presse officielle de l’AP, Wafa, qui a par ailleurs mis un point d’honneur à souligner que « neuf martyrs qui ont été tués lors de la récente agression israélienne » y avaient été inhumés.

Le camp de Jénine « est l’emblème de la lutte, de la constance et du défi », a commenté M. Abbas qui a promis que les travaux de reconstruction du camp commenceraient immédiatement. « Je le dis à tous, de près ou de loin : Notre État restera uni (…) et nous affronterons quiconque portera atteinte à son unité et à sa sécurité », a noté le président palestinien. « Nous devons nous débarrasser de l’occupation et nous lui disons : Laissez-nous tranquilles, nous sommes là et nous resterons où nous sommes », a-t-il continué en martelant que l’Etat palestinien a pour capitale Al-Qods, et non Abou Dis, comme proposé par l’ancienne administration US. « Nous travaillons à présent à une reconstruction immédiate, pour ramener le pays à ce qu’il était, voire mieux », a-t-il poursuivi avant de conclure sa visite.

Abbas était venu pour examiner « les progrès des travaux de reconstruction du camp et de la ville » à la suite du raid israélien, et rencontrer des responsables locaux, a déclaré à l’AFP un porte-parole de la présidence palestinienne. Après le raid, les infrastructures du camp ont été gravement endommagées: huit kilomètres de canalisations d’eau et trois kilomètres de canalisations d’égouts ont été détruits, selon les Nations unies. Plus de 100 maisons ont été endommagées et un certain nombre d’écoles ont également été légèrement endommagées.

Avant la venue de M. Abbas, des centaines de soldats appartenant à la garde présidentielle ont commencé à patrouiller dans les rues du camp et des snipers se sont installés sur les toits. Une vidéo partagée sur les réseaux sociaux palestiniens montre les forces de sécurité de l’AP semblant bloquer plusieurs véhicules militaires israéliens qui entrent dans Jénine. L’armée n’a encore pas réagi à cet incident présumé.

La visite de M. Abbas « est un message fort et important » qui signifie « qu’il se tient aux côtés du peuple palestinien dans sa résistance à l’occupation (Israël) », a affirmé à l’AFP Abu Rumaila, secrétaire général du Fatah dans le camp.

Le camp de réfugiés avait été fondé en 1953, quand la Cisjordanie avait été annexée par la Jordanie, pour accueillir certains des 760 000 Palestiniens qui avaient fui leurs habitations ou qui avaient été expulsé d’Israël lors des combats qui avaient entouré l’établissement de l’État juif, en 1948 – un événement que les Palestiniens appellent la « Nakba » ou « Catastrophe ». Israël s’était emparé de Jénine et du reste de la Cisjordanie pendant la guerre des Six jours, en 1967. L’AP avait ensuite implanté sa présence à Jénine et dans d’autres parties de la Cisjordanie dans le cadre des Accords d’Oslo, dans les années 1990. Avec le temps, les tentes ont été remplacées par des maisons et le lieu ressemble maintenant à un quartier de la ville de Jénine.

Le camp, qui accueille 18 000 personnes, avait aussi été une plaque tournante du terrorisme pendant la Seconde intifada, au début des années 2000 – une période devenue pour les Israéliens synonyme d’attentats-suicides et d’explosions de bus qui avaient entraîné la mort de plus d’un millier de civils et de soldats. Ce soulèvement avait aussi donné lieu à des affrontements intenses avec les troupes israéliennes, des combats qui avaient tué plus de 3000 Palestiniens.

Au cours des dix-huit derniers mois, la situation sécuritaire s’est détériorée dans le camp, avec l’Autorité palestinienne de Ramallah qui n’y a plus véritablement de présence réelle.

M. Abbas, qui est aujourd’hui âgé de 87 ans, s’était rendu à Jénine en 2012 mais il n’avait pas visité le camp à cette occasion. Alors que l’AP conserve une forme de présence dans la ville, elle a largement abandonné le camp au profit de groupes armés comme la brigade de Jénine qui, selon Israël, bénéficie du soutien de l’Iran.

M. Abbas s’était rendu au camp en 2004 alors qu’il se présentait à l’élection présidentielle qui avait suivi la mort du leader Yasser Arafat. Pendant ce déplacement, il avait étreint et embrassé Zakaria Zubeidi, un haut-responsable des Brigades des martyrs d’al-Aqsa lié au Fatah – cette accolade entre les deux hommes était restée célèbre dans la mesure où l’homme figurait, depuis des années, sur la liste des personnes les plus recherchées d’Israël avant sa capture. Z. Zubeidi était brièvement parvenu à s’échapper, en 2021, de prison.

La gouvernance d’Abbas est très critiquée par les Palestiniens en raison de la corruption endémique qui sévit au sein de l’AP et de l’absence de tout progrès vers l’indépendance. Seulement 17 % des Palestiniens sont satisfaits de la présence d’Abbas et 80 % des Palestiniens souhaitent qu’il présente sa démission, selon un sondage qui avait été réalisé au mois de juin.

Depuis l’accession au pouvoir du nouveau gouvernement, au mois de décembre, les membres ultra-nationalistes de la coalition du Premier ministre Benjamin Netanyahu ont appelé au démantèlement de l’Autorité palestinienne.

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