« Les inégalités dans la région arabe : l’insécurité alimentaire attise les disparités » est le nouveau rapport élaboré par la CESAO qui relève que le lourd fardeau de l’augmentation du service de la dette extérieure au Maroc, comme dans les autres pays de la région, limite l’espace disponible pour les investissements publics, y compris dans les secteurs sociaux. Le manque de financement adéquat des services sociaux de base a rendu difficile l’accès des pauvres et des groupes les plus vulnérables aux services publics, ce qui accentue les inégalités au sein du pays. Les dépenses publiques en matière de santé, d’éducation et de protection sociale restent inférieures aux normes internationales.
Le rapport met également en garde contre l’augmentation des dettes, qui pèse sur les générations futures et aggrave les inégalités dans les services publics et les opportunités économiques au fil du temps. Parmi les risques économiques que connaît le Maroc en tant que pays importateur de denrées alimentaires, le rapport souligne la dépréciation du dirham par rapport au dollar, dans un contexte de hausse mondiale des prix, ce qui réduit le pouvoir d’achat des individus, alourdit les budgets et menace de retards dans le remboursement des dettes.
L’étude confirme en outre l’existence d’inégalités de revenus et de richesse dans les pays arabes. Ceux situés en haut de l’échelle de distribution de la richesse ont bénéficié de la montée des tendances financières mondiales, tandis que ceux situés en bas de l’échelle ont supporté les plus lourds fardeaux des perturbations et de la hausse du coût de la vie, souvent contraints de puiser dans leurs économies. Le rapport avertit, en outre, que l’insécurité alimentaire s’accroît au Maroc en raison des inégalités de revenus, de l’inflation, de l’augmentation du chômage et de la pauvreté, indiquant que même si « les denrées alimentaires sont suffisantes au niveau national, certaines catégories de la population peuvent ne pas y avoir accès financièrement, limitant ainsi la capacité des ménages à absorber divers chocs négatifs sans ajuster leurs habitudes alimentaires ».
Les risques climatiques, autre aspect à ne pas négliger, augmentent les souffrances des ménages pauvres. Le nombre de ménages vulnérables au Maroc perdant leurs revenus à cause des risques climatiques est deux fois plus élevé que celui des ménages riches. Environ un million et demi de Marocains ont été touchés par des catastrophes naturelles entre 2020 et 2022. En outre, la répartition des terres agricoles est marquée par de grandes inégalités. Les groupes vulnérables, notamment les ménages dirigés par des femmes, sont moins susceptibles de posséder des terres agricoles, avec seulement 4,4 % des femmes marocaines étant propriétaires de terres.
Le rapport met en évidence que les chocs climatiques représentent une menace imminente pour les pays dépendant de l’agriculture pluviale, dont le Maroc, en raison de la hausse des températures, de la diminution des précipitations et de la rareté de l’eau. Les ménages à faible revenu sont plus exposés à ces risques, subissant des pertes de revenus à cause des risques climatiques et disposant de moins de moyens pour se rétablir, pouvant recourir à des mesures désespérées comme la vente d’actifs ou de terres, le retrait des enfants de l’école ou la réduction de leur consommation alimentaire. Les spécialistes prévoient que « les périodes de sécheresse au Maroc s’allongent avec des conséquences négatives ».
Le rapport note enfin que les récents chocs économiques causés par la pandémie du COVID-19 et la guerre en Ukraine ont entravé les progrès de la région arabe en matière de réduction de la pauvreté et des inégalités, menaçant la sécurité alimentaire de diverses manières. « Bien que plusieurs pays, dont le Maroc, aient tenté de maintenir leurs niveaux d’importation de pétrole et de denrées alimentaires, la hausse des prix de ces produits a conduit à une dévaluation de la monnaie locale et à l’épuisement des réserves de devises étrangères », y lit-on.