Le Sahel, précise H. Cherkaoui, est un espace où prolifère l’activité de différents réseaux criminels organisés spécialisés dans la traite des êtres humains, l’immigration illégale, la contrebande et le trafic d’armes et de drogues. «Le Maroc est préoccupé par la collusion entre le terrorisme et les réseaux criminels qui peuvent financer des organisations terroristes grâce à leurs profits», a-t-il prévenu.
Le patron du BCIJ a reconnu que l’idéologie de Daech continue de «séduire des adeptes au Maroc et les personnes fidèles à ce groupe nourrissent l’ambition d’aller dans les points chauds des conflits, particulièrement dans la région du Sahel». Face à ces menaces, les services de sécurité marocains agissent «efficacement dans le cadre de leur stratégie d’anticipation», en arrêtant ceux qui envisagent de rejoindre ces zones ou de mener des attaques au Maroc.
Le BCIJ a détecté ces dernières années des liens entre des djihadistes arrêtés au royaume et la zone du Sahel. Ainsi, la majorité des armes à feu saisies proviennent de cette région subsaharienne.
H. Cherkaoui a, par ailleurs, pointé du doigt la passivité des autorités algériennes à «collaborer avec les Marocains dans la lutte contre le terrorisme». Abdelhak Khiame, à la tête du BCIJ entre 2015 à 2020, avait déjà exprimé les mêmes critiques, et ce, bien avant la rupture des relations diplomatiques entre les deux pays, le 24 août 2021.
«Nous sommes préoccupés par la proximité de notre territoire avec les camps du Front Polisario à Tindouf (dans le sud-ouest algérien), car il est confirmé qu’il y a des jeunes qui y ont été recrutés par des imams locaux et envoyés dans les rangs de Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI)», précise l’actuel directeur du BCIJ. «Le Sahel est une grande préoccupation tant aux niveaux régional et international, et constitue une menace non seulement pour les pays africains mais aussi pour les pays arabes et européens » assure H. Cherkaoui.
En mettant l’accent sur la menace terroriste émanant du Sahel, le directeur du BCIJ s’inscrit sur la même ligne défendue par les autorités espagnoles. En effet, le gouvernement ibérique ne cache pas ses inquiétudes face à l’expansion des groupes terroristes dans la région. Madrid a d’ailleurs accueilli, le 4 avril, la 3e Assemblée générale de l’Alliance Sahel. Une réunion présidée par José Manuel Albares, ministre des Affaires étrangères, et qui a connu l’adhésion des Etats-Unis, le Canada et la Suède.
Courant ininterrompu
A rappeler que même en pleine crise des relations avec l’Espagne en 2021, le Maroc n’a pas suspendu sa coopération sécuritaire avec l’Espagne. La preuve, le ministre espagnol de l’Intérieur a joué un rôle déterminant dans la reprise des relations entre son pays et le Maroc, rapporte le média espagnol Politica. En pleine crise avec Rabat, suite à l’hospitalisation de Brahim Ghali à Logroño en avril 2021, Fernando Grande-Marlaska a réussi à garder le fil du dialogue avec son homologue marocain, Abdelouafi Laftite. «Ils se parlaient quotidiennement», confient des sources gouvernementales dans des déclarations au journal.
Ainsi, «la collaboration policière» entre les deux pays, expliquent les mêmes sources, «ne s’est jamais arrêtée ni diminuée». Même au pire moment de la crise avec Rabat, lors de l’exode de milliers de Marocains vers Sebta, F.G. Marlaska continuait à parler avec A. Laftite.
«Cette communication permanente avec le Maroc est fondamentale pour l’Espagne et pour l’Europe. Tout comme la collaboration avec la France dans la lutte contre l’ETA (organisation terroriste basque, ndlr) a été cruciale durant des années, nous dépendons désormais de notre voisin africain pour faire face au terrorisme djihadiste», explique ce média espagnol tout en précisant que F.G. Marlaska s’était opposé à l’accueil du chef du Polisario en Espagne, en avril 2021.
Pour rappel, le ministre espagnol de l’Intérieur avait assuré, en octobre à l’occasion d’une réunion avec ses homologues européens, que le Maroc n’utilise pas la migration pour faire pression sur l’Union européenne.