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Israël s’entre-déchire : Les Palestiniens lâchés par tous

Pour la neuvième semaine consécutive, de nouvelles manifestations ont secoué samedi Israël contre la réforme de la justice. La plus importante a eu lieu à Tel Aviv. L’establishment israélien s’inquiète de la généralisation de la colère aux soldats de réserve. En Europe, les réactions de dénonciation d’Israël, notamment après l’expédition criminelle de Huwara, renvoient bourreau et victime dos-à-dos. Le monde arabe sur lequel a soufflé le vent de la normalisation garde le silence.
Israël s’entre-déchire

« Démocratie, démocratie ! » ont scandé les manifestants rassemblés à Tel Aviv, Jérusalem et dans plus de 90 endroits à travers la Palestine occupée. En tout, ils étaient 250 000 israéliens à descendre dans la rue, rapportent les médias. L’objet de leur colère reste le même : une loi que tente de faire passer la coalition de droite et d’extrême droite au pouvoir, qui donnerait notamment au gouvernement une plus grande influence sur la sélection des juges et limiterait les prérogatives de la Cour suprême. L’annonce du texte, début janvier, a provoqué des manifestations massives.

Avec ce projet de loi, le gouvernement souhaite revoir les pouvoirs de la Cour suprême via une clause « dérogatoire » qui permettrait au Parlement, avec un vote à la majorité simple, d’annuler une décision de la Cour suprême. La réforme propose aussi de retirer les avocats du panel qui est chargé de nommer les juges de la Cour suprême. Aujourd’hui, il est composé par un groupe de juges, de députés et d’avocats du barreau, sous supervision du ministre de la Justice. Le gouvernement souhaite également empêcher les juges d’invoquer le caractère « raisonnable » de certaines décisions politiques. Une volonté motivée par la décision du 18 janvier de la Cour d’invalider la nomination d’Arié Dery comme ministre de l’Intérieur et de la Santé à cause d’une condamnation pour fraude fiscale. La Cour suprême avait jugé cette nomination non « raisonnable », poussant ainsi le Premier ministre à démettre le ministre de ses fonctions. Et enfin, le gouvernement souhaite réduire l’influence des conseillers juridiques dans les ministères car leurs recommandations sont utilisées par les juges de la Cour suprême lorsqu’ils statuent sur la bonne conduite du gouvernement. Le ministre de la Justice souhaite donc qu’elles soient clairement considérées comme des avis non contraignants.

Les manifestations, qui dénoncent de façon générale la politique du gouvernement, ne semblent pas pour l’heure infléchir la détermination de Benyamin Netanyahu et sa majorité. L’opposition, dont son chef centriste Yaïr Lapid, a accusé à plusieurs reprises le Premier ministre de vouloir servir ses intérêts personnels avec cette réforme. B. Netanyahu étant lui-même jugé pour corruption dans plusieurs affaires, ses contempteurs estiment qu’en cas d’adoption de la réforme, il pourrait s’en servir pour casser un éventuel jugement venant à le condamner. Les opposants à la réforme ont annoncé que jeudi prochain sera une journée de résistance à la dictature.

Une partie de l’opposition israélienne s’érige contre la politique de colonisation galopante et dénonce les dérives « génocidaires » de l’establishment comme cela s’est déroulé au niveau de la localité de Huwara, en Cisjordanie occupée. En effet, c’est sous la supervision de l’armée sioniste que les colons ont procédé au saccage de la localité en y opérant une chasse aux Palestiniens.

En Europe, fidèles à leur politique contradictoire qui place sur le même pied d’égalité le bourreau et la victime, six pays ont condamné aussi bien les attaques des colons contre les Palestiniens de la Cisjordanie occupée et la poursuite de la colonisation que les opérations de résistance menées par ces derniers qui s’insurgent contre la colonisation, les taxant de « terrorisme ».

« Nous condamnons fermement les récents attentats terroristes qui ont provoqué la mort de citoyens israéliens. Le terrorisme ne saurait en aucun cas être justifié », ont écrit les porte-parole des ministères des affaires étrangères de la France, l’Allemagne, l’Italie, la Pologne, le Royaume-Uni et l’Espagne, après avoir exprimé samedi leur « vive préoccupation » face à la poursuite et l’intensification des violences dans les territoires palestiniens occupés « Nous condamnons également fermement les violences aveugles des colons israéliens contre les civils palestiniens, y compris la destruction de leurs maisons et de leurs biens », ont-ils ajouté dans un communiqué conjoint, rapportée par l’agence Reuters.

Même approche biaisée quant à la poursuite de la colonisation en Cisjordanie. Le texte exprime une « vive opposition à toutes les mesures unilatérales qui compromettent la solution des deux États, y compris en matière de progression de la colonisation », tout en demandant à l’exécutif israélien de « revenir sur sa décision récente d’approuver la construction de plus de 7.000 unités de logement dans l’ensemble de la Cisjordanie occupée et à légaliser des colonies sauvages ». Les autres colonies édifiées auparavant ne sont nullement évoquées.

Selon les observateurs palestiniens, l’année 2022 a été l’une des pires années depuis 1967 en raison de l’escalade des colonies et des attaques. Faisant craindre plus que jamais que les colons ne deviennent un outil entre les mains du gouvernement israélien pour mettre en œuvre les décisions d’annexion des Territoires palestiniens.

Selon les données de la Commission de résistance au mur et à la colonisation de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), le nombre de colons dans les colonies de Cisjordanie, y compris al-Qods, s’élevait à 726 mille 427 colons répartis sur 176 colonies et 186 avant-postes (sans autorisation), dont 86 avant-postes pastoraux agricoles jusqu’au début de 2023. Sur ces avant-postes, 12 ont été établis en 2022, et 2 ont été légalisés : le premier à Mitsibeh Dani sur le territoire de la ville de Deir Dabwan, et le second à Mitsibeh karamim sur le territoire de Deir Jarir à l’est de Ramallah. Le gouvernement israélien a l’intention aussi d’en légaliser 65 autres en 2023, et de les connecter à l’eau, à l’électricité et aux infrastructures cellulaires et de les renforcer avec des « mesures de sécurité » selon un accord signé par le Likoud et Pouvoir juif, de la coalition gouvernementale actuelle. Les données indiquent que les autorités de l’occupation israélienne ont également approuvé 83 plans structurels détaillés en Cisjordanie et à Jérusalem, qui prévoient la construction de plus de 8 288 nouveaux logements.

Toujours selon la Commission de l’OLP, en 2022, les colons ont mené 1.187 attaques, certaines avec la participation de l’armée israélienne qui mènent des incursions dans les villes et chez les rassemblements résidentiels palestiniens, et d’autres par des attaques directes contre les citoyens et leurs biens. La province de Naplouse (nord) a connu la plus grande part de ces attaques avec 417 attaques, suivi des provinces de Ramallah et d’Al-Bireh avec 203 attaques, puis du gouvernorat d’al-Khalil (Hébron) avec 172 attaques. De plus, les colons israéliens ont lancé 354 attaques contre des oliveraies, déracinant, endommageant, vandalisant et empoisonnant un total de 10.291 arbres.

Abandonnés à leur destin, les Palestiniens n’ont pas manqué de réagir. Selon les chiffres rendus publics par l’agence palestinienne Pal Today, il y a eu 14 mille actes de résistance pendant 2022. Dont 770 tirs de feu. Les autres à la voiture-bélier et au couteau.  31 Israéliens ont péri dans ces attaques. Côté palestinien, 221 martyrs ont été recensés dont 167 en Cisjordanie occupée et 4 dans les territoires occupés en 1948.

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