Jeudi, un avion de la compagnie Mahan Air s’est vu interdire de mener à terme son vol Téhéran-Beyrouth, il transportait des pèlerins libanais qui revenaient d’une visite aux lieux saints à Machhad. Des images leur ont été diffusées sur les réseaux sociaux lorsqu’ils étaient bloqués à l’aéroport de l’imam Khomeiny. Ils ont été plus tard emmenés vers des hôtels, ont rapporté les médias iraniens.
Au Liban, des rassemblements avaient éclaté jeudi soir pour riposter contre cette interdiction et plusieurs artères de la capitale libanaise ont été bloquées dont celle de l’aéroport de Beyrouth.
Ibrahim Moussawi, député du bloc du Hezbollah Fidélité à la résistance a déclaré dans un communiqué que « la crise des Libanais bloqués à Téhéran est due à la menace israélienne de viser l’avion iranien à bord duquel ils devaient rentrer au Liban ».
« La persistance de l’ennemi israélien à violer la souveraineté libanaise et la collusion dont il jouit de la part de la communauté internationale, en particulier des États-Unis, l’incitent à diversifier ses violations », a-t-il poursuivi. « C’est une affaire qui doit être condamnée et dénoncée par tous au Liban. Tous doivent élever la voix et demander des comptes aux organismes et institutions internationales compétentes afin qu’ils puissent s’acquitter de leur devoir de mettre fin aux menaces d’attaques sionistes contre l’aéroport international Rafic Hariri. » La veille, Avichay Adraee, porte-parole de l’armée d’occupation avait tweeté sur X que « l’aéroport international de Beyrouth est utilisé pour financer le Hezbollah via des avions iraniens ».
I.Moussawi a insisté que « le gouvernement libanais devrait assumer ses responsabilités pour garantir la souveraineté du Liban sur tous ses services publics à leur tête l’aéroport ».
Jamil Sayed, député de la Bekaa, a écrit sur X que « la décision de la Direction générale de l’aviation civile d’interdire l’avion est intervenue après les avertissements émis par le porte-parole militaire israélien, Avichay Adraee, au sujet des allégations selon lesquelles des fonds iraniens seraient transférés au Hezbollah par voie aérienne ».
Le journaliste Hassan Olleq qui a assisté aux manifestations qui ont éclaté dans la soirée a accusé « le Président libanais Joseph Aoun et le Premier ministre Nawaf Salam de vouloir soumettre le Liban au diktat américano-israélien ».
Des sources informées ont révélé au micro de la chaine libanaise al-Manar que les Israéliens ont envoyé jeudi 13 février un avertissement menaçant de bombarder l’aéroport international de Beyrouth s’il autorise l’atterrissage de l’avion Mahan sous prétexte qu’il transporte des fonds pour le Hezbollah. C’est alors que le ministère libanais des Travaux et du Transport a demandé à la direction de l’aéroport d’informer la compagnie aérienne iranienne qu’il ne pourra accueillir les deux vols àBeyrouth, prévus jeudi et vendredi et de les reporter à la semaine prochaine sans en préciser les causes.
Nabih Berri, chef du Parlement, et le Hezbollah ont alors effectué des contacts avec le gouvernement pour assurer le retour des voyageurs libanais via la compagnie libanaise MEA au frais de l’Etat libanais. L’appareil aurait dû décoller dans la matinée de vendredi. Mais la diplomatie iranienne a qualifié les menaces israéliennes contre les avions civils iraniens « de violations flagrantes des principes et des règlements du droit international et de la souveraineté libanaise ». Il a demandé à l’Organisation de l’aviation civile internationale OACI des Nations Unies « de faire cesser les comportements israéliens qui menacent la sécurité de l’aviation civile ».
Pour sa part, l’ambassadeur iranien au Liban a indiqué que le gouvernement libanais a proposé pour régler cette affaire de remplacer l’avion iranien par un autre appareil libanais de la MEA. « Nous sommes ravis que les avions libanais reprennent leurs vols vers l’Iran mais pas aux dépens des vols iraniens », a souligné Moujtaba Amani.
Dans un communiqué, le ministère libanais des Travaux publics et du Transport a souligné qu’il « n’hésitera pas à prendre des solutions appropriées pour assurer le retour de la ligne aérienne entre le Liban et l’Iran à l’exploitation conformément aux normes internationales approuvées, et d’une manière qui réalise l’intérêt national général et les objectifs souhaités ».
Dans la nuit de vendredi à samedi, les rassemblements se sont renouvelés sur l’artère menant à l’aéroport international de Beyrouth pour protester contre cette décision qui intervient après une menace israélienne contre l’aéroport de Beyrouth. Mais des hommes encagoulés indisciplinés se sont infiltrés parmi les manifestants et ont attaqué une patrouille de la Force intérimaire des Nations unies au Liban (FINUL), mettant le feu à l’un de ses véhicules. Ils ont aussi incendié des panneaux publicitaires et des biens privés.
Selon le correspondant d’al-Manar, ces actions qui n’ont pas eu lieu le premier jour des protestations sont suspects faisant craindre une infiltration d’éléments douteux qui viseraient à sataniser le mouvement de protestation. Des manifestants ont déclaré qu’ils refusent ces actes, rapporte le correspondant de la télé libanaise.
Le mouvement Amal a condamné l’agression contre la Finul et demandé à l’armée libanaise et aux forces de sécurité d’arrêter les auteurs. « L’agression contre la Finul est une agression contre le sud du Liban », a dénoncé le communiqué du mouvement Amal.
Des sources proches du Hezbollah ont appelé à ne pas se laisser entraîner dans ce mouvement suspect.
La FINUL a condamné l’attaque contre ses véhicules la qualifiant « de violation flagrante du droit international et pouvant constituer un crime de guerre ». Selon le communiqué, « le convoi a été attaqué alors qu’il se dirigeait vers l’aéroport de Beyrouth, et l’un des véhicules du convoi a été incendié ». « Pendant l’attaque, a été blessé le commandant adjoint sortant de la FINUL, qui rentrait chez lui après avoir terminé sa mission ». La Force a appelé « les autorités libanaises à mener une enquête complète et immédiate et à traduire tous les auteurs en justice ».
Le commandement de l’armée libanaise a mis en garde, vendredi soir, contre des pratiques qui « pourraient créer des tensions internes aux conséquences désastreuses », qualifiant cette période de « phase délicate que traverse le pays ».
Il a indiqué dans un communiqué que « plusieurs zones, notamment les environs de l’aéroport international Rafic Hariri, sont le théâtre de manifestations qui comprennent des attaques et des émeutes, notamment des attaques contre le personnel de l’armée, des attaques contre des véhicules appartenant à la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL) et des tentatives de fermeture de la route de l’aéroport ».
L’armée a annoncé que « ses unités continuent à effectuer des missions de maintien de la sécurité », soulignant que « ces unités travailleront avec toute la détermination nécessaire pour empêcher toute violation de la paix civile et pour arrêter ceux qui perturbent la sécurité ».
De son côté, Nawaf Salam, Premier ministre libanais, a contacté la Coordonnatrice spéciale des Nations Unies au Liban, Jeanine Hennis-Plasschaert, et le chef de la mission FINUL et son commandant en chef, le général Aroldo Lazaro. Il a condamné dans les termes les plus forts « l’attaque criminelle contre les véhicules et le personnel de la FINUL » , exprimant « l’appréciation du Liban pour le rôle joué par les forces internationales dans le sud ». Il a ajouté avoir demandé au ministre de l’Intérieur, Ahmed El-Haggar, de « prendre des mesures urgentes pour identifier les assaillants, œuvrer à leur arrestation et les déférer à la justice compétente pour prendre les mesures nécessaires ».