Les prémisses du nouveau gouvernement russe ont été annoncées dans la soirée de dimanche. Sergueï Choïgou devrait quitter le ministère russe de la Défense, Vladimir Poutine ayant proposé ce portefeuille à Andreï Biélooussov, vice-Premier ministre par intérim, a indiqué le Conseil de la Fédération de Russie, la Chambre haute du parlement russe. S. Choïgou a été nommé, selon le Kremlin, Secrétaire du Conseil de sécurité russe par décret présidentiel.
Les sénateurs devraient engager des consultations sur les candidats proposés par le président lors des séances des commissions du 13 mai et lors d’une réunion du Conseil de la Fédération le 14 mai, a précisé l’institution parlementaire. Ses nominations incluent Vladimir Kolokoltsev au poste de ministre de l’Intérieur (en poste depuis 2012), Alexandre Kourenkov au poste de ministre des Situations d’urgence (qu’il occupe depuis 2022), Sergueï Lavrov au poste de ministre des Affaires étrangères (en poste depuis 2004) et Konstantin Tchouïtchenko au poste de ministre de la Justice. Denis Mantourov, qui a été vice-Premier ministre et chef du ministère de l’Industrie et du Commerce lors du dernier mandat de Poutine, a été nommé au poste de premier vice-Premier ministre. Sergueï Narychkine a été confirmé à la tête des renseignements extérieurs et Alexandre Bortnikov à celle des services de sécurité fédéraux. Ils occupent ces fonctions, respectivement, depuis 2016 et 2008.
Les députés russes ont confirmé, le 10 mai dernier, à une large majorité, la reconduction de Mikhaïl Michoustine comme Premier ministre, signée dans la foulée par décret du président. Ce remaniement intervient dans le sillage de l’investiture de V. Poutine à la tête de la Fédération de Russie qui, en guerre contre l’Occident otanique en Ukraine, cumule les succès militaires. C’est désormais A.Belousov, économiste de formation, qui va se charger du département stratégique de la Défense.
« Le budget du ministère de la Défense et du bloc de sécurité était encore récemment autour de 3 %, puis il est passé à 3,4 % et plus récemment à 6,7 %. Mais nous nous rapprochons progressivement de la situation du milieu des années 1980, lorsque cette part des dépenses consacrées au budget militaire dans l’économie était de 7,4 %. Ceci n’est pas critique, mais extrêmement important », a justifié un porte-parole du Kremlin, cité par Gazeta.ru. Un tiers du budget du pays serait lié à l’effort de guerre aujourd’hui. « Il est nécessaire de remettre en ordre la situation financière du ministère. Désormais, la stratégie militaire des autorités russes consiste à minimiser les pertes. Et, pour cela, il faut accorder une attention maximale à la logistique », explique Evgueni Mintchenko, consultant politique, dans Kommersant.
A signaler que le même jour, un immeuble résidentiel s’est partiellement effondré à Belgorod. La Défense russe a indiqué qu’un fragment de missile ukrainien était tombé. 12 morts et 31 blessés ont été dénombrés. Le ministère russe de la Défense a ensuite précisé qu’une attaque de douze missiles Totchka, Vampire et Vilkha avait été contrée par la défense anti-aérienne. L’un des fragments est tombé sur l’immeuble résidentiel.
Maria Zakharova, porte-parole de la diplomatie russe, a dénoncé sur Telegram « un nouveau maillon sanglant dans la chaîne de crimes du régime de Kiev », estimant que les « frappes délibérées sur des infrastructures civiles, des immeubles résidentiels, des hôpitaux, des écoles étaient devenues une marque de fabrique du groupe criminel de Zelensky » soutenu par l’Occident. La mission russe à l’OSCE a aussi dénoncé l’utilisation d’armes fournies par l’Occident. Frontalière de l’Ukraine, la région russe de Belgorod est régulièrement visée par des tirs de l’artillerie et des drones ukrainiens. Le 7 mai, un attaque ukrainienne a tué sept civils et en a blessé 35 autres. Belgorod avait surtout été endeuillée à la veille du dernier Nouvel An par une frappe ukrainienne ayant fait 25 morts et une centaine de blessés, le bombardement le plus meurtrier sur le sol russe depuis le début du conflit.
Le chef de la diplomatie a remis une couche lundi en signalant devant le Conseil de la Fédération qui étudie actuellement sa reconduction au poste de ministre des Affaires étrangères sur proposition du président V. Poutine que « si l’Occident veut se battre, comme ils disent, « sur le champ de bataille », je vous en prie…». Les sénateurs l’ont interrogé sur l’organisation les 15 et 16 mai prochains d’une conférence en Suisse sur la question ukrainienne, à laquelle la Russie n’a pas été conviée. Les méthodes diplomatiques occidentales « reviennent à formuler un ultimatum à la Russie », a dénoncé S. Lavrov, regrettant d’avance que les discussions en Suisse tourneraient autour de la « formule Zelensky ».
Présentée par Kiev à l’été 2023, cette dernière comporte notamment la réaffirmation des frontières de l’Ukraine datant de 1991, le retrait total des troupes russes, l’instauration d’un tribunal pénal international pour juger des «crimes de guerre russes», incluant des réparations, et la déclaration de la fin de la guerre. Des exigences inconcevables selon Moscou, celles-ci étant synonyme de capitulation totale. Il est nécessaire de tenir compte des « nouvelles réalités » et des exigences sécuritaires de la Russie, a maintes fois répété Moscou, qui continue de se déclarer ouvert aux négociations d’égal à égal. « S’ils veulent [aller] sur le champ de bataille, alors ce sera sur le champ de bataille », a conclu S. Lavrov. Avant de sous-entendre qu’une telle confrontation ne pencherait pas en faveur des Occidentaux : « Regardez comme ils se « lamentent » désormais sur le développement durable et généralisé de nos forces armées». Ces propos interviennent alors que les troupes ukrainiennes sont à la peine sur le front, subissant la pression des forces russes, et alors que les alliés occidentaux de Kiev multiplient les déclarations aux accents bellicistes.