Bien que les mariages d’enfants aient régulièrement diminué au cours de la dernière décennie, une multitude de crises, notamment les conflits, les chocs climatiques et les retombées de la COVID-19, menacent d’anéantir les progrès accomplis de haute lutte, selon une nouvelle analyse publiée par l’UNICEF.
Ainsi, l’organisme onusien souligne dans son rapport sur « La situation des enfants dans le monde », publié mercredi, que bien que la proportion de jeunes femmes mariées durant l’enfance ait baissé dans le monde, passant de 21 % à 19 % depuis les dernières estimations publiées il y a 5 ans, le monde devrait progresser 20 fois plus vite pour réaliser l’objectif de développement durable d’éliminer les mariages d’enfants d’ici à 2030.
Au rythme actuel, l’UNICEF révèle que l’Afrique subsaharienne, qui constitue actuellement la deuxième région enregistrant la part la plus importante d’épouses enfants (20 %), n’éliminera cette pratique que dans 200 ans. La croissance démographique rapide, conjuguée aux crises qui affectent la région, devrait faire augmenter le nombre d’enfants mariées alors que ce chiffre devrait baisser dans le reste du monde. « Le monde est submergé par un enchevêtrement de crises qui anéantissent les espoirs et les rêves des enfants vulnérables, en particulier des filles, qui devraient étudier au lieu de se marier », a déploré Catherine Russell, Directrice générale de l’UNICEF. « Les crises sanitaires et économiques, l’escalade des conflits armés et les effets dévastateurs des changements climatiques poussent les familles à chercher un faux sentiment de sécurité en recourant au mariage d’enfants. Nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour garantir que les filles jouissent de leur droit à l’éducation et à l’autonomie », a-t-elle souligné.
Concernant le Maroc, le rapport précise que 64 % des adolescentes marocaines mariées ont été victimes de violences et de coups. D’autre part, le même rapport a examiné divers aspects liés à la santé générale des enfants. Il est souligné dans ce sens que le taux d’infection par le VIH pour 1 000 Marocains non infectés était de 0,03 chez les enfants jusqu’à l’âge de 14 ans.
Le rapport a estimé que 690 enfants marocains âgés de 0 à 14 ans ont été infectés par le VIH, et 540 enfants âgés de 10 à 19 ans. Le nombre annuel de décès d’enfants marocains de moins de cinq ans au cours de l’année 2021 a été estimé à 12.000 décès, c’est-à-dire que sur 100.000 enfants de moins de cinq ans, une moyenne de 18 décès est enregistrée. Il souligne aussi que le taux de mortalité infantile est passé de 64 en 1990 à 15 en 2021, tandis que les décès chez les enfants entre 5 et 14 ans sont passés de 9 décès en 1970 à 2 en 2021. L’UNICEF a également estimé le taux de fécondité au Maroc à 2,3 % et le taux de vaccination contre les maladies évitables par la vaccination à 99 %.
En somme, l’UNICEF estime dans son rapport que les filles vivant dans des contextes fragiles sont deux fois plus susceptibles d’être mariées durant l’enfance que les autres filles, notant que le décuplement des décès liés aux conflits est ainsi associé à une augmentation des mariages d’enfants de 7 %.
Parallèlement, les phénomènes météorologiques extrêmes induits par les changements climatiques augmentent aussi les risques pour les filles, chaque écart de 10 % au niveau des précipitations étant associé à une hausse de près de 1 % de la prévalence des mariages d’enfants, souligne le rapport.
Les progrès enregistrés pour éliminer cette pratique au cours de la dernière décennie sont également menacés, voire annulés, par les effets permanents de la COVID-19, d’après l’analyse. Selon les estimations, le nombre de mariages d’enfants évités depuis 2020 a déjà baissé de 25 % en raison de la pandémie. « Nous avons prouvé qu’il était possible de progresser pour mettre fin aux mariages d’enfants. Pour cela, il faut apporter un soutien indéfectible aux filles et aux familles vulnérables », ajoute C. Russell. « Nous devons nous assurer que les filles restent à l’école et disposent de possibilités économiques », a-t-elle conclu.