Les chefs de la diplomatie des deux pays ont affirmé avoir discuté des questions bilatérales et internationales et du renforcement de la coopération, ainsi que de la récente visite du président Ibrahim Raïssi à Damas. Ils ont également discuté des défis et des politiques agressives des USA et de l’Occident contre leurs pays, en particulier de la politique d’exploitation du terrorisme et de la question palestinienne.
H.A. Abdollahian a déclaré que les discussions avec F.al-Moqdad sont importantes pour « le renforcement des relations entre les deux pays », notant que la précédente réunion des deux présidents à Damas et les accords signés entre les deux pays témoignent de « la forte volonté et détermination de Téhéran et de Damas pour le développement global des relations entre les deux pays ». Le ministre iranien a souligné la nécessité de donner suite aux accords conclus lors de la récente visite de la délégation syrienne de haut niveau à Téhéran et des différentes réunions qui ont eu lieu. De plus, il a affirmé le soutien continu de son pays à la Syrie et a souligné que « les frontières de l’Irak avec ses voisins, en particulier la Syrie, sont les frontières de l’amitié, et nous conseillons aux soldats américains de retourner dans leur pays ».
Il a également estimé que « l’existence des relations amicales entre Ankara et Damas sont dans l’intérêt de la région ». Il a dans ce contexte expliqué que « les États-Unis, afin de renforcer le blocus, tentent de couper les routes entre nos pays et les voies de transit qui nous relient, et ils l’ont déjà fait. » Pour l’émissaire iranien, « il est de l’intérêt de Téhéran de développer la coopération économique entre les pays de la région et de bénéficier des routes de transit ». Et de rappeler que « lors de la dernière réunion regroupant l’Iran, la Turquie, la Syrie et la Russie, nous avons présenté des idées importantes pour respecter l’intégrité territoriale de la Syrie ». Au sujet de l’agression israélienne contre l’aéroport d’Alep, il a insisté sur le fait qu’« aucune agression israélienne ne restera sans riposte ».
Cette visite intervient à l’heure où un vent de contestation souffle sur Soueida. Les manifestants ont interdit l’accès aux permanences du parti Baas, au pouvoir en Syrie. Si le mouvement de contestation est soutenu par d’importantes figures religieuses druzes, ces dernières appellent cependant à préserver son caractère pacifique. Aucun incident grave n’a d’ailleurs été enregistré. Historiquement, la communauté druze n’a ni pris les armes contre le régime ni aux côtés de l’opposition, à quelques exceptions près. En tout cas, Cheikh Youssef Jarbou, dignitaire religieux de la communauté druze du gouvernorat de Soueida au sud de la Syrie a souligné l’attachement de cette communauté à l’Etat syrien. « Nous faisons partie intégrante de la Syrie et nous n’accepterons jamais la séparation. Le peuple de Soueida ne peut qu’adhérer à la décision nationale. C’est un choix stratégique », a souligné cheikh Jarbou lors d’une rencontre entre un certain nombre de dignitaires et Safwan Abou Saadi, gouverneur de la province de Damas.
Evoquant les récentes manifestations qui ont eu lieu dans cette province ou des slogans hostiles à l’Etat syrien ont été scandés, le religieux druze syrien a ajouté que « nos décisions ne se démarqueront pas de celles de notre Etat qui représente le peuple syrien. La bannière d’al-Tawhid représente la communauté druze et nous en sommes fiers. Pas besoin de la politiser », a-t-il ajouté en allusion aux drapeaux brandies durant les manifestations.
« L’Etat syrien, l’armée et le commandement sont les constantes de notre communauté », a ajouté le cheikh en demandant aux habitants de Soweïda « d’adopter une orientation totale en faveur de la ligne nationale ».
Les manifestations qui ont éclaté dans cette province avaient initialement protesté contre la cherté de la vie provoquée par la hausse des prix des hydrocarbures causée par la suppression partielle des subventions. Mais des slogans hostiles au pouvoir ont été scandés. Des officiers à la retraite originaire de cette province ont proposé dans un communiqué la formation « d’un conseil d’administration temporaire » pour gérer ses affaires et d’ouvrir le passage frontalier avec la Jordanie. Mais la présidence spirituelle de la communauté druze du gouvernorat a déclaré que « cette déclaration est une opinion personnelle qui représente ses auteurs et non pas la position du leadership spirituel ».
Bisbilles entre Arabes et Kurdes
A l’Est de la Syrie contrôlé par les milices kurdes des Forces démocratiques syriennes, des combats meurtriers entre ces dernières et les membres du Conseil militaire de Deir Ezzor, groupe armé tribal arabe qui fait partie des FDS, depuis dimanche dernier. Ce jour-là, les FDS ont arrêté dans la ville de Hassaké Ahmad al-Khabil, alias Abou Khawla, dirigeant de ce Conseil militaire. Il en a découlé des tensions qui ont dégénéré en affrontements armés au cours desquels 22 personnes sont mortes, dont 3 civils, 16 membres des tribus et 3 miliciens kurdes, selon un récent bilan établi mercredi.
Les tribunes de coordination des groupes armés ont indiqué qu’Abou Khawla était un corrompu car il était impliqué dans des opérations de contrebande qui lui ont permis de faire fortune. Selon elles, les évènements qui ont suivi sont « un règlement de compte du fait que les dirigeants corrompus se sont sentis menacés depuis l’arrestation d’Abou Khawla. Ils ont alors attisé les tensions tribales et arabes pour se défendre ».
Les FDS se sont contentées d’indiquer dans un communiqué avoir lancé lundi « une opération pour renforcer la sécurité » dans la province de Deir ez-Zor contre Daech et « des criminels (…) impliqués dans le trafic de drogue et la contrebande d’armes ». Une source au sein des FDS ayant requis l’anonymat a précisé que la zone où les affrontements ont eu lieu longe « une route de contrebande bien connue ».
Mais selon le quotidien libanais al-Akhbar, les FDS ont toujours voulu se débarrasser du chef du Conseil militaire de Deir Ezzor, en raison de son influence grandissante dans la région. Surtout depuis qu’il projetait de devenir l’émir du clan al-Zoubeid et de s’imposer comme un partenaire clé dans les décisions à l’Est de l’Euphrate. Il œuvrait pour renforcer l’emprise des tribus arabes face au milices kurdes qui contrôlent cette région, avec l’assistance des Etats-Unis qui disposent d’une douzaine de bases militaires.
L’an dernier, Abou Khawla avait fait l’objet de deux tentatives d’assassinat à Hassaké. Ce qui l’a poussé à renforcer son dispositif sécuritaire en augmentant les effectifs du Conseil militaire de Deir Ezzor, recrutant plus de mille éléments. Et ce sans coordination préalable avec les Kurdes. Il accueillait régulièrement les chefs de clans et de tribus dans le village al-Rabidha au nord de Deir Ezzor pour obtenir leur soutien et réclamait de mettre fin à l’emprise des kurdes et de laisser les tribus la contrôler militairement et administrativement.
Pour ces raisons, assurent les sources d’al-Akhbar, les FDS ont voulu en finir avec Abou Khawla. Elles ont tenté de persuader les Américains de renoncer à lui, profitant de plusieurs évènements, dont les manifestations de protestation contre la profanation du Noble Coran dans leur zone, ou en les accusant d’abriter des éléments de Daech ou de mener des opérations de contrebande de carburant et d’armements vers les zones contrôlées par le gouvernement syrien ou même en l’accusant d’entretenir des liens avec des forces à la solde de l’Iran. Il semble qu’ils soient parvenus à les persuader.
Il y a deux mois, ils avaient donné leur feu vert pour réduire les pouvoirs du Conseil dans la province de Deir Ezzor, permettant de substituer la présence de ses éléments sur les check-points par des éléments des Asayechs kurdes.
Le dimanche, après avoir reçu des assurances pour régler sa situation, Abou Khawla a accepté de se rendre à une réunion à laquelle ont participé tous les membres du Conseil militaire de Deir Ezzor, dans le quartier général des FDS. Ce dernier se trouve dans la base de la Coalition internationale à l’Est de Hassaké. Ils ont tous été arrêtés.
Commentant l’évolution de la situation, des sources sur le terrain ont confirmé que le plan visant à attirer les dirigeants du Conseil a été exécuté avec la bénédiction et la supervision des forces US, comme en témoigne « l’arrestation d’Abou Khawla à l’intérieur de la base de la coalition ».
Les FDS veulent s’assurer qu’ils contrôlent seuls les ressources de la région et ses décisions, indépendamment de toute autre considération. Ce que les tribus considèrent comme une diminution de leur rôle et une confiscation de leurs droits de participation à l’administration de la région de manière efficace, et non formelle.
Le lundi 28 août, des membres des tribus arabes et des militants du Conseil militaire de Deir Ezzor ont coupé un grand nombre de routes publiques et secondaires, dont l’une des routes menant à la base pétrolière Al-Omar, occupée par l’armée américaine. Dernière évolution, les tribus de Deir Ezzor ont adressé un ultimatum aussi bien à la Coalition qu’aux FDS de libérer tous ceux qui ont été arrêtés et de briser le siège sur les habitants de Hassaké menaçant de déclarer la mobilisation générale.
Al-Hol en voie d’être vidé ?
A signaler aussi que le Kirghizistan a annoncé mercredi le rapatriement d’une centaine de femmes et d’enfants de jihadistes des camps de détention en Syrie. Des milliers de ressortissants des ex-Républiques soviétiques d’Asie centrale avaient rejoint des organisations jihadistes entre 2013 et 2015. Les femmes et les enfants rapatriés viennent des camps d’al-Hol et de Roj, dans le nord-est de la Syrie, qui abritent plus de 55 000 personnes, membres des familles de jihadistes du groupe État islamique. Les hommes sont détenus dans d’autres endroits.
Pour le Kirghizistan, c’est la troisième opération de rapatriement depuis la chute, en mars 2019, du califat auto-proclamé du groupe État islamique. Les personnes rapatriées font partie de 7500 étrangers de 57 pays dont la moitié sont Européens, encore détenus à al-Hol.
La plupart de ces pays font la sourde oreille aux appels des administrateurs kurdes des camps, qui exhortent les États concernés à rapatrier leurs ressortissants. Si l’Allemagne et la Belgique ont récupéré presque la totalité de leurs citoyens, la France a mis un frein aux rapatriements après avoir ramené 169 enfants et 57 femmes. Il reste près de 280 Français à al-Hol, dont 200 enfants.
Al-Hol est considéré par les experts comme un foyer de radicalisation systématique. Le groupe État islamique y fait la loi et disposerait d’une police féminine et de cellules clandestines chargées d’assassiner les personnes suspectées de collaborer avec les forces kurdes ou les ONG.