« Tous les présidents et ministres des affaires étrangères de notre démocratie ont défini le Maroc comme la priorité numéro un de la politique extérieure de l’Espagne », a-t-il souligné lors d’un forum organisé par le cabinet de conseil Llorente y Cuenca, à l’occasion de la prochaine présidence espagnole de l’Union européenne.
« Ne pas œuvrer pour avoir une bonne relation avec le Maroc est très dommageable pour le peuple espagnol », a insisté le chef de la diplomatie espagnole. Aujourd’hui, a souligné J. M. Albares, les deux pays ont jeté les bases d’« une nouvelle relation fondée sur le respect mutuel et le non-recours à des actes unilatéraux », précisant que les premiers résultats de cette nouvelle dynamique sont « déjà visibles ».
Dans ce sens, le ministre a mis l’accent sur la baisse des arrivées irrégulières d’immigrants sur les côtes espagnoles, ce qui a permis, selon lui, d’éviter des « milliers de morts » en Méditerranée et dans l’Atlantique, et sur l’augmentation des échanges commerciaux entre les deux pays. « Les résultats sont là et nous constatons que nous gérons les choses beaucoup mieux qu’il y a un an et demi », a conclu le chef de la diplomatie espagnole.
Le Maroc et l’Espagne ont tenu, les 1er et 2 février à Rabat, leur 12e réunion de haut niveau, qui a été sanctionnée par une Déclaration conjointe, dans laquelle les deux parties expriment leur engagement à perpétuer les relations d’excellence qui les ont toujours liés et réaffirment leur volonté de les enrichir en permanence. Les deux parties ont signé, à cette occasion, plusieurs accords de coopération portant sur différents domaines, dont la gestion de la migration, le tourisme, les infrastructures, les ressources en eau, l’environnement, l’agriculture, la formation professionnelle, la sécurité sociale, le transport, la sécurité sanitaire et la recherche et développement.
Une perspective qui ne semble pas être partagée par la majorité des formations politiques. Au-delà des critiques du Parti Populaire, formation de droite qui cultive encore un tropisme franquiste, au niveau de la gauche radicale, il y a lieu de signaler que Unidas Podemos nage à contre-courant. Ainsi, cette formation prévoit, cette semaine, de défendre un projet de loi visant à accorder la nationalité espagnole aux Sahraouis, lors de la session plénière du Congrès espagnol. Une mesure, sous la modalité de lettre de naturalisation, qui bénéficiera aux Sahraouis nés avant le 26 février 1976, « date à laquelle le territoire du Sahara occidental a cessé d’être sous souveraineté espagnole », indique la formation politique.
Le projet de loi, enregistré en avril 2022, a déjà été inclus dans le projet d’ordre du jour approuvé par le Conseil, auquel Europa Press a eu accès. Dans son texte, le groupe Unidas Podemos propose également d’accorder la nationalité aux descendants de Sahraouis, pour lesquels il fixe un délai de 5 ans à compter de l’inscription au registre de l’état civil de l’acquisition de la nationalité de l’un de leurs parents. De même, ses élus exigent que les Sahraouis ayant une situation régularisée en Espagne puissent accéder à la nationalité espagnole par la résidence après deux ans seulement, comme c’est le cas des « autres nations ayant de fortes racines historiques forts avec l’Espagne ».
Dans son texte, Unidas Podemos opte pour la formule d’une lettre de naturalisation, encadrée dans les dispositions de l’article 21 du code civil. A cette fin, une série de conditions de preuve seront requises, telles que « la fourniture d’une carte d’identité nationale vérifiable par la police (même si elle a expiré), un certificat d’inscription au recensement pour le référendum sur le Sahara occidental délivré par les Nations unies ou un certificat de naissance délivré par les autorités dans les camps de réfugiés sahraouis de Tindouf et légalisé par la représentation du Front Polisario en Espagne ». Il sera également utile, selon le texte, de fournir les actes de naissance ou les livrets de famille délivrés par l’administration espagnole, ainsi que d’autres documents qui pourraient indiquer « une naissance au Sahara occidental avant la date susmentionnée ».
Les élus de la formation politique d’extrême-gauche estiment que le contenu de leur texte est « conforme à l’accord du Congrès de 2016, qui a demandé l’amendement de l’article 22 du Code civil pour inclure les Sahraouis dans les groupes bénéficiant d’une période réduite de deux ans dans l’accès à la nationalité par la résidence ». De manière générale, Unidas Podemos affirme que cette proposition de loi « contribue à « régler, bien que très partiellement, la dette historique contractée auprès de la population sahraouie » ».
La proposition de loi sonne comme une réaction au soutien de Pedro Sanchez au plan marocain d’autonomie du Sahara occidental. Pour rappel, les ministres de la coalition d’extrême gauche, Unidas-Podemos, avaient tous condamné la nouvelle position de l’Espagne quant au différend d’avril 2022. D’ailleurs, Alberto Garzón, ministre de la Consommation, s’était réuni, le 28 avril, après le sommet du 7 avril à Rabat entre Mohammed VI et Sánchez, avec une délégation du Front Polisario, conduite par ses représentants en Espagne et en Europe.
Même Pablo Iglesias, ancien chef de file de Podemos, avait mis une pause à sa retraite politique pour affirmer que P. Sánchez avait « trahi » sa parole à l’égard du Sahara occidental en soutenant le plan marocain d’autonomie.