Lors d’un point presse ce 22 mai, D. Peskov, a qualifié d’« expropriation » la décision des représentants des Vingt-Sept de saisir les revenus des fonds russes. « Nous avons déjà dit que de telles décisions, eh bien, même si nous voyons qu’ils sont prudents, ils voient le danger potentiel de telles décisions et comprennent le danger pour eux des conséquences potentielles qui sont inévitables, ils ont donc opté pour une version allégée, mais la version réduite n’est rien d’autre qu’une expropriation », a-t-il déclaré.
« Jusqu’à 3 milliards d’euros cette année seulement », s’était félicité le 21 mai sur X le ministre tchèque des Affaires étrangères Jan Lipavsky, annonçant que la saisie avait été approuvée. « 90 % sont destinés à l’armée ukrainienne », avait précisé le ministre tchèque.
Quelque 191 milliards d’euros de la Banque de Russie sont actuellement placés auprès d’Euroclear Bank (EB), un organisme international de dépôts de fonds siégeant à Bruxelles. Fonds qui, selon la patronne d’EB, Valérie Urbain, ont généré 4,4 milliards d’euros (avant imposition) de revenus en 2023. Au début du mois, la présidence belge du Conseil de l’Union européenne avait annoncé, également sur X, que les ambassadeurs de l’UE s’étaient entendus pour l’utilisation des revenus des avoirs russes gelés dans le cadre de l’assistance militaire à l’Ukraine.
Quelques jours plus tôt, le Financial Times révélait que la perspective d’une confiscation des avoirs eux-mêmes, à laquelle les autorités américaines et britanniques poussent leurs homologues du G7, avait rencontré une forte opposition au G20. Selon le quotidien économique britannique, plusieurs ministres des Finances auraient fait part de leurs craintes quant aux investissements de leurs pays au sein de l’UE si un tel précédent était créé. Toujours selon la même source, une saisie des biens russes ne faisait pas l’unanimité au sein même du G7 et ne serait plus sur la table. Le Fonds monétaire international, ainsi que la présidente de la Banque centrale européenne, avaient notamment mis en garde quant à l’impact qu’une telle confiscation aurait sur la réputation des Européens aux yeux des investisseurs internationaux. Du côté russe, Moscou a averti à plusieurs reprises que des mesures symétriques seraient prises en cas de confiscation de ses actifs en Occident.
Kiev s’effondre
Sur le terrain de la confrontation militaire, le ministère russe de la Défense a annoncé mercredi la libération du village de Klechtcheïevka, dans la région de Donetsk, qui était l’une des rares localités prises par les forces de Kiev lors de leur offensive de l’été 2023. « À la suite d’actions offensives, les unités du groupe de troupes « Sud » ont libéré la colonie de Klechtcheïevka de la République populaire de Donetsk », a annoncé ce 22 mai sur sa chaîne Telegram le ministère russe de la Défense.
Le média russe Rybar avait rapporté la veille une offensive russe, rapportant la présence d’unités russes au centre du village, ce qui semblait indiquer le repli des troupes ukrainiennes sur les hauteurs à l’ouest de celui-ci. Située à neuf kilomètres au sud-ouest d’Artiomovsk (Bakhmout), Klechtcheïevka fut l’une des rares localités dont Kiev avait annoncé la prise en septembre 2023, à l’occasion de l’échec de sa contre-offensive déclenchée début juin 2023 grâce à de larges approvisionnements occidentaux.
Les forces russes pressent les troupes ukrainiennes en maints endroits du front. Le ministère russe de la Défense a depuis deux semaines annoncé la libération d’une vingtaine de localités. Sur le front Sud, elles ont chassé le 15 mai les unités ukrainiennes de Rabotino, autre village repris à l’été 2023 par ces dernières. Mais c’est surtout sur le front Nord, dans la région de Kharkov, que les troupes russes ont avancé, lançant le 10 mai une offensive qui a bousculé les lignes de défense ukrainiennes. Commentant l’offensive russe devant la presse en marge de sa visite en Chine, Vladimir Poutine avait déclaré le 17 mai que la Russie n’avait pas l’intention de lancer un assaut contre Kharkov, mais que ses troupes voulaient créer une « zone tampon » afin de mettre un terme aux bombardements constants des villes frontalières russes par l’artillerie ukrainienne.
Dans un entretien à l’AFP, Volodymyr Zelensky a affirmé le 18 mai que ses troupes avaient stoppé l’avancée russe à Kharkov, tout en prévenant que l’opération de Moscou pouvait être « constituée de plusieurs vagues ». Le 21 mai, le président ukrainien rapportait de rudes combats dans la région de Donetsk : « Le secteur de Pokrovsk et d’autres secteurs de la région de Donetsk – Kramatorsk, Kourakhové – restent extrêmement difficiles, la majeure partie des combats s’y déroulent actuellement ». À cela s’ajoute une campagne de frappes visant les installations énergétiques ukrainiennes, en riposte aux attaques ukrainiennes contre les raffineries en Russie.
La pression russe semble inquiéter Kiev. Les autorités ukrainiennes ont notamment enjoint leurs soutiens occidentaux à les aider à frapper des cibles en Russie ainsi qu’à autoriser l’élargissement des frappes sur le territoire russe menées avec les armes qu’ils leur fournissent. Le 21 mai, des élus US dirigés par le président de la commission du renseignement Mike Turner, représentant républicain de l’Ohio, ont demandé au chef du Pentagone, Lloyd Austin, d’autoriser Kiev à « frapper des cibles stratégiques sur le territoire russe dans certaines circonstances ».