« C’est le cœur lourd que nous partageons la nouvelle dévastatrice de la perte de notre caméraman dévoué d’Al-Jazeera, Samer Abou Daqa », a écrit sur X Mohamed Moawad, rédacteur en chef de la chaîne de télévision qatarie. Al-Jazeera avait auparavant indiqué que son chef de bureau à Gaza, Wael Dahdouh, et Abou Daqa, avaient été blessés dans une école de Khan Younès (sud) « à la suite de ce que l’on pense être une attaque de drone israélien ».
Al-Jazeera a précisé que S. Abou Daqa était grièvement blessé mais est resté pendant des heures sur les lieux de la frappe, sans que l’on puisse intervenir pour lui porter secours.
W. Dahdouh, dont les membres de famille avaient également été tués suite à une frappe israélienne, a lui été blessé au bras et transféré à l’hôpital Nasser de Khan Younès.
Dans un communiqué, Al-Jazeera a dit tenir « les forces d’occupation israéliennes pleinement responsables de la sécurité de Samer ». « L’équipe de Gaza, en particulier Wael et Samer, ont joué un rôle crucial pour révéler l’ampleur des destructions et des horreurs des atrocités israéliennes. Sans leur dévouement et leur engagement, les horreurs de Gaza ne seraient pas exposés au monde », a affirmé la chaîne.
Un premier bombardement a visé une école de l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens (Unrwa) à Khan Younès, que les journalistes venaient couvrir, lorsqu’un deuxième bombardement a eu lieu. Cette seconde frappe a visé « délibérément les journalistes ». Il s’agit d’une « tentative d’intimidation des journalistes pour qu’ils ne documentent pas les massacres (israéliens) commis dans la bande de Gaza », a réagi le Hamas au pouvoir à Gaza. L’épouse de W. Dahdouh et deux de ses enfants avaient été tués dans une frappe israélienne le 25 octobre à Gaza.
Plus de 60 journalistes et employés de médias sont tombés sous les bombes israéliennes depuis le début de la guerre israélienne contre Gaza le 7 octobre, selon le Comité pour la protection des journalistes (CPJ).
Par ailleurs à l’Est d’AlQuds occupée, un journaliste palestinien de l’agence de presse turque Anadolu a également été blessé lors de violences policières israéliennes, en marge de la prière du vendredi près de la mosquée al-Aqsa.
L’ONG Reporters sans frontières a publié jeudi son bilan annuel des journalistes tués, détenus, otages et disparus dans le monde. Le nombre de professionnels tués en exerçant leur métier a baissé, selon l’ONG, alors que Gaza s’est transformée en hécatombe pour les journalistes !
Constat paradoxal : alors que le conflit entre Israël et le Hamas s’avère particulièrement meurtrier pour les journalistes, le nombre global de reporters tués dans le monde n’a jamais été aussi bas depuis 2002, selon RSF. Cette ONG fait peu de cas du drame de Gaza en établissant son bilan pour 2023 qui n’évoque que 45 journalistes à avoir perdu la vie dans l’exercice de leurs fonctions, contre 61 l’an passé.
« Cela ne réduit en rien la tragédie à Gaza mais on observe une baisse régulière, très loin des plus de 140 journalistes tués en 2012, puis en 2013 », principalement en raison des guerres en Syrie et en Irak, explique à l’AFP Christophe Deloire, secrétaire général de RSF. Sauf que le ciblage des journalistes par l’armée sioniste ne se limite pas au seul théâtre gazaoui. En effet, même à la frontière libano-palestinienne, des journalistes ont été ciblés. La chaine satellitaire Al-Mayadeen a perdu une de ses journalistes qui assurait la couverture au sud Liban. Un drone a ciblé l’équipe médiatique déployée en tuant aussi le cameraman et un de leur accompagnateur.
Le décompte mondial, arrêté au 1ᵉʳ décembre, « ne comprend pas les journalistes tués en dehors de leurs fonctions, ceux qui n’ont pas été tués en tant que tels, ni ceux dont les circonstances de la mort demeurent inconnues », précise RSF. Cette précision explique les différences de bilan quant au nombre de journalistes tués à Gaza. L’organisation recense au total « 63 journalistes tués » au Proche-Orient depuis le début du conflit Israël-Hamas le 7 octobre, en lien ou pas avec leur profession. Dans le détail, outre les 13 journalistes ayant péri « sous des tirs israéliens » à Gaza, selon RSF, cette guerre a causé la mort de trois journalistes en exercice au Liban et d’un autre en Israël, tué par le Hamas.
RSF a déposé une plainte, en novembre, devant la Cour pénale internationale (CPI) pour « crimes de guerre » commis contre les journalistes à Gaza et contre le journaliste israélien. Une enquête de l’AFP, publiée la semaine dernière, sur le bombardement qui a tué dans le sud du Liban le 13 octobre un journaliste vidéo de l’agence Reuters, Issam Abdallah, et en a blessé six autres, dont la photographe de l’AFP Christina Assi, grièvement atteinte, désigne un obus de char israélien.