N. Mikati a tenu ces propos en parrainant le lancement du « Plan de réponse à la crise libanaise pour 2022-2023 ». Il a souligné que la réunion à laquelle il a pris part «se déroule au milieu d’une crise sans précédent dont souffre le Liban, ce qui nécessite de faire la lumière sur ce dont a besoin le Liban, qui accueille une grande proportion de réfugiés syriens par rapport à la population, comme éléments financiers et économiques pour la relance de tous ses secteurs. » Ajoutant que « le Liban a supporté un fardeau de pression insupportable en raison de la présence de plus de 1,7 million de déplacés syriens et de réfugiés palestiniens vivant dans tout le pays, c’est-à-dire dans 97 % des municipalités de tout le Liban ». Dès lors, devait-il ajouter, « 11 ans après le début de la crise syrienne, le Liban n’est plus en mesure de supporter tout ce fardeau, surtout dans les circonstances actuelles » en faisant allusion à la crise économique et financière inédite que traverse le pays du cèdre depuis 2019.
N. Mikati a appelé « la communauté internationale à coopérer avec le Liban pour rapatrier les Syriens déplacés vers leur pays ». Sans quoi, a-t-il averti, «le Liban aura une situation non souhaitable pour les pays occidentaux, celle d’œuvrer pour les faire sortir du Liban par les moyens légaux, à travers une application ferme des lois libanaises.»
Le chiffre des réfugiés syriens au Liban est estimé à 1,5 million, dont 940 mille sont inscrits dans les annales de l’Agence des Nations unies pour les réfugiés (HCR), selon les chiffres publiés en 2021. En 2020, elle les évaluait à 865.331 réfugiés. En 2017, HCR a assuré que 80% d’entre eux voudraient rentrer dans leur pays. En 2016, elle avait indiqué que 67 mille sont rentrés en Syrie.
Selon l’agence internationale, le Liban qui compte une population estimée à près de six millions d’habitants accueille le plus grand nombre de réfugiés par habitant au monde.
Le 3 juin dernier, Abdallah Bou Habib, ministre libanais des Affaires étrangères du gouvernement intérimaire, a annoncé que son pays ne coopérerait pas avec les Européens pour le maintien des réfugiés syriens en l’absence de feuille de route européenne pour mettre fin à l’asile syrien en Liban.
D’après lui, il faut rapatrier les Syriens qui n’ont pas de carte d’asile, en coordination avec le pouvoir syrien. Les Occidentaux sont accusés d’utiliser la carte des réfugiés syriens pour exercer davantage de pressions sur le Liban qui croupit sous la pire crise économique de son histoire, causée par une dette publique énorme, et ponctuée par des pénuries ambulantes de toutes les denrées nécessaires.
Dans une interview accordée en mai au journal local al-Joumhouriat, Michel Aoun, chef de l’Etat libanais, avait averti qu’« il est devenu difficile pour nous de contrôler l’intrusion de déplacés syriens par le biais de bateaux d’immigration illégale vers l’Europe ». Selon lui, « la communauté internationale doit assumer sa responsabilité concernant ce dossier avant qu’il ne soit hors de contrôle. »
M. Aoun a ajouté qu’« au lieu de fournir une aide matérielle aux déplacés pour qu’ils restent au Liban, elle doit leur être fournie en Syrie, et donc beaucoup d’entre eux n’auront aucune incitation à rester ici », notant que « nous ne pouvons pas attendre une solution politique qui peut être retardé, sachant que ce que nous proposons, c’est qu’ils retournent dans les zones sûres. »
Le président a ajouté que « la déclaration des pays occidentaux selon laquelle les déplacés ont des craintes politiques et sécuritaires de retourner à leur pays ne s’applique pas à la réalité, car environ 500 000 d’entre eux sont retournés en Syrie sans qu’aucun incident ou harcèlement n’ait été enregistré, tandis que des centaines de milliers d’entre eux ont participé à l’élection du président Bachar al-Assad pour un nouveau mandat, à l’ambassade de Syrie au Liban »,
« Comment peuvent-ils être ciblés par le pouvoir syrien ? », s’est-il interrogé.
Chaque fois que les autorités libanaises évoquent la nécessité du retour des réfugiés syriens à leur pays, une campagne médiatique est menée par des ONG et surtout les pays du Golfe qui refusent de les accueillir sur leur sol.
Avec 3,5 millions, c’est la Turquie qui compte sur son sol le chiffre le plus important de ces déplacés. Recep Tayyip Erdogan a déclaré dernièrement qu’il envisage d’en installer près d’un million dans les zones conquises lors de ses trois offensives militaires au nord de la Syrie.