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Passage éclair d’A. Blinken à Ramallah : M. Abbas boit du petit lait…

Décrié pour avoir dénoncé le Hamas, le président palestinien a lié le 5 novembre un retour de l'Autorité palestinienne à Gaza, évoqué par Washington, à un « règlement politique » englobant aussi la Cisjordanie et Jérusalem-Est occupées.
Passage éclair d’A. Blinken à Ramallah : M. Abbas boit du petit lait…

« La bande de Gaza est partie intégrante de l’Etat de Palestine, nous prendrons nos responsabilités entières dans le cadre d’une solution politique globale pour la Cisjordanie, Jérusalem-Est et la bande de Gaza », a affirmé Mahmoud Abbas dimanche en recevant à Ramallah le secrétaire d’Etat américain Antony Blinken. Le 31 octobre, au Congrès, le chef de la diplomatie US avait affirmé que l’Autorité palestinienne devrait reprendre « à un moment donné » le contrôle de la bande de Gaza au Hamas, et que de tierces parties internationales pourraient peut-être jouer un rôle lors d’une période intérimaire. « A un moment donné, ce qui aurait le plus de sens, ce serait qu’une Autorité palestinienne efficace et revigorée ait la responsabilité de la gouvernance et, à terme, de la sécurité de Gaza », a-t-il spécifié lors d’une audition interrompue à plusieurs reprises par des manifestants exigeant de « sauver les enfants de Gaza ».

M. Abbas, dont l’Autorité a été délogée de Gaza par le Hamas en 2007, siège à Ramallah et ne gouverne qu’en Cisjordanie, occupée par Israël depuis 1967. Les dernières élections législatives palestiniennes remontent à 2006 et elles avaient été remportées par le Hamas. Empêché d’exercer un réel pouvoir malgré cette victoire, le mouvement islamiste a pris le contrôle de la bande de Gaza par la force l’année suivante en mettant en déroute les services de sécurité de l’Autorité palestinienne.

« Une nouvelle fois, nous nous rencontrons dans les conditions les plus dures qui soient, je n’ai pas de mot pour décrire la guerre de génocide et les destructions que subit notre peuple palestinien à Gaza de la part de l’appareil miliaire d’Israël, sans aucun respect des principes du droit international », a encore dit M. Abbas devant A. Blinken. Il a en outre une nouvelle fois pointé du doigt « le terrorisme des colons » juifs en Cisjordanie –qui sont désormais près d’un demi-million–, dénonçant « un nettoyage ethnique ».

Outre la violence des colons, les raids et autres incursions armées des forces israéliennes se sont multipliées en Cisjordanie depuis le 7 octobre. Plus de 150 Palestiniens ont été tués en Cisjordanie occupée par des tirs de soldats ou de colons israéliens depuis cette date, selon le ministère de la Santé.

M. Abbas a encore dit « refuser catégoriquement (…) le transfert forcé des Palestiniens hors de la bande de Gaza, de la Cisjordanie ou de Jérusalem »,alors que de récentes déclarations d’ex-responsables israéliens ont laissé entendre qu’Israël souhaiterait la réinstallation d’au moins une partie des Gazaouis dans le Sinaï égyptien. Le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi et le roi Abdallah II de Jordanie, deux pays qui partagent des frontières avec les Territoires palestiniens occupés, sont vent debout contre tout « transfert »depuis des semaines.

Niet au cessez-le-feu !

Avant son déplacement à Ramallah, A. Blinken a de nouveau plaidé samedi, à Amman, en faveur de « pauses humanitaires » dans le conflit entre Israël et le Hamas, s’opposant au cessez-le-feu réclamé avec force par les pays arabes.

Pis, Washington renforce toujours son dispositif militaire dans la région. Le Commandement central de l’armée américaine au Moyen-Orient (Centcom) a annoncé dans la nuit l’arrivée, dans son secteur, d’un sous-marin à propulsion nucléaire, qui viendra renforcer le dispositif naval déployé en Méditerranée orientale. 154 missiles Tomahawk d’une portée 1 500 kilomètres et 20 missiles balistiques d’une portée de 6 000 kilomètres. Selon la presse israélienne, le sous-marin en question est l’USS Florida, dont le passage dans canal de Suez a été photographié. De quoi prêter main forte aux porte-avions américains Gerald-Ford et le Dwight-Eisenhower déjà déployés dans la région, où leurs équipages ont procédé, ces derniers jours, à des manœuvres aéronavales.

« Les Etats-Unis estiment que tous ces efforts seront facilités par ces pauses humanitaires », a martelé le haut diplomate US  lors d’une conférence de presse en parlant des efforts pour épargner les civils palestiniens pris au piège de la guerre et accélérer l’envoi d’aide dans la bande de Gaza assiégée. Il s’exprimait aux côtés de ses homologues égyptien et jordanien à l’issue d’une réunion ministérielle à Amman avec cinq pays arabes, et avant de se rendre en soirée au palais pour s’entretenir avec le roi Abdallah II de Jordanie. Outre la Jordanie et les Etats-Unis, l’Arabie saoudite, le Qatar, les Emirats arabes unis et l’Egypte y ont participé, ainsi qu’un représentant de l’Autorité palestinienne.

Ayman Al-Safadi, ministre jordanien des Affaires étrangères, a souligné que le monde arabe parlait d’« une seule voix » (Sic !) pour mettre fin à la guerre à Gaza. Il a dénoncé les « crimes de guerre » d’Israël, qui « vont hanter des générations », tandis que son homologue égyptien, Sameh Choukri, a exigé un « cessez-le-feu immédiat et sans conditions ». Cependant le chef de la diplomatie US, dont le pays est le premier soutien à la fois politique et militaire d’Israël, a réitéré la ferme opposition des Etats-Unis à un cessez-le-feu. « Nous pensons qu’un cessez-le-feu ne fera que maintenir en place le Hamas », a-t-il dit devant ses homologues, témoignant du schisme dans les perceptions du conflit entre les Etats-Unis et Israël d’un côté et les pays arabes de l’autre. Il a répété que face à « l’horreur » de l’attaque du Hamas le 7 octobre, Israël avait « le droit et l’obligation de se défendre ». A. Blinken n’en a pas moins exigé, comme il l’avait fait la veille à Tel-Aviv, que les dirigeants israéliens prennent « toutes les mesures nécessaires pour protéger les civils palestiniens ». « Nous n’acceptons pas la notion d’auto-défense », a souligné pour sa part le ministre jordanien.

A signaler que l’armée jordanienne a procédé au parachutage d’une aide médicale dans la bande Gaza, opération accomplie « en coordination » avec l’armée israélienne, a annoncé lundi matin un porte-parole militaire israélien. « La nuit dernière, en coordination avec [l’armée israélienne], un avion jordanien a largué de l’équipement médical et de la nourriture pour l’hôpital jordanien dans la bande de Gaza. L’équipement sera utilisé par le corps médical pour les patients », a-t-il déclaré à l’AFP. Quant à l’armée égyptienne déployée dans le Sinaï, elle persiste à veiller sur le verrouillage quasi-systématique du passage de Rafah qui ne s’ouvre face aux blessés graves palestiniens que par intermittence. Au même titre d’ailleurs que pour le transit des aides humanitaires entassées toujours aux portes de Gaza. Même les hôpitaux de campagne restent inopérants… En attendant le feu vert israélien. Alors que Rafah est un point de passage qui relie l’Egypte à la Palestine…

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