« L’Alliance de l’Atlantique Nord a une fois de plus clairement confirmé son essence. Il s’agit d’une alliance créée dans une époque de confrontation et dans le but de maintenir la confrontation », a dénoncé jeudi Dmitri Peskov, porte-parole du Kremlin. « Nous constatons que nos adversaires en Europe et aux États-Unis ne sont pas des partisans du dialogue. Et à en juger par les documents adoptés lors du sommet de l’OTAN, ils ne sont pas des partisans de la paix », a déclaré aux médias le porte-parole du Kremlin, assurant que la Russie prendrait des « mesures réfléchies, coordonnées et efficaces » afin de « contrer la menace sérieuse » posée par l’OTAN.
« Nous devons tout faire pour que la voie irréversible de l’Ukraine vers l’adhésion à l’OTAN se termine par la disparition de l’Ukraine ou de l’OTAN. Ou mieux, des deux » a indiqué de son côté Dmitri Medvedev, ancien président russe et actuel vice-président du conseil de sécurité du pays.
Dans une déclaration commune publiée la veille, les pays du bloc militaire occidental ont assuré qu’ils continueraient d’aider l’Ukraine « à suivre sa trajectoire irréversible vers l’intégration euro-atlantique pleine et entière, y compris vers l’adhésion à l’OTAN ». Ces derniers se sont toutefois gardés d’inviter formellement Kiev dans leur alliance, en raison de l’opposition de certains membres, notamment les États-Unis. Celle-ci sera lancée « lorsque les alliés l’auront décidé et que les conditions seront réunies », ont-ils spécifié.
Réunis à Washington, pour un sommet de l’Alliance marquant les 75 ans de leur bloc militaire, les 32 pays occidentaux ont également réaffirmé l’inscription dans la durée de leur soutien militaire à Kiev. Ceux-ci ont notamment annoncé leur intention de dégager une enveloppe « de base d’au moins 40 milliards d’euros pour l’année à venir ». Une mesure qui avait notamment été souhaitée et annoncée à la mi-juin par Jens Stoltenberg, à l’approche des présidentielles aux États-Unis qui pourraient aboutir à un retour de Donald Trump à la Maison Blanche. L’une des promesses de campagne du candidat républicain est notamment de mettre rapidement fin au conflit en Ukraine.
Toutefois, contrairement à ce que souhaitait le secrétaire général sur le départ, le montant de cette aide ne sera pas inscrit dans le marbre, mais revu chaque année. « Les chefs d’État et de gouvernement réexamineront les contributions des alliés lors des prochains sommets de l’OTAN, à commencer par celui qui se tiendra en 2025 à La Haye », est-il stipulé dans la déclaration commune. Toujours dans un objectif de pérenniser leur soutien militaire à Kiev en cas d’alternance à Washington, les pays de l’Alliance atlantique ont également décidé de prendre en main la coordination et l’acheminement de cette aide, auparavant placée sous commandement des États-Unis. Une décision qui a pour but d’assurer une « continuité » et de se protéger des « aléas politiques », a déclaré J.Stoltenberg.
Au-delà de la Russie, citée 34 fois dans le document, et avec laquelle « l’OTAN ne cherche pas la confrontation et ne représente aucune menace » assurent les pays alliés, l’Iran, la Corée du Nord ainsi que la Chine sont pointés du doigt. Cette dernière est accusée de jouer « un rôle déterminant dans la guerre menée par la Russie contre l’Ukraine au travers de son partenariat dit « sans limite » et du large soutien qu’elle apporte à la base industrielle de défense russe ». Un soutien dont s’est toujours défendu Pékin.
Fraîchement intégrée à l’Alliance, la Suède – par la voix de son ministre des Affaires étrangères Tobias Billstrom – a estimé que l’Asie « devrait également être reconnue comme faisant partie des préoccupations de l’OTAN ».
Digue allemande
La Russie apportera « sans nervosité ni émotion » une réponse militaire aux projets américains de déploiement de missiles à longue portée en Allemagne, a déclaré jeudi Sergueï Ryabkov, vice-ministre russe des Affaires étrangères, au lendemain d’une annonce de Washington.
« La nature de notre réaction sera déterminée de manière calme et professionnelle. L’armée a sans aucun doute déjà pris en compte ce message. Nous analyserons bien sûr quels systèmes spécifiques seront discutés », a déclaré le vice-ministre russe. Les gouvernements américain et allemand avaient indiqué la veille, en marge du sommet de l’OTAN à Washington, que les États-Unis commenceraient en 2026 à déployer en Allemagne des systèmes de frappe dont la portée dépasserait « considérablement » celle des armes déjà présentes en Europe. « La mise en œuvre de ces capacités avancées démontrera l’engagement des États-Unis envers l’OTAN et leurs contributions à la dissuasion intégrée européenne », ajoute le communiqué de la Maison Blanche. L’administration américaine évoque aussi « des armes hypersoniques en développement ».
« Il a semblé évident qu’il s’agirait de versions terrestres du missile de croisière Tomahawk et du missile SM-6 », a remarqué S. Ryabkov. Le vice-ministre a estimé que Moscou « avait encore une fois raison lorsqu’elle avait annoncé, il y a quelques années, que les États-Unis s’apprêtaient à adapter précisément ces systèmes pour un déploiement au sol ». « Les Américains ont alors nié tout cela, ce qui n’est pas surprenant, car les mensonges et les tentatives visant à tromper leurs opposants et la communauté internationale ont toujours fait partie intégrante du comportement américain sur la scène internationale et en particulier en Europe », a-t-il souligné. « Sans nervosité, sans émotions, nous développerons avant tout une réponse militaire à cette nouvelle menace », a réitéré le vice-ministre.
Conçu dans les années 70, le missile de croisière Tomahawk BGM-109 est destiné à être équipé d’une ogive thermonucléaire ou conventionnelle. Sa portée peut atteindre 2 500 km. Il a été adapté dans les dernières années pour être tiré à partir de batteries terrestres mobiles. Le SM-6 est quant à lui un missile sol-air anti-aérien, d’une portée de 400 km. Pour l’heure, les États-Unis ne sont pas dotés de missiles hypersoniques opérationnels, contrairement à la Russie. Une telle arme vole à une vitesse supérieure à Mach 5, soit plus de 6 000 km/h. Le Kinjal russe atteint Mach 10, soit 3 400 mètres/seconde et 12 000 km/h.