Alors que le Moyen-Orient a les yeux rivés sur Téhéran afin de prédire l’ampleur de sa riposte à l’agression israélienne du 26 octobre, l’Iran formule ses conditions pour un apaisement dans la région. « S’ils modifient leur comportement, acceptent un cessez-le-feu et arrêtent de tuer les populations opprimées et innocentes de la région, cela pourrait avoir un effet sur le type et l’intensité de notre réponse », a indiqué le président iranien lors d’une réunion du cabinet le 3 novembre en faisant allusion à l’entité sioniste qui mène une guerre génocidaire à Gaza, agresse le Liban et frappe épisodiquement la Syrie et même le Yémen. M. Pezechkian a toutefois précisé que l’Iran ne laisserait « sans réponse » aucun acte d’agression contre sa souveraineté et sa sécurité, a rapporté le média iranien Press TV. Il a par ailleurs prévenu l’État hébreu qu’il recevrait une réponse « dure » s’il commettait « une erreur » contre la République islamique.
Le président iranien s’en est également pris au soutien apporté à Israël par les Américains ainsi qu’au silence des chancelleries européennes à l’égard des pertes civiles engendrées par les opérations israéliennes à Gaza et au Liban. D’après lui, les pays de la région savent que « l’Iran cherche à établir la paix et la stabilité et que le régime sioniste cherche à intensifier la crise et la guerre dans la région ». « Nous n’avons jamais déclenché de guerre et n’avons jamais recommandé à aucun pays d’y aller », a-t-il à ce titre déclaré, accusant Washington de mener « des guerres dans différentes parties du monde, y compris dans notre région ». « Nous n’avons jamais largué de bombes ni de missiles sur les femmes et les enfants d’aucun pays et nous n’avons jamais privé aucun peuple d’eau, de nourriture et de médicaments, mais ils ont commis tous ces crimes contre l’humanité », a-t-il poursuivi.
« La réponse à la nouvelle agression de l’ennemi sera ferme, réfléchie et puissante, et dépassera la compréhension de l’ennemi », avait averti le guide suprême iranien, l’ayatollah Ali Khamenei, lors d’un discours prononcé le 2 novembre devant des étudiants à Téhéran. Selon une publication du Wall Street Journal, qui cite des responsables iraniens et arabes, Téhéran n’envisagerait pas « de limiter sa réponse aux missiles et aux drones », marquant ainsi une rupture avec les précédentes attaques de missiles contre Israël en avril et en octobre.
Les tensions entre l’Iran et Israël ne cessent de s’intensifier. Au-delà des déclarations de ses dirigeants, qui ont promis une riposte au raid israélien du 26 octobre, Téhéran aurait informé plusieurs diplomates arabes de sa volonté de réagir avec une riposte « forte et complexe ». « L’Iran n’envisage pas de limiter sa réponse aux missiles et aux drones », a rapporté le 3 novembre le WSJ. Selon la publication américaine, qui cite des responsables iraniens et arabes, la réaction de Téhéran pourrait inclure des missiles balistiques plus puissants et viser directement des installations militaires israéliennes. Les diplomates arabes rapportent que l’Iran envisagerait d’impliquer son armée régulière. « Impliquer son armée régulière ne signifie pas que ses troupes seraient déployées mais que le Corps des gardiens de la révolution islamique […] n’agirait pas seul dans ce cas », a précisé le quotidien US. « Nos militaires ont subi des pertes et doivent répondre », a déclaré un responsable iranien au WSJ, précisant que l’Iran pourrait aussi utiliser le territoire irakien pour certaines opérations. Contrairement aux précédentes ripostes, où des drones et des missiles standards avaient été privilégiés, l’Iran envisagerait cette fois des frappes avec des ogives plus puissantes.
Lors de sa dernière attaque, l’Iran a tiré plusieurs types de missiles balistiques, dont les Emad et Ghadr, ainsi que ses modèles avancés Kheibar, Shekan et Fattah. Toujours selon la même source, l’Iran planifierait sa riposte en fonction des élections américaines. Selon un responsable iranien cité par le WSJ, Téhéran ne voudrait pas influencer le vote du 5 novembre avec son attaque. Le 31 octobre, le WSJ assurait dans un autre article que, selon les agences de renseignement US, Téhéran pourrait préférer une administration démocrate, dirigée par Kamala Harris.
Les dirigeants iraniens, y compris l’ayatollah Khamenei, ont durci leur discours ces derniers jours, promettant une « réponse cinglante » à l’État hébreu. Les experts occidentaux estiment néanmoins que l’Iran pourrait privilégier une action indirecte, via des alliés dans la région. L’attaque israélienne du 26 octobre aurait endommagé plusieurs systèmes de défense iraniens, selon Benjamin Netanyahou, accentuant les risques de confrontation. Le lendemain, le Premier ministre israélien avait déclaré que ces frappes avaient touché « le ventre mou de l’Iran » et que son pays disposait désormais d’une « liberté d’action sans précédent ». Les autorités israéliennes avertissent que la nature de la réaction iranienne influencera leur réponse, laissant entrevoir un possible changement de stratégie, notamment vis-à-vis des infrastructures nucléaires iraniennes, jusque-là ignorées par Tel-Aviv.
Linda Thomas-Greenfield, ambassadeur américaine à l’ONU, a averti le 28 octobre que toute attaque iranienne aurait de « graves conséquences ». Elle a rappelé la nécessité d’éviter une escalade des tirs directs. Bien que les États-Unis n’aient pas participé directement aux frappes, ils ont renforcé leur présence dans la région, déployant des bombardiers B-52 en prévision de possibles représailles iraniennes. Le 28 octobre, le président iranien avait déclaré que l’Iran « ne pouvait ignorer » cette attaque, tout en indiquant toutefois que l’intensité de la réponse pourrait être réévaluée si un cessez-le-feu intervenait au Liban ou à Gaza.