Lors d’un entretien avec des journalistes ukrainiens, Volodymyr Zelensky a indiqué que la tenue de pourparlers avec la Russie était la « seule option » pour l’Ukraine, même si de telles discussions constituent désormais un « défi ». Même si les atrocités commises, selon lui, par les forces russes à Boutcha sont impardonnables, l’Ukraine et la Russie doivent malgré tout emprunter la voie difficile de la poursuite des pourparlers, a-t-il jugé retransmis à la télévision. « Pour chacun de nous, moi y compris, c’est un véritable défi ne serait-ce que d’envisager la possibilité de négociations », a-t-il dit. Pour autant, « nous devons nous ressaisir, nous devons le faire, je pense que nous n’avons pas d’autre choix. »
Le président ukrainien s’est en outre dit favorable à la conduite d’une enquête internationale sur les exactions de Boutcha où des corps de civils ont été découverts dans les rues. «Nous avons fourni un accès maximal aux journalistes à Boutcha et dans d’autres villes libérées d’Ukraine, à des centaines de journalistes du monde entier», a-t-il poursuivi. «Et nous sommes intéressés par le fait que des milliers de journalistes visitent ce site, plus il y en a, mieux c’est».
Le 26 mars dernier le président ukrainien avait toutefois entériné une loi punissant la publication de certaines informations liées au conflit qui se déroule actuellement en Ukraine. Il est prévu jusqu’à 12 ans de prison pour la diffusion de contenus provoquant «de graves conséquences».
V. Zelensky, qui a dénoncé des «crimes de guerre» et un «génocide» à Boutcha et dans d’autres localités près de la capitale ukrainienne et accuse la Russie d’en être responsable, est intervenu devant le Conseil de sécurité mardi 5 avril pour la première fois depuis l’assaut militaire russe de son pays. La Russie avait de son côté protesté contre le fait que la Grande-Bretagne – qui préside actuellement cette instance des Nations unies – n’avait pas accédé à sa demande de réunir le Conseil de sécurité, concernant la situation à Boutcha, selon l’agence Tass.
Le 3 avril, le ministère russe de la Défense a réfuté les accusations de Kiev concernant les meurtres de civils dans la ville de Boutcha, dans la région de Kiev. Le ministère a déclaré que les forces russes s’étaient complètement retirées de Boutcha le 30 mars, alors que les «preuves de crimes» ne sont apparues que quatre jours plus tard, lorsque des agents des services de sécurité ukrainiens sont arrivés à Boutcha. Ajoutant que le maire de Boutcha, Anatoly Fedoruk, a confirmé dans une allocution vidéo le 31 mars qu’il n’y avait plus de troupes russes dans la ville, et il n’a aucunement mentionné de civils abattus dans les rues.
Sergueï Lavrov, ministre russe des Affaires étrangères, a décrit la situation à Boutcha comme une «attaque de fake news». Ajoutant que la campagne visant à ternir l’image de la Russie à Boutcha est similaire à celle orchestrée par les « Casques blancs » en Syrie.
Lors d’une conférence de presse après une réunion avec le Groupe ministériel arabe sur l’Ukraine, S.Lavrov a ajouté que « la Russie sait qui conseille l’Ukraine à intensifier la violence », espérant que « la délégation ukrainienne participant aux pourparlers de paix s’attache aux intérêts de son pays et de son peuple, et non aux intérêts d’autres pays ».
Côté ONU, le Secrétaire général de l’organisation s’est dit le 4 avril «profondément choqué par les images de civils tués à Boutcha», et le bureau des droits de l’Homme des Nations unies a évoqué de «possibles crimes de guerre». Sans attendre le résultat d’une éventuelle enquête visant à déterminer les responsabilités dans ce massacre, l’Europe et les Etats-Unis prévoient d’annoncer dans les jours à venir de nouvelles sanctions contre la Russie.
Lloyd Austin, secrétaire américain à la Défense, a déclaré que « les États-Unis comptent fournir à l’Ukraine des drones de type Switchblade, équipés de missiles antiblindés », ajoutant que « son pays a fourni à Kiev des armes d’une valeur d’un milliard de dollars ». « Les drones Switchblade 600 et 300 se déplacent de manière furtive », a souligné L. Austin lors d’une audience du House Armed Services Committee. « Avant le début de l’opération militaire russe en Ukraine, les États-Unis ont fourni à Kiev des armes d’une valeur d’ 1 milliard de dollars d’armes », ajoutant que « Washington compte fournir des armes supplémentaires d’une valeur d’1 milliard de dollars promis par le président Joe Biden ». Il a indiqué que les USA ont « accéléré la force de combat supplémentaire de la branche orientale de l’OTAN et augmenté le nombre de nos soldats en Europe à plus de 100 000 soldats », soulignant avoir « investi environ 6 milliards de dollars du budget du département dans l’Initiative de dissuasion du Pacifique afin de réorganiser notre position dans la région Indo-Pacifique vers une infanterie mieux distribuée ».
« Le budget du Département vise à obtenir plus de 56 milliards de dollars pour les plates-formes et les systèmes de l’armée de l’air, plus de 40 milliards de dollars pour maintenir notre domination en mer, y compris l’achat de neuf navires de combat supplémentaires, et près de 13 milliards de dollars pour soutenir et moderniser nos forces », a noté le secrétaire à la Défense. Ajoutant « soutenir une augmentation de 4,6 % des salaires, traitements et autres avantages spéciaux des militaires et des civils », notant que « le budget du ministère vise à obtenir plus de 130 milliards de dollars pour la recherche, le développement, les tests et l’évaluation. »
Le porte-parole du Pentagone, John Kirby, a annoncé récemment que « le département américain de la Défense fournira 300 millions de dollars d’aide supplémentaire à la sécurité de l’Ukraine », soulignant que « les États-Unis ne seront pas directement impliqués dans les combats, ni dans aucune autre mission en Ukraine ». Le Pentagone a également annoncé, lundi dernier, que l’aide militaire américaine, d’un montant de 800 millions de dollars, avait commencé à arriver en Ukraine.