La Finlande, qui partage une frontière de plus de 1 300 kilomètres avec la Russie, tourne le dos à sa légendaire neutralité. Le pays bénéficiera désormais de l’assistance militaire conventionnelle de ses alliés et de la dissuasion nucléaire.
Le président Sauli Niinistö a assisté à Bruxelles à la cérémonie marquant l’adhésion de son pays à l’Otan. Le premier acte de Helsinki en tant que 31e membre de l’Alliance a été de déposer sa ratification de la candidature de la Suède, qui doit venir compléter la nouvelle architecture de sécurité alliée, en grande partie face à Moscou, même si A. Niinistö affirme que l’appartenance de la Finlande à l’Otan « ne cible personne ». « Nous ne voulons pas que d’autres nous disent ce que nous devons faire ou ne pouvons pas faire, a déclaré le chef de l’État finlandais. J’ai toujours été persuadé que l’Otan ne nous fermerait pas ses portes, cependant, les Russes ont en quelque sorte cherché à créer une sphère d’influence autour d’eux. Eh bien, nous ne sommes pas dans une sphère ! Ce à quoi nous assistons aujourd’hui en est le résultat. »
« Nous sommes à bord, depuis longtemps, a-t-il ajouté. Nous sommes dans un partenariat avancé avec la Suède depuis plus de dix ans maintenant et durant cette période, nous avons développé nos capacités et collaboré avec l’Otan. Le changement n’est donc pas radical. Mais je suis certain que les Finlandais se sentent plus en sécurité. »
La Russie n’a pas manqué de réagir à cet élargissement de l’Otan qui n’est sans doute pas fini, car la Suède frappe, elle aussi, à la porte de l’Alliance atlantique. « C’est une nouvelle aggravation de la situation. L’élargissement de l’Otan est une atteinte à notre sécurité et aux intérêts nationaux de la Fédération de Russie. Cela nous contraint à prendre des contre-mesures en termes tactiques et en termes stratégiques pour notre sécurité, a réagi Dmitri Peskov, porte-parole du Kremlin. La situation avec la Finlande est fondamentalement différente de celle avec l’Ukraine. La Finlande n’est jamais devenue anti-Russie et nous n’avions aucune dispute avec elle. »
Un changement provoqué par l’invasion russe de l’Ukraine. « Avec l’Ukraine, la situation est diamétralement opposée et potentiellement dangereuse, poursuit D. Peskov. C’est cela qui a dicté le besoin de lancer une opération spéciale et qui nécessite d’atteindre les buts fixés. Mais cette adhésion ne pourra qu’affecter la nature des relations bilatérales avec les États qui deviennent de nouveaux membres de l’Alliance, car l’Alliance est une organisation inamicale, hostile à plus d’un titre envers la Russie. Mais je le répète : l’Ukraine est différente de la Finlande, il n’est pas possible de comparer les deux. »
« Nous déclarons la Finlande 31e membre de l’Alliance avec la réception de ces documents », a déclaré A. Blinken, chef de la diplomatie US, lors d’une cérémonie au siège de l’Otan à Bruxelles. Il a salué, tout comme le chef de l’Otan, Jens Stoltenberg, une « journée historique ». « Je suis tenté de dire que c’est peut-être la seule chose pour laquelle on peut remercier (le président russe Vladimir) Poutine, parce qu’il a, une fois de plus, précipité quelque chose qu’il disait vouloir éviter en agressant » l’Ukraine, a déclaré A. Blinken.
Agitation en Lituanie
Le même jour, les 31 ministres des Affaires étrangères de l’Otan préparent le prochain sommet qui aura lieu à Vilnius en juillet. C’est déjà en soi tout un symbole que de tenir ce sommet en Lituanie, pays frontalier de la Russie : la volonté d’une démonstration de force face au Kremlin et d’une démonstration de l’unité de l’Alliance atlantique.
Non seulement la guerre en Ukraine amène l’élargissement de l’Otan en Scandinavie, mais en outre, elle la pousse à se renforcer à long terme. L’augmentation des dépenses militaires sera le point central du sommet de Vilnius. Après des décennies pendant lesquelles les États-Unis ont appelé les alliés européens à « partager le fardeau », c’est-à-dire à investir dans leur propre défense, l’Otan avait décidé de se fixer comme objectif en 2014 à Cardiff que leurs dépenses militaires atteignent les 2°/° du PIB. Un quart des pays alliés n’y est pas encore. L’objectif pour Vilnius est que ce soit désormais un plancher, 2% minimum.
L’Otan doit renforcer ses armées et ses stocks d’armements ; la guerre en Ukraine a démontré qu’ils étaient insuffisants et que l’illusion de pays de ces 30 dernières années a mis à mal l’industrie européenne de l’armement. Selon l’Otan, les industriels de la défense doivent avoir maintenant l’assurance que les contrats suivront dans les décennies à venir.