L’ambassadeur d’Arabie saoudite à Ammana été nommé en août dernier ambassadeur non-résident pour les Territoires palestiniens. Sa délégation a été reçue au ministère des Affaires étrangères par Riyad al-Maliki, chef de la diplomatie palestinienne, avant de présenter ses lettres de créance au président Mahmoud Abbas, à Ramallah.
C’est la première visite d’une délégation officielle saoudienne en Cisjordanie depuis les accords de paix israélo-palestiniens d’Oslo de septembre 1993 qui ont donné naissance à l’Autorité palestinienne. Elle intervient alors qu’Israël et l’Arabie saoudite tentent de normaliser leurs relations, une situation qui inquiète les Palestiniens. « Entre Israël et l’Arabie Saoudite, le train de la normalisation est en marche. Et il atteindra certainement sa destination », assurent nombre de Palestiniens.
Il faut dire que le même jour, la première visite publique d’un ministre israélien a eu lieu en Arabie saoudite. Il s’agit de Haïm Katz, ministre du Tourisme, appelé à participer à une réunion de l’Organisation mondiale du tourisme à Riyad. Déjà, au début du mois, une délégation composée de cinq diplomates israéliens s’était déjà rendue dans le royaume. Ils participaient cette fois-ci à une réunion organisée par l’Unesco.
Mais les Saoudiens ne peuvent pas se permettre de serrer la main aux Israéliens, tout en tournant le dos aux Palestiniens. Car ils risqueraient de fâcher leur propre opinion publique, et le reste des pays arabes, toujours hostiles à un rapprochement avec l’État hébreu. « Cette visite officielle des Saoudiens en Cisjordanie, a donc un objectif : montrer leur attachement à la cause palestinienne », poursuit cette même source.
Au cours d’une interview à la chaîne américaine Fox News, la semaine dernière, le prince héritier d’Arabie saoudite, Mohammed ben Salman a aussi insisté sur le fait que la cause palestinienne reste « très importante » pour Riyad. Le royaume multiplie d’ailleurs ces dernières semaines les condamnations contre « les pratiques provocatrices répétées menées […] à la mosquée al-Aqsa sous la protection des forces d’occupation israéliennes ».
Dans le même temps, Washington s’active et joue le rôle de médiateur entre les deux pays qui ne sont pas sur la même longueur d’onde sur la question palestinienne. La partie saoudienne continue en effet de défendre une solution à deux États et de ce fait ne reconnaît pas Israël. Israël occupe la Cisjordanie depuis 1967 et soumet la bande de Gaza à un strict blocus depuis que le mouvement islamiste palestinien Hamas y a pris le pouvoir en 2007, deux ans après qu’Israël s’en était retiré unilatéralement.
Mais les Saoudiens ont bien compris que cette condition était irréalisable. Alors, ils vont essayer d’obtenir quelques avancées, pour améliorer la vie des Palestiniens. Pour le reste, ils défendent leurs propres intérêts. C’est-à-dire, obtenir des Israéliens et des Américains, le feu vert pour développer un programme nucléaire.
À la tribune des Nations unies à New York, Benjamin Netanyahu a rappelé la normalisation des relations d’Israël avec les Émirats arabes unis et Bahreïn en 2020 et déclaré : « Nous sommes proches d’une avancée encore plus spectaculaire, une paix historique entre Israël et l’Arabie saoudite ». D’autant plus que MBS, homme fort de Riyad, avait déclaré que le royaume « se rapproche tous les jours » d’un accord avec Israël.
Les Palestiniens, de leur côté, avaient dénoncé un « coup de poignard dans le dos », lors de la normalisation des relations entre Israël, les Émirats arabes unis et Bahreïn, en 2020. Aujourd’hui, l’Autorité palestinienne adopte une approche plus pragmatique. « À l’époque, la normalisation s’est faite sans nous. Résultat : nous n’avions rien obtenu. Cette fois-ci, nous voulons faire partie de l’accord. Nous aurons des miettes, mais c’est mieux que rien », conclut la source palestinienne.