Les forces ukrainiennes ont ciblé une station de compression du gazoduc Turkish Stream, près d’Anapa, a déclaré lundi 13 janvier le ministère de la Défense. « Le 11 janvier 2025, le régime de Kiev, afin d’interrompre l’approvisionnement en gaz des pays européens, a tenté une attaque à l’aide de neuf drones de type avion sur l’infrastructure de la station de compression Rousskaïa dans la localité de Gaï-Kodzor (région de Krasnodar), qui assure l’approvisionnement en gaz via le gazoduc Turkish Stream », signale le communiqué du ministère publié sur sa chaîne Telegram. Selon la même source « il n’y a pas de victimes parmi le personnel » de la station, néanmoins la « chute de débris de drones » aurait causé des « dégâts mineurs ».
L’armée russe annonce quotidiennement intercepter des drones ukrainiens au-dessus des territoires frontaliers de l’Ukraine. Le 11 janvier au matin, le ministère de la Défense avait ainsi rapporté que 16 drones ukrainiens avaient été détruits au-dessus de la région de Krasnodar.
L’annonce de cette attaque ukrainienne a notamment fait réagir à Budapest. « Toute action qui menace la sécurité de notre approvisionnement énergétique doit être considérée comme une attaque contre la souveraineté » a déclaré Peter Szijjarto, chef de la diplomatie hongroise, dans un message publié sur Facebook, soulignant que ce gazoduc « est essentiel à l’approvisionnement en gaz naturel de la Hongrie et de l’Europe centrale ». Dmitri Peskov, porte-parole du Kremlin ; a dénoncé un acte de « terrorisme énergétique ». Le gazoduc Turkish Stream a été lancé en janvier 2020 et a une capacité annuelle de 31,5 milliards de mètres cubes. Sa section sous-marine s’étend sur 930 kilomètres, la station Rousskaïa servant de point de départ sur le territoire russe. Les tronçons du gazoduc desservent la Turquie, le sud et le sud-est de l’Europe. Pour ces derniers, le gaz est acheminé via l’Ukraine.
Le géant énergétique russe Gazprom a annoncé l’arrêt du transit du gaz russe à travers l’Ukraine le 1er janvier 2025, à la suite du refus de Kiev de prolonger les accords correspondants. Le contrat sur le transit du gaz russe entre l’Ukraine et la Russie avait été signé en 2019 pour cinq ans avec une option de prolongation de dix ans. Un contrat que Kiev n’a pas voulu prolonger au-delà du 31 décembre 2024.
Les ministres russe et turc des Affaires étrangères ont eu dimanche un entretien téléphonique consacré surtout à l’importance d’un dialogue national inclusif en Syrie et à la situation en Ukraine, a annoncé le ministère russe des Affaires étrangères.
Sergueï Lavrov et Hakan Fidan ont « étudié les moyens de contribuer au règlement de la situation en Syrie au moyen d’un dialogue national inclusif en Syrie qui engagerait️ toutes les forces politiques, ethniques et confessionnelles et ️les acteurs extérieurs capables de contribuer à trouver des solutions », a indiqué le ministère dans un communiqué.
Évoquant l’Ukraine, ils ont insisté sur la nécessité d’empêcher les actions qui pourraient créer des risques pour la sécurité énergétique. Ils ont également échangé leurs points de vue sur d’autres dossiers internationaux comme régionaux.
Explosion du prix du baril
A signaler que le cours du pétrole a atteint son plus haut niveau depuis l’été dernier dans le contexte des nouvelles sanctions US contre le pétrole russe. Pour la troisième journée consécutive, le prix à terme du brut de la mer du Nord (Brent) a augmenté lundi 13 janvier. A la mi-journée, a rapporté l’agence Reuters, celui-ci s’établissait à 80,47 dollars le baril, au plus haut depuis fin août 2024. Même chose pour le brut américain West Texas Intermediate (WTI) qui a gagné 94 cents pour atteindre 77,97 dollars le baril.
Le 10 janvier, les États-Unis ont imposé de nouvelles sanctions contre le secteur énergétique russe. Les restrictions affecteront plus de 200 entreprises, 180 navires et plusieurs dirigeants. Parmi les cibles figurent des géants tels que Gazprom Neft, Surgutneftegas et Rosatom, ainsi que leurs nombreuses filiales. Des entreprises également sanctionnées par Londres. Ces mesures sont les « sanctions les plus importantes » à l’encontre du secteur, avait alors annoncé Daleep Singh, directeur du Conseil économique national des États-Unis, affirmant que ces nouvelles sanctions coûteraient «des milliards de dollars par mois» à la Russie. « Les revenus pétroliers sont le moteur de l’économie de guerre de Poutine », avait pour sa part affirmé David Lammy, ministre britannique des Affaires étrangères. « La lutte contre les compagnies pétrolières russes dévastera le budget militaire de la Russie, et chaque rouble que nous prenons des mains de Poutine aide à sauver des vies ukrainiennes », avait-il ajouté. Bloomberg a rapporté que les raffineurs chinois indépendants avaient tenu des « réunions d’urgence » pour vérifier et étudier la possibilité de s’approvisionner en brut lorsque les nouvelles sanctions anglo-américaines ont été annoncées. En Inde, les responsables des raffineries ont déclaré qu’ils se préparaient à des perturbations majeures des importations qui pourraient durer jusqu’à six mois. La Hongrie, qui continue d’acheter du brut russe, organisera des discussions avec ses alliés pour contrer cette hausse des prix. « Ce train de sanctions pose à nouveau de graves problèmes à l’Europe centrale », a déclaré le 12 janvier P. Szijjarto chef de la diplomatie hongroise. Celui-ci s’attend à ce que la réduction de l’offre de brut stimule la demande de carburants raffinés, augmentant ainsi les risques de hausses de prix « très sérieuses » dans la région. Reuters cite Tamas Varga, analyste auprès de l’entreprise de courtage PVM Oil Associates, qui déclare que « le scénario le plus pessimiste pour le pétrole russe semble réaliste ». Dans le même temps, a-t-il ajouté, « on ne sait pas ce qui se passera lorsque Donald Trump entrera en fonction ».
Terrain conquis à Donetsk
Alors que l’Ukraine parle du ciblage de plusieurs objectifs économiques et militaires à l’intérieur du territoire russe, les forces armées russes ont pris le contrôle de deux localités de la République populaire de Donetsk, a annoncé mardi 14 janvier le ministère russe de la Défense. Il s’agit de la prise de contrôle des localités de Neskoutchnoïé et de Terny. Prise par le groupement de troupes Ouest, Terny était contrôlé par l’armée russe en 2022, mais l’armée ukrainienne était parvenue à prendre le village lors d’une contre-offensive en octobre de la même année. L’armée ukrainienne est entrée dans Neskoutchnoïé lors d’une contre-offensive à l’été 2023. Elle a été reprise par les forces du groupement Est. « L’agglomération de Neskoutchnoïé, Vremevka et Velikaïa Novoselka est située à la jonction des frontières de la DNR et de la région de Zaporojié et constitue un centre de défense et de logistique d’importance stratégique pour les forces armées ukrainiennes, qui passe progressivement sous le contrôle de nos unités », a indiqué le ministère de la Défense.
La veille, le ministère de la Défense avait annoncé la prise de la localité de Pestchanoïé, située à sept kilomètres au sud-ouest de Pokrovsk. Cette ville, qui compte encore 10 000 habitants, est considérée comme stratégique pour Kiev, notamment parce qu’elle abrite la seule mine de coke, ce charbon coûteux nécessaire à la fabrication de l’acier, encore sous contrôle de Kiev. La mine avait cessé de produire en raison de la proximité des forces russes, selon ce qu’avait rapporté Reuters le 13 janvier.
Le FSB a annoncé le même jour avoir déjoué une tentative ukrainienne d’empoisonner les employés d’une entreprise de l’industrie de la défense russe dans la région de Iaroslavl. « Un citoyen russe a été arrêté après avoir saisi deux conteneurs contenant des substances chimiques dangereuses provoquant des brûlures des voies respiratoires et pouvant avoir d’autres conséquences mortelles, qu’il prévoyait de verser dans les conduits d’aération des voitures des employés de ladite entreprise », a écrit le centre de relations publiques du FSB. Selon le détenu lui-même, il a été contacté en décembre par le représentant ukrainien sur Telegram. Les « conservateurs » lui auraient déjà versé 10 000 roubles (94 euros) pour une étude préliminaire de la zone. L’agence a également rapporté que les services spéciaux ukrainiens auraient déjà tenté à trois reprises de commettre des actes similaires à l’encontre de militaires russes. Dans la ville d’Armavir, dans la région de Krasnodar ainsi qu’à Saint-Pétersbourg, des agents recrutés par les services de sécurité ukrainiens ont tenté d’empoisonner des denrées alimentaires.
Dans son communiqué, le FSB a souligné, qu’en février 2024, un attentat des services de sécurité ukrainiens dans la région de Zaporojié, au cours de laquelle une substance analogue au « BZ » devait être utilisée, a été déjoué. Des substances «développées aux États-Unis» avaient alors été saisies sur trois détenus, a déclaré le FSB. Le BZ, ou benzilate de 3-quinuclidinyle, est un agent chimique dont les États-Unis ont annoncé la destruction des stocks en 1990 et qui a été largement utilisé durant la guerre du Viêt Nam. Néanmoins, comme l’a noté en février 2023 Igor Kirillov, chef des troupes russes de protection NBC, « les États-Unis ont conservé la possibilité de synthétiser des précurseurs de l’agent chimique psychotrope de guerre BZ sur la base d’installations de production pharmaceutique à hauteur de plusieurs dizaines de tonnes par an » . Comme le souligne RIA Novosti, bien que l’empoisonnement par cette substance n’entraîne généralement pas d’issue fatale, il affecte les capacités sensorielles. « Les personnes affectées perdent le sens de l’orientation, il y a des phénomènes d’agitation psychomotrice, remplacés périodiquement par des hallucinations. Le contact avec le monde environnant est perdu, et la personne affectée peut ne pas être en mesure de distinguer la réalité des perceptions illusoires qui se produisent dans son esprit ». En outre, la personne affectée finit par présenter une « folie avec des périodes de perte de mémoire partielle ou complète ».
En avril 2018, S. Lavrov a déclaré que la substance BZ aurait pu être utilisée dans l’empoisonnement de l’ancien espion Sergueï Skripal et de sa fille Ioulia dans la ville britannique de Salisbury. Le ministre russe faisait référence au centre suisse d’analyse radiologique et chimique-bactériologique de la ville de Spitz, qui a analysé les échantillons de l’OIAC prélevés sur les lieux de l’incident. Le 13 septembre, Vassili Nebenzia, représentant permanent de la Russie auprès des Nations unies, a déclaré lors d’une réunion du Conseil de sécurité des Nations unies que la Russie « attend toujours que les États-Unis, le pays qui abrite actuellement la seule installation pilote de production de BZ de la planète, expliquent comment l’agent de guerre chimique s’est retrouvé en possession des saboteurs ukrainiens ».