« Il n’y pas de possibilité pour (Poutine) de gagner », a ajouté le locataire de la Maison Blanche alors que les forces ukrainiennes mènent actuellement une contre-offensive dans le sud et l’est du pays dont le succès est pour le moins mitigé. Pour J. Biden, c’est cette même contre-offensive qui poussera le président russe à la table des négociations. « J’espère, et c’est mon attente, que l’Ukraine fera des progrès significatifs dans son offensive et que cela débouchera sur un règlement négocié à un moment ou à un autre », a déclaré le dirigeant US.
« Il pourrait finir la guerre demain, il n’aurait qu’à dire : « j’arrête » », a déclaré le président américain lors de sa visite en Finlande au lendemain du sommet de l’Otan qui s’est conclu par une invitation, sans calendrier, adressée à l’Ukraine de rejoindre l’organisation transatlantique.
Et face à la déception des alliés ukrainiens de ne pas disposer d’échéancier de l’intégration de l’Ukraine dans l’alliance, J. Biden a réaffirmé la volonté des Occidentaux en soulignant que « la question n’est pas de savoir s’ils doivent ou non adhérer à l’Otan, (mais) quand ils pourront adhérer, et ils adhéreront à l’Otan ».
Les déclarations de l’Otan, cible privilégiée de V. Poutine, n’ont pas laissé les autorités russes de marbre. « Je suis certain que cela n’améliorera pas la sécurité de l’Ukraine et que, d’une manière générale, cela rendra le monde beaucoup plus vulnérable et mènera à des tensions supplémentaires sur la scène internationale », a déclaré le chef du Kremlin. La riposte de Moscou a pris la forme d’une série d’attaques aériennes sur l’Ukraine. L’Ukraine a, quant à elle, revendiqué la destruction de 20 drones explosifs et de deux missiles de croisière russes.
La Russie a aussi répondu jeudi que la livraison d’avions de combat F-16 occidentaux serait perçue comme une menace « nucléaire ». Elle a rapidement été balayée par le président américain. « Je ne crois pas qu’il y ait une réelle perspective (…) que Poutine utilise l’arme nucléaire. Non seulement l’Occident, mais aussi la Chine et le reste du monde ont dit: “n’allez pas sur ce terrain-là”», a rétorqué J. Biden, au côté du président finlandais Sauli Niinistö. Concernant les missiles occidentaux livrés à l’Ukraine, « ils causent certes des dégâts, mais rien de déterminant ne se produit dans les zones de combat où ils ont été utilisés. Il en va de même pour les chars de fabrication étrangère », a déclaré le président Poutine à la télévision publique.
Selon l’agence Bloomberg, les dirigeants européens auraient profité d’une absence de J. Biden lors d’un diner pour calmer le président ukrainien, qui aurait perdu son sang-froid faute de calendrier proposé à son pays pour rejoindre l’OTAN. « Vous devez vous calmer et regarder le package complet, a-t-on dit à Zelensky », relate l’agence américaine, qui cite une source ayant assisté à l’échange. Selon le média, qui dresse le « récit des querelles en coulisses » de ce sommet du bloc militaire occidental, les « Américains étaient particulièrement irrités » suite à une diatribe publiée par le président ukrainien sur les réseaux sociaux.
« Il semble qu’il n’y ait aucune volonté ni de donner à l’Ukraine une invitation à l’OTAN, ni d’en faire un membre de l’Alliance », avait tweeté dans la matinée du 11 juillet Volodymyr Zelensky. Jugeant « sans précédent et absurde » que son pays ne se soit pas vu proposé un calendrier d’adhésion, ce qui selon lui encouragerait Moscou à « continuer sa terreur » en Ukraine. Un tweet qui, selon Bloomberg, aurait eu un effet « contre-productif ». Le dirigeant ukrainien « a été accueilli par de franches critiques de la part de plusieurs autres dirigeants, qui ont clairement indiqué qu’il avait dépassé les bornes » relate, notamment, le média qui évoque les précédentes menaces formulées par V. Zelensky de ne pas assister à ce sommet si on ne lui offrait pas d’intégrer l’OTAN.
« Que ça plaise ou non, les gens veulent voir de la gratitude », avait déclaré mercredi Ben Wallace, ministre de la Défense britannique, exprimant à la presse britannique son mécontentement vis-à-vis des exigences du pouvoir ukrainien.
Même reproche du côté de la Maison Blanche, où Jake Sullivan, conseiller américain à la sécurité nationale, avait estimé « totalement infondées et injustifiées » les critiques que venait de lui adresser une militante anticorruption ukrainienne. « Que dois-je dire à mon fils ? Que le président Biden et l’OTAN n’ont pas invité l’Ukraine dans l’OTAN parce qu’il a peur de la Russie ? », avait interpellé l’activiste Daria Kalenyuk, lors d’un événement en marge du sommet de Vilnius. « Je pense que le peuple américain mérite un degré de gratitude », a notamment déclaré J. Sullivan, soulignant par ailleurs l’« énorme capacité » militaire fournie par Washington à Kiev. Une aide, militaire, chiffrée à plus de 100 milliards de dollars.
« Je ne comprends pas bien les questions. Nous avons toujours été reconnaissants et sommes toujours reconnaissants » avait déclaré V. Zelensky en fin de journée, lors d’une conférence de presse où il était interrogé sur les déclarations de B. Wallace. « Je ne sais tout simplement pas comment nous devrions être reconnaissants autrement. Nous pouvons nous réveiller le matin et remercier le ministre. Qu’il m’écrive comment être reconnaissant, et je serai reconnaissant », avait-il poursuivi.
Vadym Prystayko, ancien ministre ukrainien des affaires étrangères et actuel ambassadeur au Royaume-Uni, a qualifié dans un entretien à SkyNews de «malsaine » cette réaction sarcastique de V. Zelensky aux propos du ministre britannique de la défense. « Je pense qu’il y avait une certaine dose de sarcasme dans la réponse lorsque le président Zelensky a dit qu’il était prêt à se réveiller tous les matins et à appeler Ben Wallace pour le remercier », a déclaré V. Prystayko. «Je ne pense pas que ce sarcasme soit sain ». Selon l’ambassadeur, l’Ukraine et le Royaume-Uni ne devraient pas montrer à la Russie qu’il existe des différences entre eux.
B. Wallace a déclaré, mercredi, que le Royaume-Uni n’était « pas Amazon » quand il s’agit de fournir des armes à l’Ukraine. « Que ça plaise ou non, les gens veulent voir de la gratitude », a dit aux médias britanniques le ministre britannique. « Parfois il faut persuader des pays d’abandonner leurs propres stocks. Et oui, cette guerre est une guerre noble (…) mais parfois il faut convaincre des parlementaires aux Etats-Unis. Il faut convaincre des responsables politiques qui dans d’autres pays se demandent si ça en vaut la peine », a dit B. Wallace, cité par l’AFP.
La presse britannique rapporte que B. Wallace a aussi exprimé sa frustration quand, au cours d’un voyage en Ukraine l’an dernier, il a reçu une « liste » d’armes dont l’Ukraine avait besoin. « Vous savez, nous ne sommes pas Amazon. Je leur ai dit ça l’année dernière, quand j’avais roulé 11h pour qu’on me donne une liste », a-t-il précisé.
Également présent à Vilnius, Rishi Sunak, Premier ministre britannique, a tenté de calmer le jeu. « Le président Zelensky a exprimé sa gratitude pour ce que nous avons fait à de nombreuses occasions, notamment dans son allocution incroyablement émouvante au Parlement (britannique) plus tôt cette année », a-t-il dit au cours d’une conférence de presse.