« Vous avez trahi le régime de non-prolifération ; vous avez fait de l’AIEA un partenaire de cette guerre d’agression injuste », a écrit Esmaeil Baqaei, porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères, sur X, dans un message à l’adresse de Rafael Grossi, directeur de l’agence onusienne.
Le 12 juin, quelques heures avant le lancement de l’offensive israélienne contre l’Iran, l’AIEA avait accusé l’Iran, dans un rapport, de ne pas respecter ses obligations dans le cadre de son programme nucléaire. Tout soulignant que l’instance onusienne « n’est pas en mesure de garantir que le programme nucléaire iranien est exclusivement pacifique ».
Récemment, son chef est depuis revenu sur les doutes qu’il a laissé planer.
Dans une interview avec CNN mercredi, il a affirmé que l’agence « ne dispose d’aucune preuve que l’Iran cherche à se doter de l’arme nucléaire ». Sauf que le coup est déjà parti ! « Ce que nous avons appris et ce qui a été rapporté, c’est que nous n’avons aucune preuve d’une tentative systématique de l’Iran d’obtenir une arme nucléaire », a-t-il ajouté. « Nous avons affirmé dans mon rapport il y a une semaine que bien que l’Iran soit le seul pays au monde qui est en train d’enrichir l’uranium à des niveaux presque militaires (…) on n’est pas en capacité de dire qu’il existe un effort direct vers la fabrication d’une arme nucléaire », avait fait savoir mercredi R. Grossi, sur France 24.
Commentant ces déclarations, le porte-parole iranien a estimé que cet « aveu était trop tardif », l’accusant d’avoir dissimulé ce fait dans son rapport « partial », qui a ouvert la voie à une résolution contre l’Iran par les États-Unis et trois pays européens. « Cette résolution a ensuite servi de prétexte à une entité occupante et un criminel de guerre pour lancer une agression illégale contre les installations nucléaires pacifiques de l’Iran ». et le diplomate iranien d’ajouter : « Savez-vous combien d’Iraniens innocents ont été tués ou blessés à cause de cette guerre criminelle ? Est-ce le critère à l’aune duquel un employé international censé diriger une organisation des Nations Unies devrait être évalué ? »
Le porte-parole a conclu sa déclaration en déclarant : « Les récits trompeurs ont des conséquences dévastatrices, et vous devez en assumer la responsabilité. Avez-vous encore un peu de conscience ? »
Mohammad Javad Zarif, ex-ministre iranien des AE, s’en est lui aussi pris jeudi au directeur général de l’AIEA. « Le rapport irresponsable et trompeur de l’AIEA a causé des dommages irréparables à l’agence. Il devrait être poursuivi pour complicité dans la mort de personnes innocentes en Iran suite à l’agression israélienne, en utilisant ses rapports comme prétexte », a-t-il fait savoir.
À l’initiative de Berlin, Paris et Londres, des négociations sur le nucléaire iranien pourraient s’ouvrir le 20 juin à Genève, en pleine escalade militaire entre Israël et l’Iran. Coordonné avec Washington, ce dialogue vise, selon Reuters, à ramener Téhéran à la table des discussions et à éviter un embrasement régional.
Les ministres des Affaires étrangères d’Allemagne, de France et du Royaume-Uni doivent rencontrer leur homologue iranien le 20 juin à Genève, dans le cadre d’un effort diplomatique destiné à relancer les négociations sur le programme nucléaire de Téhéran. Selon une source diplomatique allemande citée par Reuters, une réunion préparatoire est prévue avec Kaja Kallas, la Haute Représentante de l’Union européenne pour les affaires étrangères, dans les locaux de la mission permanente allemande. Cette initiative européenne, envisagée sur terrain neutre, intervient dans un contexte de fortes tensions : Israël poursuit ses bombardements contre l’Iran, qui répond par des tirs de missiles, alimentant la crainte d’un embrasement régional.
Selon Reuters, les discussions avec l’Iran devraient être coordonnées avec les États-Unis, dans l’objectif de garantir le caractère strictement civil du programme nucléaire iranien. Un dialogue technique entre experts est également envisagé à la suite de cette rencontre. Washington et Téhéran ont tenu, ces dernières semaines, des pourparlers indirects sous médiation omanaise, qui ont achoppé sur la question sensible de l’enrichissement de l’uranium.
Si l’Iran a récemment atteint des niveaux proches du seuil militaire, il se dit prêt à revenir aux paramètres de l’accord de Vienne de 2015, sans pour autant renoncer à ses capacités d’enrichissement.
Selon plusieurs médias européens, Johann Wadephul, ministre allemand des Affaires étrangères, a transmis à Ayman al-Safadi, son homologue jordanien, le 18 juin à Berlin, une offre de négociation destinée à Téhéran. Ce texte aurait été mis au point avec ses homologues français, et britannique, ainsi qu’avec K. Kallas, à l’issue d’un entretien téléphonique tenu le 16 juin. J. Wadephul a appelé l’Iran à « prendre des mesures de confiance vérifiables », citant notamment des garanties sur l’absence d’intention militaire. « Il n’est jamais trop tard pour revenir à la table des négociations, à condition d’y venir avec des intentions sincères », a-t-il déclaré.