Les Etats-Unis ont opposé leur veto, mercredi, à un projet de résolution du Conseil de sécurité de l’ONU qui appelait à un « cessez-le-feu immédiat, inconditionnel et permanent » dans la Bande de Gaza. Le projet de résolution exprimait « une grave préoccupation quant à la situation humanitaire catastrophique, y compris le risque de famine », et rappelait les obligations de toutes les parties à respecter le droit international humanitaire et les normes en matière de droits de l’homme.
La Slovénie a proposé le projet de résolution au nom des 10 membres élus du Conseil de sécurité – Algérie, Danemark, Grèce, Guyane, Panama, Pakistan, République de Corée, Sierra Leone, Somalie et Slovénie – et a recueilli 14 voix.
Dorothy Shea, chargée d’affaires par intérim des États-Unis, a déclaré avant le vote que « l’opposition des États-Unis à cette résolution ne devrait pas être une surprise ». « Elle est inacceptable pour ce qu’elle dit, elle est inacceptable pour ce qu’elle ne dit pas, et elle est inacceptable pour la manière dont elle a été avancée », a-t-elle ajouté. « Tout projet qui porte atteinte à la sécurité d’Israël, notre proche allié, est un non-sens », a-t-elle martelé.
La diplomate US a une fois de plus affirmé qu’« Israël a le droit de se défendre » et a déclaré qu’« il est inadmissible que l’ONU n’ait toujours pas qualifié le Hamas d’organisation terroriste et ne l’ait pas sanctionné ». Oubliant au passage le droit de la résistance des peuples opprimés, ce qui est le cas en Palestine occupée.
Les États-Unis avaient déjà opposé leur veto à quatre projets de résolution du Conseil de sécurité appelant à un cessez-le-feu urgent à Gaza, la résolution de mercredi étant le cinquième veto.
Les États-Unis ont opposé leur veto à des résolutions en octobre 2023, décembre 2023, février 2024 et novembre 2024, tout en s’abstenant lors de votes sur d’autres projets de résolution.
Silencieux sur ce dossier depuis un an, le Conseil peine à parler d’une seule voix depuis le début de la guerre entre Israël et la résistance palestinienne, le Hamas en tête, bloqué plusieurs fois par des vétos américains, mais aussi russes et chinois. Dans ce contexte, il n’a pas tenté de sortir du silence depuis novembre, lorsque les Etats-Unis de Joe Biden avaient bloqué un texte réclamant un cessez-le-feu. La dernière résolution du Conseil date de juin 2024: il s’agissait du soutien à un plan américain de cessez-le-feu en plusieurs phases accompagnées de libérations d’otages, cessez-le-feu qui ne s’était pas matérialisé avant janvier 2025.
Après plus de deux mois et demi de blocage, Israël autorise à nouveau depuis le 19 mai l’entrée à Gaza d’une quantité limitée de camions de l’ONU, qui parle d’une « goutte d’eau » dans l’océan des besoins dans le territoire ravagé par 20 mois de guerre.
En parallèle, la Fondation humanitaire de Gaza (GHF), organisation au financement opaque soutenue par Israël et les Etats-Unis, a mis en place des centres de distribution d’aide dénoncés par l’ONU comme contraires aux principes humanitaires. Plusieurs drames ont eu lieu ces derniers jours près de ces centres, faisant des dizaines de morts, les Nations unies les ont décrits comme des « pièges mortels » où des Palestiniens affamés sont forcés à marcher « entre des barbelés », entourés par des gardes privés armés.
« Nous serons tous jugés par l’Histoire sur ce que nous avons fait pour stopper ce crime contre le peuple palestinien », a déclaré mardi Riyad Mansour, ambassadeur palestinien à l’ONU, appelant le Conseil à agir. En cas de véto, la pression « sera sur ceux qui empêchent le Conseil de sécurité de prendre ses responsabilités », a-t-il insisté.
Danny Danon, ambassadeur israélien à l’ONU, fustige de son côté le projet de texte. « Cette résolution ne fait pas avancer l’assistance humanitaire. Elle la sape. Elle ignore un système qui fonctionne pour favoriser un objectif politique », va-t-il déclarer au Conseil, selon des propos diffusés par ses services. « Elle ignore la seule partie qui met toujours en danger les civils de Gaza: le Hamas ».
Le Madleen traqué
Par ailleurs, l’armée d’occupation israélienne a fait savoir qu’elle ne compte pas autoriser le navire Madleen, qui transporte 12 militants propalestiniens, dont l’activiste Greta Thunberg et la députée Rima Hassan, à approcher ou accoster dans la bande de Gaza, a confirmé au Jerusalem Post une source militaire. Israel Katz, ministre de la guerre, doit prendre des décisions supplémentaires jeudi.
Le navire, qui devrait arriver autour du 8 juin, a quitté la Sicile dimanche dans le cadre de l’initiative de la Freedom Flotilla Coalition. Il transporte aux Gazaouis menacés par la famine due au blocus israélien: du lait en poudre pour bébés, des couches, de la farine, du riz, des filtres à eau, des produits d’hygiène et du matériel médical.
Les militants à bord affirment que des drones de reconnaissance israéliens traquent le navire. Le site d’information israélien Walla, citant des sources militaires, a affirmé que « l’armée se prépare à manifester par l’intermédiaire des forces de sécurité déployées dans la zone », précisant que, compte tenu des expériences précédentes, « un message direct sera envoyé à l’équipage du navire pour lui demander de ne pas pénétrer dans la zone ». Ces sources ont ajouté que « l’unité de commando naval Shayetet 13 et les unités de vedettes lance-missiles se préparent à mener une opération de commando pour saisir le navire et arrêter les militants à bord ».
Avant le départ, G. Thunberg avait déclaré aux journalistes : « Peu importe à quel point cette mission est dangereuse, elle n’est nulle part aussi dangereuse que le silence du monde entier face aux vies qui subissent un génocide. »
Rappelons que plus de 54.000 Palestiniens, dont une majorité d’enfants et de femmes, sont tombes en martyre depuis le début de la guerre génocidaire israélienne contre Gaza le 7 octobre 2023.
Pour sa part la chaîne KAN a rapporté qu’Israël avait initialement envisagé d’autoriser l’accostage après que les responsables sécuritaires ont déterminé que le navire ne représentait pas une menace. Mais ils se sont ravisés. Le général de brigade Effie Defrin, porte-parole de l’armée d’occupation israélienne, a averti lors d’une conférence de presse que « Tsahal est préparé à opérer sur tous les fronts, y compris dans l’arène maritime. Nous agirons en conséquence. »
La Cisjordanie visée aussi
Les forces d’occupation israéliennes ont poursuivi mercredi soir leur agression contre le gouvernorat de Tulkarem, dans le nord de la Cisjordanie. Elles ont mené une vaste campagne de perquisitions et d’arrestations dans la banlieue d’Aktaba, à l’est de la ville, ciblant plusieurs habitations et commerces. Pas moins de 22 habitations ont été perquisitionnées ainsi que huit commerces, notamment autour du rond-point du centre de la banlieue, dans le vieux quartier d’Al-Mukhtar et aux abords du conseil municipal. Ces zones ont été le théâtre d’actes de vandalisme organisés : les soldats ont saccagé le contenu des habitations, défoncé les portes de plusieurs maisons vides et les ont fouillées brutalement.
Les forces d’occupation ont également arrêté et fouillé des citoyens sur place, et ont procédé à des contrôles approfondis de leurs cartes d’identité et de leurs téléphones portables. Elles ont également fermé la rue principale menant à l’agence de taxis d’Aktaba depuis l’après-midi, paralysant presque totalement la circulation dans le secteur. Ils ont également confisqué les images des caméras de surveillance d’une pharmacie.
Cette campagne s’inscrit dans le contexte d’une escalade systématique à Tulkarem, qui subit depuis des semaines des raids répétés ciblant ses quartiers et ses camps, notamment le camp de Nour Shams, où les forces d’occupation ont démoli, dans la matinée, plusieurs bâtiments résidentiels.
Dans la soirée, des dizaines de colons ont attaqué des maisons de citoyens dans la ville de Deir Dibwan, à l’est de Ramallah, incendiant trois maisons, ainsi que le quartier d’Abou Shehadeh, situé à l’entrée ouest de la ville, plusieurs véhicules et des enclos à chevaux et à moutons.
Des sources ont indiqué à l’agence de presse palestinienne WAFA que « les colons ont assiégé plusieurs citoyens à l’intérieur de leurs maisons, empêchant les jeunes hommes, les ambulances et les camions de pompiers d’atteindre la zone. Ils ont également jeté des pierres sur les véhicules qui passaient dans la rue principale adjacente à la ville ». L’agence a ajouté que « l’attaque a fait dix blessés parmi les citoyens ».
Des colons de l’avant-poste colonial, colonies construites sur des terres des villes de Deir Dibwan et de Burqa, ont également attaqué des maisons et des biens appartenant à des habitants du village voisin de Beitin, et ont tenté d’en incendier plusieurs.
Selon des sources de l’Agence de presse palestinienne, les forces d’occupation ont assuré la protection des colons, fermant l’entrée de la ville et empêchant les habitants d’y entrer ou d’en sortir.