« Dans la nuit, une frappe a touché le pont de Tchongar. Il n’y a pas de victimes », a déclaré Sergueï Aksionov, gouverneur russe de la Crimée, ajoutant que les dégâts étaient en train d’être évalués et appelant les habitants au calme. Ce pont permet de relier la Crimée à une zone de la région de Kherson.
Cette frappe rapportée par les autorités russes intervient alors que les forces ukrainiennes mènent depuis début juin des actions offensives sur plusieurs secteurs du front, notamment dans le sud de l’Ukraine. La Crimée sert notamment de base arrière logistique aux forces russes déployées dans le sud de l’Ukraine.
Si S. Aksionov n’a mentionné qu’un seul pont touché, un responsable russe à Kherson a fait état de plusieurs infrastructures touchées, sans donner de détails. Les forces de Kiev ont « bombardé des infrastructures civiles : des ponts à la limite administrative entre la région de Kherson et la Crimée près de Tchongar », a déclaré Vladimir Saldo, responsable à Kherson. Il a publié des photos montrant un pont dont la chaussée est creusée par un cratère et affirmé que, selon les « premières estimations », les forces de Kiev ont utilisé des missiles britanniques Storm Shadows.
Il n’était pas possible de vérifier ces affirmations de manière indépendante. La Crimée est régulièrement visée par des attaques ukrainiennes, notamment de drones. En octobre 2022, une puissante explosion avait gravement endommagé le seul pont reliant directement la Crimée annexée à la Russie.
Connu comme la « porte de Crimée », le pont de Tchongar relie la Crimée à l’autre région partiellement annexée par les russes en septembre dernier : celle de l’oblast de Kherson. Il offre une alternative à l’étroite bande de terre qui connecte la Crimée au continent. Il y a par ailleurs deux autres ponts dans cette zone au nord de la Crimée. Pour l’Ukraine, détruire ce pont pourrait lui donner un avantage dans la reprise de la péninsule et être un levier dans de futures négociations.
Depuis Londres, Denys Chmygal, Premier ministre ukrainien, a déclaré en marge de la conférence internationale pour la reconstruction de l’Ukraine que l’armée ukrainienne n’entend pas lâcher. « Nous effectuerons des opérations offensives intelligentes, et pour cette raison, (la contre-offensive) prendra du temps ». « Nous nous battons selon les règles de l’Otan », a encore ajouté le Premier ministre, affirmant que l’armée ukrainienne n’abandonnait « aucun soldat » sur le terrain, à l’inverse des Russes qui « ne comptent pas les vies humaines ». « La contre-offensive est composée de nombreuses opérations militaires, certaines sont offensives, d’autres sont défensives », a détaillé D. Chmygal, ajoutant que « malheureusement, pendant notre préparation pour cette contre-offensive, les Russes se sont aussi préparés. Il y a tellement de champs de mines que cela ralentit beaucoup l’avancée » des troupes. « Je suis totalement optimiste sur la libération de nos territoires occupés par les Russes », a insisté le responsable ukrainien, présent à Londres depuis mercredi pour convaincre les investisseurs étrangers publics et privés de contribuer à la reconstruction de l’Ukraine. Interrogé sur la perspective d’une adhésion de l’Ukraine à l’Otan, D. Chmygal a affirmé attendre des éléments « concrets » des membres de l’alliance lors du prochain sommet de Vilnius en juillet. « Nous attendons que durant le sommet de Vilnius, les alliés soient très concrets sur les conditions, les délais, dans leurs messages », a-t-il notamment déclaré.
Mercredi 21 juin, dans une interview à la BBC, Volodymyr Zelensky, président ukrainien, a admis que les progrès de cette offensive étaient « plus lents que désiré ». « Certaines personnes pensent que c’est un film hollywoodien et attendent des résultats maintenant. Ce n’est pas le cas », a-t-il encore affirmé. De son côté, la Russie a affirmé, jeudi 22 juin, que les forces ukrainiennes avaient réduit leurs opérations dans le sud et l’est après avoir subi des pertes lors de cette contre-offensive.
Le ministre russe de la Défense a affirmé jeudi 22 juin que les forces ukrainiennes avaient réduit leurs opérations dans le sud et l’est de l’Ukraine et qu’elles étaient en train de se « regrouper » après avoir subi des pertes lors de leur offensive. « Après avoir mené activement les hostilités au cours des 16 derniers jours, subissant des pertes significatives, l’ennemi a réduit son activité et est en train de regrouper [ses forces] », a précisé Sergueï Choïgou, lors d’une réunion du Conseil de sécurité russe en présence de Vladimir Poutine.
« Le potentiel offensif de l’adversaire n’est pas épuisé », a relevé le président russe, qui déclare pourtant depuis deux semaines que la contre-offensive ukrainienne est un échec. Des « réserves stratégiques ne sont pas employées, et je demande que cette réalité soit prise en compte dans l’élaboration du travail de combat », a-t-il encore déclaré.
S. Choïgou a par ailleurs affirmé que l’aide militaire occidentale à l’Ukraine n’avait « pas d’influence significative sur le déroulement des opérations militaires ». « Nous ne voyons là pas de menace, d’autant que nous formons activement des réserves », a-t-il ajouté. Engagée depuis plusieurs semaines dans une contre-offensive à de multiples endroits du front, l’Ukraine a revendiqué la prise de huit villages le 19 juin.