Les marchés financiers ne sont pas impressionnés par la décision de la Banque centrale turque. La question n’était pas de savoir si l’institution allait augmenter son principal taux. Le président R.T. Erdogan l’avait laissé entendre, tout en continuant de se dire opposé à une telle mesure. L’inconnue concernait l’ampleur de cette augmentation. Les observateurs les plus mesurés avaient prédit une augmentation de dix points, les plus optimistes prévoyaient le triple. Finalement, c’est une hausse très limitée de 8,5 % à 15 %, c’est-à-dire de 6,5 points, qui n’a pas convaincu les marchés.
Aux manettes, il y a Mehmet Simsek le nouveau ministre des Finances, partisan d’un retour à l’orthodoxie économique. Deniz Unal, spécialiste de l’économie turque au Cepi, indique que cette mesure ne suffira pas. « En augmentant les taux d’intérêt, on imagine attirer des capitaux. Cependant, cette augmentation est très en deçà de l’inflation. L’inflation officielle est de 40% et le taux d’intérêt est de 15%. Dans ces conditions-là, les investisseurs étrangers ne voudraient pas investir en Turquie parce qu’ils auraient des rémunérations négatives », explique-t-elle.
R.T. Erdogan est sur un fil. Entre récession ou baisse de l’inflation, le choix est difficile. Cette hausse des taux est un leurre, la stratégie ne changera pas, estime D. Unal. « Erdogan veut garder son électorat en lui accordant des avantages. Pour continuer cette croissance et pour que les gens achètent encore, lui, à travers les banques publiques, continue à distribuer de l’argent. Donc, il a besoin quand même de continuer, avec des taux d’intérêt pas trop élevés », poursuit-elle.
La livre turque continuait de perdre de la valeur par rapport au dollar après l’annonce de la Banque centrale. La chute s’est même accélérée et a rapidement atteint un plus bas historique, à un dollar pour 24 livres. Or, la perte de valeur de la livre est la principale raison de la forte hausse des prix que les Turcs subissent depuis bientôt deux ans.