L’avis rendu par la Cour internationale de justice (CIJ), qui siège à La Haye, n’est pas contraignant mais pourrait accroître la pression juridique internationale croissante l’entité sioniste qui mène une guerre génocidaire dans la bande de Gaza.
La CIJ conclut cet avis consultatif que « l’État d’Israël est dans l’obligation de mettre fin à sa présence illicite dans le territoire palestinien occupé dans les plus brefs délais », « de cesser immédiatement toute nouvelle activité de colonisation, et d’évacuer tous les colons du territoire palestinien occupé » et « de réparer le préjudice causé à toutes les personnes physiques ou morales concernées dans le territoire palestinien occupé ». Et ajoute que « les organisations internationales, y compris l’Organisation des Nations unies, sont dans l’obligation de ne pas reconnaître comme licite la situation découlant de la présence illicite de l’État d’Israël dans le territoire palestinien occupé ». La Cour prend par ailleurs « note avec une profonde inquiétude des informations indiquant que la politique de colonisation menée par Israël s’est accentuée depuis l’avis consultatif qu’elle a donné en 2004 ».
« C’est un grand jour pour la Palestine », a réagi Varsen Aghabekian Chahine, ministre déléguée aux Affaires étrangères de l’Autorité palestinienne. Cette décision représente « une victoire », s’est félicitée la présidence de l’Autorité palestinienne rapporte l’agence de presse officielle Wafa, demandant à Israël de « mettre fin à l’occupation » et aux « colonies ».
En Israël, un responsable du Likoud affirme que la juridiction de la Haye est le bastion du Hamas. Pour Itamar Ben Gvir et Betsalel Smotrich ministres d’extrême droite du cabinet Benyamin Netantahu, l’annexion pure et simple des territoires occupés devrait se faire sans plus attendre. Ils appellent à la « souveraineté maintenant » sur ces territoires déjà largement infestés de colonies de peuplement au détriment des ayant-droit historique. Du point de vue israélien, la décision de la CIJ équivaut au scénario du pire, même si le terme « apartheid » n’a pas été utilisé par les 15 juges de la Cour. En Israël, d’aucuns estiment que cet avis ouvre la voie à des mesures telles que le boycott et des sanctions contre le pays.
L’Assemblée générale des Nations unies avait adopté une résolution demandant à la CIJ un « avis consultatif » non contraignant sur les « conséquences juridiques découlant des politiques et pratiques d’Israël dans le territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est ». Cela concerne « l’occupation prolongée » du territoire palestinien depuis 1967. En juin 1967, Israël a mené la guerre des Six Jours, s’emparant de la Cisjordanie et de Jérusalem-Est au détriment de la Jordanie, du plateau du Golan au détriment de la Syrie, ainsi que de la bande de Gaza et de la péninsule du Sinaï au détriment de l’Egypte. Israël a ensuite commencé à occuper les 70 000 kilomètres carrés de territoires arabes saisis, occupation déclarée plus tard illégale par les Nations unies.
La plupart des intervenants ont appelé, lors d’audiences en février 2024, à ce qu’Israël mette fin à l’occupation qui a suivi la guerre des Six Jours, et certains ont averti qu’une occupation prolongée constituait un « danger extrême » pour la stabilité au Moyen-Orient et au-delà.
Des responsables palestiniens avaient accusé les occupants israéliens de diriger un système de « colonialisme et d’apartheid » et exhorté les juges à appeler à la fin de l’occupation « immédiatement, totalement et sans conditions ». L’ambassadeur sud-africain aux Pays-Bas avait, lui, déclaré aux juges que les politiques d’Israël dans les territoires palestiniens étaient une forme « encore plus extrême » de l’apartheid qu’a connu l’Afrique du Sud avant 1994. Washington avait pris la défense de son allié, affirmant qu’Israël ne devrait pas être légalement obligé de se retirer sans prendre en compte ses « besoins très réels en matière de sécurité ».
Ces audiences sont distinctes d’une affaire portée auprès de la CIJ par l’Afrique du Sud, qui accuse Israël de commettre des actes génocidaires à Gaza. En janvier 2024, la cour a appelé Israël à prévenir tout éventuel acte de génocide dans ce petit territoire palestinien. En mai 2024, elle a ordonné à Israël de mettre fin à son offensive militaire à Rafah.
Le jour du verdict de la CIJ, des colons israéliens ont attaqué, vendredi, la ville de Huwara, dans le nord de la Cisjordanie occupée, et pris pour cible des Palestiniens et leurs biens. L’agence Wafa a rapporté que « des colons, sous la protection des forces d’occupation israéliennes, ont attaqué aujourd’hui la ville de Huwara, au sud de Naplouse », tout en ajoutant que des « affrontements ont éclaté dans le centre de la ville de Huwara suite à une attaque des colons illégaux contre des citoyens pour les empêcher de rénover une boulangerie, fermée par les forces d’occupation depuis octobre dernier ». La même source a ajouté que « les forces d’occupation ont tiré des balles, des grenades assourdissantes et des gaz lacrymogènes sur les jeunes hommes, sans faire de blessés. » L’agence a rapporté que les colons « ont également attaqué les véhicules des citoyens avec des pierres ».
Des vidéos partagées sur les réseaux sociaux ont montré des colons, dont des hommes armés, en train d’attaquer des magasins, des maisons et des véhicules appartenant aux Palestiniens avec des pierres, sans que l’armée israélienne présente sur les lieux n’intervienne pour empêcher ces agressions. Des témoins oculaires ont déclaré à Anadolu que « l’attaque a été perpétrée par des dizaines de colons illégaux ».
Cet incident a eu lieu suite à la décision de la CIJ selon laquelle les Palestiniens « ont le droit à l’autodétermination, que les colonies israéliennes situées dans les territoires occupés doivent être évacuées » et que les colonies israéliennes « violent la Quatrième Convention de Genève. »
Selon la Commission de résistance contre le mur et la colonisation (gouvernementale), les colons ont mené un total de 1 334 attaques en Cisjordanie au cours du premier semestre 2024, causant la mort de citoyens. Selon les données du mouvement israélien de gauche « La paix maintenant », près d’un demi-million d’Israéliens résident dans 146 grandes colonies et 144 avant-postes de colonies établis en Cisjordanie, sans compter Jérusalem-Est occupée.