« Les Américains sont des gars très pragmatiques », a déclaré Dmitri Peskov, cité par l’agence TASS. Avant d’ajouter : « Naturellement, leur objectif principal est leur bien-être. » Le porte-parole de la présidence russe commentait ainsi les propos, tenus la veille, par le chef de la diplomatie US. Le 7 décembre, Antony Blinken a voulu s’adresser « au public américain », alors que le Congrès des États-Unis renâcle à débloquer l’aide militaire à l’Ukraine. Le Secrétaire d’Etat a plaidé en faveur d’une « situation gagnant-gagnant que nous devons poursuivre ». « Si vous regardez les investissements que nous avons faits dans la défense de l’Ukraine pour faire face à cette agression, 90% de l’aide à la sécurité que nous avons fournie a en fait été dépensée ici aux États-Unis auprès de nos fabricants, de notre production, et cela a produit plus d’emplois américains, plus de croissance dans notre propre économie », a déclaré le chef de la diplomatie US. Aux yeux de D. Peskov, une telle « politique américano-centrée » se fait « au prix de la vie des Ukrainiens ». « L’Ukraine doit comprendre qu’elle n’est pas la principale préoccupation des États-Unis. La principale préoccupation des États-Unis a toujours été les Américains eux-mêmes. Et même au prix d’un grand nombre de vies de ces mêmes Ukrainiens », assure D. Peskov.
« Ce sont les Américains qui gagnent des milliards et des milliards de dollars sur des ressources énergétiques coûteuses, sur le gaz qu’ils fournissent à l’Europe, sur le pétrole. Ce sont les Américains qui se fournissent des emplois, augmentent les recettes fiscales, chargent leur production de commandes d’obus, d’équipements militaires, etc.», a poursuivi le porte-parole du Kremlin. Une référence, notamment, à l’explosion des importations européennes d’hydrocarbures américains suite à la mise en place des sanctions occidentales début 2022.
Selon un communiqué du Pentagone le 6 décembre, les États-Unis « ont engagé plus de 44,2 milliards de dollars d’aide à la sécurité à l’Ukraine » depuis février 2022. Depuis plusieurs semaines, la Maison Blanche enjoint le Congrès des États-Unis à débloquer une enveloppe de 106 milliards de dollars d’aide militaire à l’Ukraine et à Israël, dont 61 rien qu’à l’Ukraine. Une aide rejetée le 6 décembre par les élus américains, après un précédent refus fin septembre d’allouer des fonds supplémentaires à l’Ukraine. « Nous avons tellement dépensé – des milliards et des milliards de dollars. Nous devons voir la transparence, savoir exactement où va cet argent et comment ils le dépensent », avait confié Michelle Steele, élue républicaine de Californie, à Voice of America. Pour inciter le Congrès à voter l’enveloppe, Joe Biden a déclaré que si Poutine s’emparait de l’Ukraine, « il ne s’arrêterait pas là » et qu’il attaquerait un pays de l’OTAN, allant jusqu’à brandir le spectre d’une guerre ouverte entre les États-Unis et la Russie. « Nous aurons quelque chose que nous ne recherchons pas et que nous n’avons pas aujourd’hui : des troupes américaines combattant des troupes russes », avait affirmé le président américain. Une « rhétorique provocatrice inacceptable pour une puissance nucléaire responsable », a réagi le 7 décembre l’ambassadeur russe à Washington. D. Peskov avait quant à lui fustigé une « diabolisation absolument flagrante » de la Russie « afin de manipuler leurs membres du Congrès et leurs sénateurs et continuer à brûler l’argent des contribuables américains dans le fourneau de la guerre en Ukraine ».
Pour rappel, un haut fonctionnaire américain a menacé de transformer l’année 2025 en cauchemar pour la Russie, si Moscou ne se mettait pas à la table des négociations dans des conditions favorables à Kiev.
Les déclarations de l’administration américaine sur le cauchemar qui attend Moscou en 2025 s’il n’y a pas de négociations aux conditions de Kiev doivent être prises avec des pincettes, a déclaré à Sputnik Alexandre Mikhaïlov, directeur du Bureau d’analyse militaro-politique. « Je pense qu’il est tout simplement impossible de se fier objectivement aux assurances, promesses et autres déclarations des représentants de l’administration Biden lorsqu’ils parlent de la période qui suivra l’automne 2024 », a-t-il indiqué.
Il a rappelé que le mandat de l’administration Biden était sur le point de s’achever et que des personnes comme Jon Finer, le secrétaire à la défense Lloyd Austin ou le secrétaire d’État Antony Blinken étaient toutes susceptibles d’être démises de leurs fonctions après la présidentielle de novembre 2024.
En effet, la Maison-Blanche est passée à une stratégie consistant à tenter de menacer la Russie pour qu’elle entame des pourparlers avec l’Ukraine.
« À la fin de l’année prochaine, la Russie doit être confrontée à une décision: soit elle s’assoit à la table des négociations dans des conditions acceptables pour l’Ukraine, soit elle se retrouve face à une Ukraine plus forte, soutenue par une base industrielle de défense plus solide aux États-Unis, en Europe et en Ukraine, qui aura plus de moyens pour passer à l’offensive », avait annoncé cette semaine Jon Finer, conseiller adjoint à la Sécurité nationale des États-Unis.
Selon lui, Washington et l’Europe renforceront leur industrie militaire et travailleront avec Kiev pour augmenter l’industrie de défense ukrainienne après 2024. Le fonctionnaire a souligné que si Moscou n’optait pas pour les négociations, il « souffrir[ait] sur le champ de bataille ».
A signaler que la défense aérienne russe a abattu, en une semaine, cinq avions de combat ukrainiens, trois MiG-29 et deux Su-25, a annoncé le ministère de la Défense. Un hélicoptère Mi-8 et 224 drones ont aussi été interceptés pendant cette période dans la zone de l’opération spéciale.