Une nouvelle vidéo diffusée mardi par le Hamas fait savoir aux Israéliens que le risque est grand de voir les prisonniers leur revenir dans des sacs mortuaires noirs plutôt que bien portant comme lors des échanges précédents. Les bombardements incessants sur la bande de Gaza expliquent cet état de fait. Abou Obeida, porte-parole des Brigades Al-Qassam, a indiqué que la résistance a perdu tout contact avec les éléments en charge d’assurer la garde des prisonniers. Avant d’assurer que via le feu roulant des bombardements, Benyamin Netanyahu cherche à s’affranchir du poids des prisonniers binationaux pour mieux achever sa sinistre besogne : le génocide des gazaouis. La veille, un responsable du Hamas a indiqué à l’AFP que la proposition israélienne sur un cessez-le-feu temporaire, transmise par les médiateurs égyptiens, évoque aussi une « fin permanente à la guerre » qu’Israël conditionne au désarmement du mouvement islamiste palestinien, « une ligne rouge (…) non négociable » pour celui-ci.
Une délégation du Hamas s’était rendue le week-end dernier au Caire pour des discussions avec des représentants de l’Egypte et du Qatar qui, avec les Etats-Unis, font office de médiateurs dans le conflit. Selon ce responsable, la proposition israélienne prévoirait « la libération de la moitié des otages » la première semaine après l’accord en échange d’un cessez-le-feu d’ « au moins 45 jours » et l’entrée d’aide dans le territoire palestinien. Pour mettre définitivement fin à la guerre qui dure depuis 18 mois, Israël exige, selon le même responsable, le désarmement du Hamas et de tous les groupes armés palestiniens à Gaza. « La position du Hamas et des factions de la résistance est que les armes de la résistance constituent une ligne rouge (…) non négociable », a-t-il souligné à l’AFP.
Dans un communiqué, le mouvement palestinien a indiqué que sa direction étudiait la proposition remise par les médiateurs et qu’elle « présentera sa réponse dès que les consultations nécessaires seront terminées ». « Nous ne renoncerons pas à (nos revendications sur) l’arrêt définitif de la guerre et le retrait de l’occupation. Toutes les idées et propositions qui ne comportent pas ces constantes seront vouées à l’échec », a assuré un responsable du Hamas mardi.Ajoutant que « le retour à l’accord conclu en janvier et la mise en exécution de toutes ses clauses et étapes sont le seul accès réel pour ramener les captifs de l’occupation ».
Lundi après-midi, les Brigades al-Qassam ont assuré que leurs combattants ont dynamité une maison piégée dans laquelle des militaires de l’occupation étaient retranchés dans la région Abou Rous, à l’est de Rafah, au sud de l’enclave. Il y aurait des tués et des blessés. Les Brigades al-Qods du Jihad islamique ont pour leur part indiqué « avoir pilonné des forces ennemies infiltrées dans l’axe de Netzarim à l’aide de salves de roquettes.» Dans la journée de mardi, elles ont fait état d’un char israélien ciblé dans le quartier de Choujaiya par une charge explosive « Chawaz ».
Après deux mois de trêve qui a permis le retour en Israël de 33 captifs, incluant huit morts, en échange de la sortie d’environ 1.800 Palestiniens des prisons israéliennes, l’armée d’occupation a repris le 18 mars son offensive génocidaire contre la bande de Gaza. Refusant de passer à la seconde phase de l’accord conclu en janvier.
Le ministère de la Santé de Gaza a annoncé mardi qu’au moins 1.630 Palestiniens avaient été tués et 4.302 blessés depuis cette date. Ce qui porte à plus de 51 mille le nombre de martyrs à Gaza depuis le début de la guerre israélienne et à 116.343 celui des blessés. 17 martyrs et 69 blessés ont été signalés ces dernières heures par le ministère. Mardi, l’armée d’occupation a bombardé la porte arrière de l’hôpital Koweït à Khan Younès. L’un de ses employés a succombé et 10 autres ont été blessés. 38 personnes ont été tuées depuis le dimanche.
Ces derniers jours, les attaques israéliennes visent Khan Younes, au sud de l’enclave et l’est de Gaza-ville. Un raid perpétré dans la nuit de lundi à mardi sur un bâtiment de 4 étages dans la localité de Khazaa à l’est de Khan Younes a tué 5 citoyens de la famille Qdeih. A Gaza-ville, les dépouilles de 6 martyrs ont été dégagées ce matin, des décombres d’une maison bombardée dans le quartier al-Touffah, à l’est. A Rafah, les destructions des carrés résidentiels se poursuivent sans arrêt. Cette ville désormais séparée de Khan Younès par l’axe Morag et entièrement assiégée fait partie de la zone tampon envisagée par l’armée d’occupation. 90% de ses habitations ont été détruites. Ses habitants n’ont plus aucun espoir d’y retourner.
Des centaines de milliers de Gazaouis ont depuis été déplacés, tandis qu’Israël bloque l’entrée de l’aide humanitaire depuis le 2 mars, avant même la reprise de son offensive. « La situation humanitaire est maintenant probablement la pire depuis le début des hostilités il y a 18 mois », a prévenu le Bureau des Affaires humanitaires de l’ONU (Ocha) dans un communiqué.
Le petit territoire où s’entassent 2,4 millions d’habitants souffre d’une pénurie de nourriture, d’eau, de carburants et d’autres produits de première nécessité, selon l’Ocha. « Nous manquons de médicaments, de fournitures médicales, de tout dans les hôpitaux », témoigne à l’hôpital Nasser de Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza, le docteur Ahmed al-Farah.
Contestation en Israël
Les diplômés des unités cybernétiques offensives, qui sont des soldats et des officiers servant dans les forces de réserve de l’armée israélienne, du Shin Bet et du Mossad, ont rejoint le mouvement de contestation à la poursuite de la guerre au prix de la vie des captifs israéliens encore retenus à Gaza.
Ils ont publié une lettre très critique au Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu. « Les crimes de Netanyahu sont trop nombreux pour être comptés, mais la conclusion est claire : Netanyahu est un danger pour les otages et pour la sécurité d’Israël », y lit-on rapporte le site israélien i24news. Le site web a décrit la formulation de la lettre comme « stricte », en comparaison avec les lettres publiées par les autres réservistes ces derniers jours, dans lesquelles les auteurs appelaient simplement à la libération des prisonniers au prix d’un cessez-le-feu. Il estime que la nouvelle lettre accuse B. Netanyahou de reprendre la guerre à Gaza « pour sa propre survie politique ».
Réclamant l’arrêt immédiat de la guerre et un accord d’échange des détenus, les signataires exigent aussi la démission de Netanyahu et l’organisation de nouvelles élections. Ils insistent sur la nécessité de recrutement des hardis dans l’armée, de suspendre les mesures de réforme juridique et l’établissement d’une commission officielle pour enquêter sur le fiasco du 7 octobre 2023.
Les diplômés de l’unité des renseignements de l’armée avaient rédigé une lettre similaire, rapportent les médias israéliens. Selon la radio de l’armée israélienne, 170 diplômés de ce programme exigeant le retour des prisonniers et de mettre fin à la guerre. Selon le Haaretz, 1.600 vétérans des corps de parachutistes et d’infanterie israéliens avaient signé une lettre exigeant « le retour des détenus dans la bande de Gaza et la fin de la guerre ». Times of Israel rapporte que plus de 250 anciens membres du Mossad ont déclaré leur « soutien à l’appel des vétérans à mettre fin à la guerre » et appelé à « donner la priorité au retour des otages détenus » par le Hamas.
Jeudi dernier, Eyal Zamir, chef d’état-major de l’armée d’occupation, avait approuvé le renvoi de hauts commandants et d’environ 1.000 soldats de réserve après qu’ils ont signé une lettre appelant à la fin de la guerre de Gaza. Lundi, il a informé le cabinet de sécurité d’une pénurie importante de combattants dans l’armée. « Zamir n’édulcore pas les faits », a déclaré un haut responsable de la défense.« Il exhorte les dirigeants à abandonner certains de leurs fantasmes », rapporte Ynet. Un récent rapport du Yediot Ahronoth révèle que cette dernière est confrontée à sa plus grande crise de refus depuis des décennies, avec plus de 100.000 Israéliens qui n’effectuent plus de service de réserve, certains d’entre eux refusant de rejoindre la guerre contre Gaza pour des raisons « morales ».
Selon le magazine israélien 972, les chiffres circulant concernant le nombre de soldats de réserve qui expriment leur volonté de servir sont inexacts, indiquant que le pourcentage réel est plus proche de 60%, tandis que d’autres rapports le situent à environ 50%.
Début mars, Yoav Zitun, expert militaire israélien, a souligné les difficultés auxquelles l’armée israélienne est confrontée, notamment une pénurie de main-d’œuvre, des pressions opérationnelles et psychologiques et des défis logistiques qui menacent sa capacité à maintenir la stabilité sur différents fronts. Rappelant que « l’armée israélienne a perdu plus de 12.000 soldats depuis le début de la dernière guerre à Gaza, entre morts et blessés », il met en garde que l’augmentation du nombre de troupes nécessaires à la défense de la frontière et l’expansion des unités militaires telles que les unités blindées et du génie ont entraîné une pénurie importante du nombre de soldats disponibles.