« Il n’est pas possible d’effectuer des investigations et d’intenter une action publique concernant des délits portant atteinte aux biens publics, sauf à la demande du procureur général près la Cour de cassation en sa qualité de chef du ministère public, sur saisine du la Cour des comptes, soit sur demande accompagnée d’un rapport de l’Inspection générale des finances ou de l’Inspection générale de l’administration territoriale (dépendant du ministère de l’Intérieur), des inspections générales des ministères ou des services compétents, soit sur saisine de l’Instance Nationale de la Probité, de la Prévention et de la Lutte contre la Corruption, ou tout organisme expressément autorisé par la loi à le faire », lit-on dans le projet adopté par l’Exécutif. Un texte qui suscite l’ire de Mohamed El Ghalloussi, président de l’Instance Nationale pour la Protection des Biens Publics au Maroc. A ses yeux, il n’y a pas de mystère à se faire puisque « l’article 3 a pour objectif de priver la société, personnes et groupes, des outils et moyens légaux, juridiques et procéduraux pour lutter contre la corruption et les pilleurs de fonds publics, conformément au principe de lier la responsabilité à la reddition des comptes. » Pis, ledit article va jusqu’à contrevenir à l’article 1 de la loi fondamentale du 1er juillet 2011 qui dispose que « le régime constitutionnel du Royaume est fondé sur la séparation, l’équilibre et la collaboration des pouvoirs, ainsi que sur la démocratie citoyenne et participative, et les principes de bonne gouvernance et de la corrélation entre la responsabilité et la reddition des comptes », rappelle l’avocat qui chapeaute l’INPBPM. Pour M. El Ghalloussi « ce verrou traduit la volonté claire d’un courant qui profite de l’enrichissement illicite, de la rente, et de la corruption, pour continuer à bénéficier des postes de responsabilité publique à des fins personnelles. » Dans son article 12, la constitution souligne que « les associations intéressées à la chose publique, et les organisations non gouvernementales, contribuent, dans le cadre de la démocratie participative, à l’élaboration, la mise en œuvre et l’évaluation des décisions et des projets des institutions élues et des pouvoirs publics ».
En avril 2022, le ministre de la Justice avait mis en garde contre des « opérations de chantage » menées par des associations de protection de biens publics qui nuisent « à la légitimité des présidents des communes ». « Ces ONG n’ont aucun droit de déposer des plaintes contre des présidents de communes », avait-il martelé puisque les ressources dilapidées, ou supposées comme telles, ne leur appartiennent pas. A. Ouhabi est allé plus loin en affichant ses craintes de voir le courant de la moralisation favoriser le désinvestissement dans l’action politique et le détournement des candidats aux élections du jeu politico-institutionnel !
A signaler que le projet de loi n°03.23 modifiant et complétant la loi n°22.01 relative à la procédure pénale sera examiné, dans les mois à venir, par les deux Chambres du Parlement.