« Nous ne faisons pas de politique », assurait-on la semaine dernière auprès du Medef à l’annonce de la visite du Président du patronat français au Maroc. Entre-temps, la grisaille diplomatique a fini par déteindre sur le déplacement programmé du « Patron des patrons » français dans le Royaume. A la Confédération Générale des Entreprises du Maroc (CGEM), l’annulation du déplacement est « due au contexte actuel des relations Maroc-France qui ne se prête pas à cette visite ».
Ceux qui tablaient sur une brouille passagère entre les deux pays voient s’amonceler les nuages… Depuis plusieurs mois, le Maroc n’a plus d’ambassadeur à Paris. Plus, excédé par le jeu régional français, lequel a été rendu toxique depuis que le Royaume a été taxé d’espionner, via Pegasus, logiciel israélien, les téléphones de plusieurs responsables français, les signes de désamour s’étaient multipliés. Du côté de Rabat, le tropisme algérien de l’Elysée n’a d’égal que la position pas assez favorable de la France, ancienne puissance coloniale, sur le dossier saharien. Le Maroc fondait ses espoirs sur un repositionnement de la France qui n’a pas eu lieu à l’occasion de la reconnaissance de la marocanité du Sahara par Donald Trump, ancien hôte de la Maison Blanche.
On prête au Royaume chérifien d’être moins enclin à accepter l’approche de « deux poids, deux mesures » que l’Elysée s’efforce d’étendre à sa politique maghrébine, naguère plus équilibrée.
Pour l’heure, la France est toujours le deuxième partenaire économique du royaume derrière l’Espagne. La question qui se pose serait dès lors de savoir jusqu’à quand les intérêts économiques résisteraient au diktat politico-diplomatique. Si les relations passionnelles entre Rabat et Paris avaient défrayé la chronique, avec des hauts, certes, mais aussi des bas, le désamour est aujourd’hui tel que le froid risque de doucher les ardeurs de nombre d’acteurs français qui cherchent à maintenir leur suprématie sur les marchés du ferroviaire ou encore l’énergie que le Royaume entend boucler. L’annulation du déplacement du Président du Medef équivaut-il à l’exclusion des opérateurs français des grands chantiers programmés par Rabat ?
Voilà la question qui fâche que tout le monde, des deux côtés de la Méditerranée, a dans la bouche…