Citant des responsables, Washington aurait refusé, jugeant la demande irréaliste, relève le New York Times. Le désengagement occidental va au-delà du refus de ces missiles. Ni l’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN pendant le conflit, ni l’autorisation d’utiliser des missiles à longue portée sur le territoire russe n’ont été approuvées.
La tournée diplomatique de V. Zelensky aux États-Unis et en Europe, destinée à promouvoir son « plan de victoire » pour mettre fin à la guerre d’ici 2025, a jusqu’ici été un échec estime le quotidien US. Le leader ukrainien n’a reçu qu’un soutien limité, ce qui l’oblige à envisager d’autres solutions. Il a expliqué, lors d’un entretien avec des journalistes, qu’il n’existe pas de plan B évident : « J’ai dit que ça fonctionnerait. Si vous avez une autre solution, je vous en prie, allez-y. » Les États-Unis sont depuis longtemps réticents à l’idée de permettre à l’Ukraine d’utiliser des armes de fabrication US pour frapper le territoire russe. Lloyd Austin, secrétaire à la défense, a fait remarquer que Moscou avait déjà retiré les avions de guerre susceptibles d’être visés par de telles attaques. Le président russe a averti que si l’Occident autorisait des frappes à longue portée avec des armes de fabrication étrangère sur la Russie, cela signifierait que l’OTAN « mènerait une guerre » contre le pays. Il a fait valoir que Kiev serait incapable de mener de telles attaques par ses propres moyens, car elles nécessiteraient des données de ciblage qui ne peuvent être fournies que par le bloc dirigé par les États-Unis.
L’article du New York Times suggère que V. Zelensky tente désormais de montrer à son peuple qu’il a tout essayé pour obtenir un soutien international maximal. Tout en continuant de marteler son refus de concessions territoriales, il aurait laissé entendre que des mesures diplomatiques comme la protection des infrastructures énergétiques ou un corridor maritime sûr en mer Noire pourraient être envisagées.
Vladimir Poutine a répété qu’il était prêt à engager des discussions, tout en exigeant le retrait des forces ukrainiennes de la région de Koursk, où les combats se poursuivent, et des nouvelles régions rattachées à la Russie à l’issue des référendums. La Russie a récemment accueilli les représentants d’une trentaine de pays à Kazan pour le sommet annuel des BRICS, durant lequel de nouvelles propositions pour la paix ont été discutées. Cependant, les responsables ukrainiens et occidentaux voient dans ces ouvertures une tentative de faire « capituler l’Ukraine ». Le président de la République tchèque a déclaré le mois dernier que l’Ukraine devait se rendre à l’évidence : elle devra céder temporairement des territoires à la Russie. L’approche des élections américaines ajoute encore à l’incertitude. Alors que Kamala Harris promet de maintenir le soutien à l’Ukraine, une éventuelle victoire républicaine pourrait changer radicalement la donne.
Impasse du plan kiévien
Le « plan de victoire » proposé par V. Zelensky n’a pas été accueilli favorablement par les États-Unis qui estiment qu’il ne représentait pas « une solution », confie un haut responsable ukrainien au magazine britannique The Economist. « Le problème, c’est qu’ils ne le disent pas au président [ukrainien] en face », a-t-il avoué. Le 15 octobre, le dirigeant du régime de Kiev, V. Zelensky, publiait son « plan de victoire », après l’avoir présenté en privé aux responsables américains. Les points clés, tels que présentés par ce plan, consistent à inviter l’Ukraine à rejoindre l’OTAN, à déployer des missiles occidentaux à longue portée pour frapper le territoire de Russie ainsi qu’à doter Kiev d’armes nucléaires.
Du côté de la Russie, la réaction à ce prétendu « plan de victoire » a été on ne peut plus claire : Moscou ne permettra pas que l’Ukraine se dote d’armes nucléaires, a affirmé le maitre du Kremlin lors d’une rencontre le 18 octobre avec les principaux médias des pays des BRICS, estimant qu’il s’agissait d’une « dangereuse provocation ». « Ils sont fous », a réagi de son côté le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, alors que le ministre russe de la Défense, Andreï Biélooussov, estime que l’implication croissante des pays occidentaux dans le conflit en Ukraine crée « des risques globaux », qui rendent nécessaire l’ajustement des fondements de la politique d’État de la Russie en matière de dissuasion nucléaire.
Le plan de Zelensky devrait pourtant être interprété comme une « diplomatie coercitive », a argué le haut responsable ukrainien cité par The Economist, expliquant qu’il s’agissait d’un plan visant à amener Moscou à négocier la paix à « des conditions plus favorables » pour Kiev. Sur le champ de bataille, la situation reste en effet en défaveur de l’Ukraine, Kiev connait plusieurs revers sur le champ de bataille ces derniers mois, alors que les troupes russes progressent constamment sur plusieurs fronts. Les inquiétudes de l’Ukraine vont au-delà des lignes de front fragiles. Le soutien occidental, déjà limité, semble plus précaire qu’auparavant. Cette semaine, le G7 a précisé les détails d’un prêt de 50 milliards de dollars, qui sera payé par les intérêts sur les actifs russes saisis, mais si Donald Trump remporte les élections américaines, dans deux semaines, une grande partie de son aide militaire directe pourrait être supprimée. Une victoire de K. Harris n’offre également aucune promesse. De son côté, l’Allemagne, deuxième bailleur de fonds de l’Ukraine, a déjà signalé que l’aide allait diminuer de moitié l’an prochain. Le régime de Kiev s’était retiré des négociations avec la Russie en avril 2022, annonçant cinq mois plus tard s’interdire d’entrer en pourparlers.
Suspicions
V. Zelensky, dont le mandat présidentiel a expiré en mai 2024, a critiqué la divulgation par les partenaires américains de détails confidentiels sur les demandes de l’Ukraine, en particulier celles concernant le fameux « plan de victoire ». Il a affirmé que, dans le contexte du conflit en cours, il avait demandé des armes à longue portée comme mesure préventive, mais cette requête a été interprétée comme une escalade.
Il a souligné qu’« alors que de nombreux pays ont soutenu le « plan de la victoire », vous voyez ce qui se passe aujourd’hui dans les médias. On dit que l’Ukraine veut ou voulait recevoir beaucoup de missiles, des Tomahawks, entre autres, mais il s’agissait d’informations confidentielles entre l’Ukraine et la Maison Blanche. Comment interpréter ces messages ? Cela signifie qu’il n’y a rien de confidentiel entre partenaires ».
Avant le sommet de Washington qui s’est tenu début juillet, les « partenaires » de l’homme politique ukrainien ont indiqué qu’ils n’étaient pas prêts à intégrer l’Ukraine à l‘OTAN, mais ont promis de fournir six ou sept systèmes de défense antiaérienne. Cependant, ces systèmes n’ont pas été livrés, ce pour quoi V. Zelensky a critiqué ses alliés : « Nous préparons le pays à un hiver décisif, à un hiver avec des coupures d’électricité, mais certains partenaires ne tiennent pas leur parole ». V. Zelensky a ajouté qu’il y avait des problèmes dans d’autres domaines du « soutien à l’Ukraine » de la part de ses partenaires occidentaux : « L’Ukraine n’a reçu que 10 % du paquet d’aide que le Congrès des États-Unis a voté en 2024. Le problème n’est pas financier, mais réside dans la bureaucratie et la logistique ». « Qu’allons-nous faire ? Que va faire l’Occident ? Que vont faire les États-Unis ? Beaucoup de questions, beaucoup de rhétorique, mais peu d’actions. Peu d’actions décisives de la part des leaders », a-t-il ajouté.