La pression militaire se maintient en Ukraine à la veille d’un déplacement prévu par le Président américain en Pologne. Les chances de la paix restent dès lors faibles à l’étape actuelle au regard de ceux qui « agitent » en sous-main le Président ukrainien qui a jugé que le temps est venu de négocier sérieusement avec la Russie.
Face à cela, Ankara tente de jouer au pompier. « Bien sûr, ce n’est pas une chose facile que de parvenir à s’entendre pendant que la guerre continue, que des civils sont tués, mais nous voudrions dire que la dynamique progresse », a soutenu le chef de la diplomatie turque qui a visité cette semaine la Russie et l’Ukraine.
Multipliant les efforts de médiation entre Moscou et Kiev, la Turquie, est parvenue à maintenir des contacts avec les deux pays et a réussi à accueillir, la semaine dernière à Antalya, les ministres des Affaires étrangères russe Sergueï Lavrov et ukraininen Dmytro Kouleba pour une première rencontre depuis le début du conflit le 24 février.
Le ministère russe de la Défense a affirmé samedi avoir utilisé la veille des missiles hypersoniques « Kinjal » pour détruire un entrepôt souterrain d’armements dans l’ouest de l’Ukraine et un autre site de stockage de carburant. Lundi, il a assuré aussi le recours à ces mêmes armes contre nombre de cibles, en Ukraine ce qui a poussé le porte-parole des forces aériennes ukrainiennes à soutenir que son pays « est malheureusement devenue un terrain d’essai pour tout l’arsenal russe de missiles ».
«Dans la nuit du 19 mars et le matin le 20 mars, des objets d’infrastructure militaire ukrainienne ont été frappés par des missiles de haute précision à longue portée», a déclaré Igor Konachenkov, porte-parole du ministère russe de la Défense précisant qu’il s’agissait notamment de tirs de missiles hypersoniques. L’officiel russe a affirmé, dans le détail, que des missiles de croisière Kalibr lancés depuis la mer Noire avaient détruit des ateliers de réparation de véhicules blindés ukrainiens, à Nejine. De plus, ajoute la même source, une base de stockage de carburant de l’armée ukrainienne, située près du village de Konstantinovka dans la région de Nikolaïev, a été détruite par des missiles de croisière mer-air Kalibr lancés depuis la mer Caspienne ainsi que par le système aérien de missiles aérobalistiques hypersoniques «Kinjal».
Les missiles Kinjal («dague», en russe) avaient déjà été utilisés de nombreuses fois lors d’exercices, depuis le premier test réussi en 2018. Ce type de missiles défie selon Moscou les systèmes de défense anti-aérienne, car sa vitesse – jusqu’à Mach 10, soit 12 000km/h – et sa manœuvrabilité le rendent difficile voire impossible à intercepter, même si certains experts militaires occidentaux, souligne notamment l’AFP, ont estimé que la Russie pouvait exagérer les capacités de cette arme air-sol.
Les missiles Kinjal et Zircon – tirés depuis des navires de surface et des sous-marins – appartiennent à une famille de nouvelles armes développées par la Russie et que Vladimir Poutine qualifie d’«invincibles». Testés avec succès en 2018, les Kinjal ont atteint, lors des essais, toutes leurs cibles à une distance pouvant atteindre 1 000 à 2 000 km, selon le ministère russe de la Défense. Mais cette portée est démultipliée car ils peuvent être emportés par l’aviation, notamment des MiG-31.
Des mines dans le Bosphore
La Russie qui a tiré la sonnette d’alarme sur le recours possible des Ukrainiens aux armes chimiques a rappelé que le régime de Kiev prévoit de cibler les employés et les installations diplomatiques des États-Unis et d’autres pays occidentaux dans la ville de Lviv, et en imputer la responsabilité aux forces russes. Le porte-parole du ministère russe de la Défense, a confirmé dans un communiqué de presse « qu’un employé du service de sécurité ukrainien s’était rendu aux soldats russes et avait rendu compte des opérations terroristes prévues par les militants du bataillon ukrainien Azov contre le personnel et les installations des missions diplomatiques des États-Unis et d’autres pays occidentaux dans la ville de Lviv ».Comme il a assuré qu’«après que la Fédération de Russie a lancé une opération militaire spéciale [le 24 février], la marine ukrainienne a posé des champs de mines aux abords des ports d’Odessa, d’Otchakov, de Tchernomorsk et de Ioujny». Une information communiquée le 19 mars par les services de sécurité russes (FSB) qui affirment qu’il s’agit de mines «vétustes», notamment fabriquées «dans la première moitié du XXe siècle». «Lors des tempêtes, des ruptures dans les câbles reliant les mines aux ancrages inférieurs ont commencé à se produire», selon la même source. «Poussées par le vent et le courant, les mines dérivent dans la partie occidentale de la mer Noire», affirme le FSB, évoquant leur «état technique insatisfaisant». Etant donné que les courants de surface en direction du sud prédominent dans les zones des ports ukrainiens évoqués, «la possibilité de la dérive de mines dans le Bosphore et ensuite dans les mers du bassin méditerranéen n’est pas exclue», soulignent les services de sécurité russes.
Ceux-ci rappellent, en outre, que conformément à la Convention sur la pose de mines sous-marines automatiques de contact, «il est interdit de poser des mines automatiques de contact ancrées qui ne cessent de représenter un danger en se détachant de leurs câbles». Un avertissement sur le danger que font courir ces mines a été diffusé par la flotte russe de la mer Noire le 18 mars, toujours selon le FSB. La mer Noire est elle aussi le théâtre d’affrontements, dans le cadre de l’opération militaire russe en Ukraine, lancée le 24 février.
Les raids aériens russes se succédaient à un rythme rapide samedi sur Mykolaïv, une ville du sud de l’Ukraine où des dizaines de soldats ont été tués la veille dans une frappe contre une caserne de l’armée, selon le gouverneur de la région.
« Pas moins de 200 soldats dormaient dans les baraquements », a raconté un militaire interrogé sur place, selon lequel « au moins 50 corps ont été extraits ». Un autre militaire a causé qu’il pourrait y avoir eu 100 morts.
L’offensive, de manière générale, est considérée comme une guerre d’invasion par les Occidentaux, qui ont multiplié les sanctions anti-russes. En outre, l’Assemblée générale de l’ONU a voté le 2 mars en faveur d’une résolution appelant Moscou à retirer «immédiatement, complètement et sans conditions toutes ses forces militaires» d’Ukraine.
Le président russe, de son côté, a affirmé que cette opération militaire vise à «démilitariser» et «dénazifier» l’Ukraine et à venir en aide aux Républiques populaires autoproclamées de Donetsk et Lougansk, dont Moscou reconnaît l’indépendance.
L’opération militaire russe en Ukraine est entrée dans son 25e jour, alors que l’armée russe continue de détruire des cibles militaires ukrainiennes, tandis que l’Occident continue de fournir à Kiev des armes tout en apportant un soutien matériel et politique.
La présidence ukrainienne a appelé la Chine à se joindre aux Occidentaux et « condamner la barbarie russe », alors que Pékin n’a jusqu’ici jamais désactivé l’attaque de l’Ukraine par la Russie. « La Chine peut être un élément important du système de sécurité mondial si elle prend la bonne décision de soutenir la coalition des pays civilisés et de condamner la barbarie russe », a tweeté Mykhaïlo Podoliak, conseiller de la présidence et un des participants aux négociations avec la Russie.
Le Premier ministre japonais, Fumio Kishida, en visite à New Delhi, a pressé son homologue indien de changer de ton vis-à-vis de Moscou mais leur déclaration commune s’est abstenue de condamner l’opération militaire russe en Ukraine.