Quarante-six : c’est le nombre de drones ukrainiens « à profil d’avion » que la défense antiaérienne de la région de Koursk a détruit le 20 mai alors que le chef du Kremlin y effectuait une visite, a déclaré à la chaîne Rossiya 24 Iouri Dachkine, commandant d’une division de défense antiaérienne. Celui-ci est notamment revenu sur les 1 177 drones ukrainiens que le ministère russe de la Défense avait annoncé avoir détruits « en dehors de la zone d’opérations militaires spéciales » entre le soir du 20 et le matin du 23 mai. « J’attire votre attention sur le fait que l’attaque s’est considérablement intensifiée lorsque le commandant suprême [des armées] était dans les airs au-dessus de la région de Koursk. Par conséquent, nous menions simultanément une bataille anti-aérienne et assurions la sécurité de l’hélicoptère du président » a insisté l’officier, ajoutant que « la tâche a été accomplie ».
Interrogé quant au fait que l’hélicoptère présidentiel ait pu « traverser la zone de combat », I. Dachkine a alors répondu par l’affirmative ajoutant que l’aéronef « était en fait à l’épicentre du repoussement de la frappe massive de drones ennemis ».
V. Poutine s’est rendu en visite, le 20 mai, dans la région de Koursk. Une première, pour le président russe, depuis la libération de cette région de Russie soumise à une incursion des forces du régime de Kiev entre le 6 août 2024 et le 26 avril 2025, date à laquelle le chef d’État-Major russe Valéry Guérassimov a annoncé la reprise aux Ukrainiens de « la dernière localité » de Koursk : le village de Gornal.
L’ire de D. Medvedev
Dans un langage fleuri, Dmitri Medvedev,vice-président du Conseil de sécurité de la Russie, n’a pas manqué d’expliquer, à sa manière, le déroulé de la guerre encours. « Si l’aide militaire au régime bandériste se poursuit, la zone tampon pourrait ressembler à cela », a-t-il assuré sur Telegram, commentaire posté avec une carte où la quasi-totalité de l’Ukraine – à l’exception d’une fine bande de terres à la frontière polonaise – est labélisée « zone tampon ».
« Après des attaques massives de drones contre notre pays et sa capitale à la veille du Jour de la Victoire visant à intimider les invités étrangers, un silence de plomb dans les centres européens s’en est suivi », a déclaré samedi D. Medvedev. Sur Telegram, il a pointé du doigt les « pourceaux pouilleux » qui ne feraient que « grogner benoîtement de plaisir ». Des « pourceaux pouilleux » qui, selon les mots de Medvedev, « dans un train », « cachent des serviettes et des cuillères suspectes ». Une référence au déplacement entrepris à Kiev, dans la nuit du 9 au 10 mai, du président français Emmanuel Macron, du chancelier allemand Friedrich Merz et du Premier ministre britannique Keir Starmer.
À quelques heures d’une prise de parole annoncée du président russe, E. Macron avait alors menacé la Russie de nouvelles sanctions si Moscou n’acceptait pas un cessez-le-feu inconditionnel de 30 jours.
« Aujourd’hui, les mêmes sangliers graisseux à Paris, à Berlin et à Londres piqueront une crise dénonçant l’usage disproportionné de la force et soulignant la nécessité urgente d’un cessez-le-feu de 30 jours et de nouvelles sanctions contre la Russie », a ajouté, dans son message ce 24 mai, D. Medvedev. Dans la matinée, la Défense russe a annoncé avoir mené en Ukraine une nouvelle « frappe groupée » contre des éléments du « complexe militaro-industriel » ainsi que d’une batterie antiaérienne Patriot.
La veille de ces frappes, dans un communiqué, le ministère russe des Affaires étrangères avait prévenu que la Russie « donnera[it] une réponse adéquate aux attaques terroristes massives » de Kiev. Elle a ajouté via un communiqué avoir notamment repris les chiffres de la Défense : 788 attaques de drones et de missiles de « fabrication occidentale » comptabilisées entre les 20 et 23 mai.
À la suite de ces frappes russes, Volodymyr Zelensky a appelé – comme à l’accoutumée – à un renforcement des sanctions occidentales à l’encontre de la Russie. « Seules des sanctions supplémentaires ciblant des secteurs clés de l’économie russe forceront Moscou à cesser le feu », a-t-il déclaré sur X, affirmant que « la cause de la prolongation de la guerre se trouve à Moscou ».
Le 22 mai auprès de l’agence d’information russe TASS, fustigeant la « pseudo-rhétorique pacifiste » de V.Zelensky, Rodion Mirochnik, ambassadeur itinérant du ministère russe des Affaires étrangères pour les crimes du régime de Kiev avait pointé du doigt les « centaines de drones » lancés par les forces de Kiev contre les régions russes. « Les sept derniers jours ont été les plus sanglants depuis le début de l’année », avait assuré le diplomate russe, le 6 mai, également auprès de l’agence TASS, avançant le chiffre de 15 morts et de 142 blessés en une semaine de frappes ukrainiennes. « Des victimes parmi lesquelles figuraient, a-t-il précisé, des mineurs, dont un enfant de quatre mois. Nous étions alors à la veille d’un cessez-le-feu unilatéral de trois jours – annoncé par Vladimir Poutine à l’occasion des célébrations de la victoire sur l’Allemagne nazie – que n’avait pas observé la partie ukrainienne, la Défense russe ayant rapporté 14 043 attaques du 8 au 10 mai, majoritairement des frappes de drones ».
Les images d’un drone ukrainien, s’écrasant le 9 mai contre le bâtiment du gouvernement régional de Belgorod, avaient été particulièrement relayées dans les médias.
Mi-janvier, lors d’un point presse, le diplomate russe avait annoncé qu’au cours de la seule année 2024 au moins 1 481 civils avaient été blessés et 210 tués – dont 11 enfants – à l’aide de drones ukrainiens. Des attaques ukrainiennes, quotidiennes, que les gouverneurs régionaux concernés ne manquent pas de documenter, mais qui n’ont pas empêché Kaja Kallas, cheffe de la diplomatie européenne, d’affirmer mi-février que « les civils russes ne meurent pas » dans le cadre du conflit russo-ukrainien. « Il y a apparemment des réserves de bassesse », avait alors réagi Maria Zakharova, porte-parole de la diplomatie russe.
Berlin s’affranchit…
Le chancelier allemand a déclaré lundi que Berlin, Londres, Paris et Washington n’appliquaient « plus aucune restriction » en matière de portée des armes livrées à l’Ukraine. « Il n’y a plus aucune restriction sur la portée des armes qui sont livrées à l’Ukraine, ni par les Britanniques, ni par les Français, ni par nous, ni par les Américains » a ajouté Friedrich Merz, lors du Forum européen international organisé par la Westdeutscher Rundfunk Köln (WDR), un organisme public de radiodiffusion basé à Cologne, et qui se tient jusqu’au 28 mai. « Cela signifie que l’Ukraine peut désormais se défendre, par exemple en attaquant des installations militaires en Russie », a-t-il ajouté, allant jusqu’à affirmer que contrairement à l’Ukraine, la Russie « attaque de manière absolument impitoyable des cibles civiles ». « Un pays qui ne peut faire face à un agresseur que sur son propre territoire ne se défend pas suffisamment » a-t-il par ailleurs justifié.
Des déclarations qui tranchent avec celles de son prédécesseur. Si l’Allemagne d’Olaf Scholz s’est hissée au second rang des soutiens militaires de Kiev, derrière les États-Unis, l’ex-chancelier allemand s’était montré prudent concernant l’autorisation – finalement faite – à Kiev de frapper en Russie. Autre point le distinguant de F. Merz : il avait opposé son refus catégorique de fournir à Kiev des missiles balistiques Taurus. Ces missiles dont la portée peut atteindre 500 kilomètres, ont fait couler beaucoup d’encre dans la presse allemande – et britannique –, Olaf Scholz étant régulièrement interpellé quant à un éventuel feu vert de Berlin aux livraisons à l’Ukraine de ces missiles à longue portée. Dans une interview à l’hebdomadaire Stern, publiée début novembre, F. Merz avait déclaré « rester ouvert » à la livraison à Kiev de ces armes, malgré les mises en garde russes. Le candidat à la chancellerie avait alors précisé que de telles livraisons pourraient s’effectuer « une semaine » après une levée conjointe des « limites de portée des armes existantes », si les « bombardements de la population civile » ne cessaient pas « dans les 24 heures ».
À la suite de ces propos, Merz avait assuré n’avoir adressé aucun « ultimatum » à V. Poutine. Un mois après cette publication, il déclarait au quotidien Bild que Berlin pourrait fournir à Kiev – en coordination avec les États-Unis et les Européens – des missiles Taurus.