Cette section aborde les défis liés à l’établissement d’une gouvernance efficace et à la garantie du financement nécessaire pour atteindre les objectifs définis pour cette réforme. Le rapport rappelle ainsi que la réforme ambitieuse de la protection sociale, lancée en 2020 par le Souverain, a été marquée par la définition claire des grandes lignes, des piliers et des échéances d’exécution. Pour concrétiser la vision royale et mettre en œuvre ce vaste chantier, un cadre de référence a été établi à travers la loi cadre relative à la protection sociale (loi n°09.21 du 23 mars 2021), détaillant le déploiement des principaux objectifs.
Le document précise que ces objectifs comprennent la généralisation de l’assurance maladie obligatoire à fin 2022, l’extension des allocations familiales en 2023 et 2024, ainsi que l’élargissement de l’affiliation aux régimes de retraite et la généralisation des indemnités de perte d’emploi d’ici 2025.
De son côté, le chef du gouvernement a souligné, lors de la séance plénière conjointe sur l’aide sociale directe tenue le 23 octobre 2023, les efforts déployés par l’Etat dans ce domaine, précisant que la mise en œuvre du chantier de l’assurance maladie obligatoire et de l’aide sociale directe nécessitera la mobilisation d’un budget de 40 milliards de dirhams à l’horizon 2026.
Le rapport de la Cour des comptes souligne que, dans le cadre de la mise en œuvre de la réforme, les autorités publiques ont principalement axé leurs efforts sur l’établissement des mécanismes d’exécution de manière générale, en mettant particulièrement l’accent sur la généralisation de l’assurance maladie obligatoire et des allocations familiales.
En ce qui concerne la généralisation de l’assurance maladie obligatoire, après l’adoption de la loi-cadre, trois conventions-cadres ont été signées en présence du Roi le 14 avril 2021, par les ministères concernés. Ces conventions visent à étendre l’assurance maladie obligatoire à différentes catégories de travailleurs non-salariés exerçant une activité privée, touchant ainsi environ 3 millions d’assurés principaux, selon la même source.
Cependant, malgré des avancées significatives dans l’élaboration du cadre juridique régissant ladite assurance maladie et dans la mise en œuvre d’un ensemble de mesures de gestion associées, le nombre de personnes immatriculées n’a pas dépassé 1,87 million d’assurés principaux à la fin du mois de septembre 2023, dévoile le rapport.
De plus, le régime d’assistance médicale aux démunis (RAMED) a été supprimé et l’assurance maladie obligatoire a été élargie après l’adoption des modifications nécessaires apportées aux textes juridiques pour inclure les bénéficiaires de ce régime, en se basant notamment sur le registre social unifié, mis en place pour cibler les catégories éligibles.
En septembre 2023, le nombre d’inscrits s’élève à 10,23 millions de personnes. Selon le rapport, il est important de souligner le renforcement significatif du cadre juridique pour encadrer le nouveau système de protection sociale. Cependant, certains textes importants ou amendements, tels que la révision de la loi sur le système de la sécurité sociale, restent en attente d’adoption.
Concernant la généralisation des allocations familiales, le Roi a donné des directives lors de son discours parlementaire le 13 octobre 2023 pour débuter le programme d’appui social direct à la fin de la même année. Le chef du gouvernement a ensuite exposé la configuration de la mise en œuvre de ce programme, prévu pour commencer le 30 décembre 2023. Il a précisé que le gouvernement a élaboré le cadre opérationnel et budgétaire, avec les modalités et conditions de mise en œuvre définies.
Ce programme d’appui direct cible environ 60% des ménages non couverts par les systèmes de sécurité sociale, remplissant les critères d’éligibilité après leur inscription dans le registre social unifié. Pour l’élargissement de la base des adhérents au système de retraite et de l’indemnité pour perte d’emploi, visant à atténuer les risques liés au vieillissement et à la perte d’emploi, ces initiatives sont encore à l’étape de l’élaboration des textes correspondants, indique la Cour.
Par ailleurs, le rapport note que la généralisation de la protection sociale présente des risques et des défis tels que l’intégration de toutes les personnes ciblées, l’équilibre financier des régimes d’assurance maladie obligatoire, l’identification précise de la population cible, la capacité du secteur public à répondre à la demande en prestations de soins, la mobilisation des capacités pour la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS), et la nécessité d’une gouvernance fiable et efficace.
Face à ces enjeux, la Cour des comptes recommande des mécanismes durables et appropriés pour financer les différentes composantes de la protection sociale. Elle souligne la nécessité d’une révision de la gouvernance du système de protection sociale en général, et de la CNSS.
Ces recommandations s’alignent sur celles émises dans le rapport annuel 2021, visant à établir des mécanismes de financement assurant la pérennité de l’assurance maladie obligatoire (AMO), garantissant une couverture adéquate des coûts des prestations de soins pour les assurés, et promouvant le développement des établissements de soins publics dans toutes les régions du Royaume.