Le traumatisme est encore vivace en Russie. Ce 2 mai, huit ans après le massacre d’Odessa, qui a coûté la vie à 48 personnes pour la plupart brûlées vives dans l’incendie de la Maison des syndicats de la ville, une cérémonie de commémoration a été organisée à Moscou.
Pour l’occasion, la pianiste ukrainienne de renommée internationale Valentina Lissitsa s’est rendue sur place pour interpréter une composition de Sergueï Rachmaninov. «J’ai décidé de venir jouer Rachmaninov ici car c’est une musique qui nous est proche, à nous tous. C’est aussi une musique tragique», a-t-elle déclaré. «Le jour de premier hommage, j’étais à Paris. J’y ai participé à une manifestation pacifique. Il y avait, là aussi, un groupe de gens qui s’était rassemblé et qui savait ce qui s’était passé. Il demandait la justice, un châtiment, parce que ce mal est vraiment resté impuni», a-t-elle également fait valoir. Sérafime Ivanov, porte-parole de l’unité de bénévoles de l’organisation des anciens combattants Boïevoïé Bratstvo (Frères d’Armes) présent pour l’occasion, a expliqué qu’en ce 2 mai, « Moscou accueille un hommage intitulé « On se souvient d’Odessa » pour commémorer la mémoire des victimes de la tragédie d’Odessa. Le 2 mai 2014, beaucoup de gens ont été brûlés vif dans la Maison des syndicats de la ville. C’étaient des patriotes de Russie, ils ne voulaient pas que les autorités criminelles arrivées au pouvoir en Ukraine par la violence plongent leur pays dans le chaos.»
Des scènes insoutenables qui n’avaient pas trouvé écho en Occident En effet, le 2 mai 2014, 48 personnes s’opposant au coup d’Etat qui avait chassé le président Viktor Ianoukovitch du pouvoir quelques mois plus tôt ont perdu la vie dans l’incendie criminel de la Maison des syndicats d’Odessa. Plus de 200 personnes avaient été blessées. Alors qu’elles étaient poursuivies par des nationalistes radicaux ukrainiens, partisans du Maïdan, ces personnes avaient trouvé refuge dans la Maison des syndicats. Les nationalistes les avaient alors empêché de sortir du bâtiment en flamme, notamment en leur lançant des cocktails Molotov. Présente sur place, la police était restée passive. La plupart des personnes prises au piège avaient péri brûlées vives.
A l’époque, ces images, sur lesquelles on peut voir des personnes se défenestrer pour ne pas finir brûlées n’avaient eu que très peu d’écho dans la presse et dans les chancelleries occidentales. Sur son compte Telegram, Maria Zakharova, porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères s’est exprimée en rappelant que «ce jour-là, en 2014, des fascisants ukrainiens ont massacré ceux qui s’étaient prononcés contre le coup d’Etat du Maïdan, contre la politique des nouvelles autorités de Kiev, contre le nationalisme agressif déchaîné». Et d’ajouter que «48 personnes ont été brûlées vives, ont subi une intoxication mortelle au monoxyde de carbone, ou bien ont succombé [à leurs blessures] à la suite d’une chute depuis les étages supérieurs après avoir essayé d’échapper à un tel sort. L’Occident « civilisé » a gardé le silence, de façon non civilisée (…) Il ne fallait qu’une chose – trouver les auteurs. Il n’était pas question [d’établir] ce qui s’est passé : le monde entier l’a vu presque en direct. Nous n’oublierons jamais cet horrible crime. Nous ferons en sorte que tous ceux impliqués dans cette tragédie soient identifiés et châtiés», a-t-elle conclu.
Depuis ce drame, la Russie ne cesse de réclamer une enquête notamment à l’OSCE et au Conseil de l’Europe. Sans succès. Dans un rapport rendu en 2019, la Mission de surveillance des droits de l’homme de l’ONU en Ukraine avait établi que la responsabilité des autorités ukrainiennes était clairement engagée dans le drame, et pointait le fait que Kiev n’avait pas fait le nécessaire pour que des enquêtes rapides, indépendantes et impartiales puissent être menées.