N. Bouden avait été nommée par Kaïs Saïed, le 11 octobre 2021, un peu plus de deux mois après que le président s’était octroyé les pleins pouvoirs, le 25 juillet, en limogeant son Premier ministre de l’époque et en gelant le Parlement.
Le président a immédiatement nommé Ahmed Hachani pour remplacer la Première ministre. Complètement inconnu du grand public, on sait peu de choses sur les tendances politiques de ce nouveau premier ministre en Tunisie. Seuls des posts sur son profil Facebook laissent paraître des positions anti-islamistes, une inclinaison pour un régime de monarchie constitutionnelle et une loyauté sans faille à l’un des principaux clubs de football du pays, l’Espérance sportive de Tunis.
Juriste de formation, le nouvel homme qui bénéficie de la confiance du Président a passé la majorité de sa carrière au sein de la Banque centrale tunisienne. Son père est un ancien officier, S. Hachani, condamné à mort en 1963 dans l’affaire dite du complot contre l’ancien président Habib Bourguiba, ce qui avait valu à la famille d’être exclue de la fonction publique.
Rien ne filtre sur un possible remaniement ministériel après la prise en poste d’A. Hachani mais ses pouvoirs seront très restreints face à l’exécutif qui n’a pas non plus besoin du vote de confiance du parlement pour désigner son chef du gouvernement et d’éventuels nouveaux portefeuilles, d’après la nouvelle constitution tunisienne. Le nouveau chef du gouvernement a immédiatement prêté serment devant le président, selon la vidéo de la présidence.
Depuis le coup de force de 2021, K. Saïed dirige par décrets le pays. La Constitution qu’il a fait modifier par référendum à l’été 2022 a fortement réduit les pouvoirs du Parlement au profit d’un système ultra-présidentialiste. Une nouvelle assemblée des députés a pris ses fonctions au printemps 2023 après des élections législatives, fin 2022, boycottées par les partis d’opposition et boudées par les électeurs avec un taux de participation d’environ 10%.
À plusieurs reprises ces derniers mois, le président a ordonné le limogeage de divers ministres, dont le ministre des Affaires étrangères, sans jamais donner de motifs. Depuis février dernier, une vingtaine d’opposants et personnalités ont été emprisonnés dans le cadre d’une vague d’arrestations qui a touché aussi Rached Ghannouchi, chef du parti islamo-conservateur Ennahdha. Ils sont « accusés de complot contre la sûreté de l’État » et K. Saïed les a qualifiés de « terroristes ». Des ONG, dont Amnesty International, ont dénoncé un dossier d’accusation « vide ».
A signaler que la Tunisie traverse une crise politique depuis deux ans doublée de graves difficultés économiques : le pays est très endetté (à 80% du PIB), la croissance atone (environ 2%), la pauvreté en hausse (4 millions de Tunisiens sur 12 millions d’habitants) et le chômage très élevé (15%).