De la fumée s’élevait toujours avant l’aube du bâtiment de l’ambassade de Suède à Bagdad. Plusieurs camions de la défense civile étaient sur le site pour éteindre l’incendie. Utilisant des canons à eau, les forces de sécurité déployées en grand nombre ont pourchassé les manifestants avec des matraques électriques pour les éloigner de l’ambassade de Suède et les obliger à se disperser. Les manifestants ont répliqué avec des jets de pierre. Durant la nuit, certains manifestants aux abords de l’ambassade de Suède brandissaient des exemplaires du Coran, d’autres des portraits de Mohamed al-Sadr, influent clerc religieux chiite et père de Moqtada al-Sadr.
Le personnel de l’ambassade est « en sécurité », a indiqué à l’AFP le ministère suédois des Affaires étrangères à Stockholm. « Nous sommes au courant de la situation. Le personnel de notre ambassade est en sécurité et le ministère est en contact régulier avec lui », a précisé dans un courriel le ministère.
L’assaut de l’ambassade à Bagdad intervient au moment où la police suédoise a autorisé un mini-rassemblement jeudi à Stockholm. L’organisateur, un Irakien réfugié en Suède du nom de Salwan Momika, a confirmé sur sa page Facebook qu’il prévoyait de brûler un exemplaire du Coran ainsi que le drapeau irakien devant l’ambassade d’Irak.
S. Momika, organisateur de l’événement, avait déjà brûlé le 28 juin quelques pages d’un exemplaire du Coran devant la plus grande mosquée de Stockholm pendant la journée de l’Aïd el-Adha, fête célébrée par les musulmans à travers le monde. Ce premier incident avait poussé les partisans de M. al-Sadr à prendre d’assaut l’ambassade de Suède à Bagdad le 29 juin. Ils y étaient entrés et y étaient restés environ un quart d’heure avant d’en ressortir. Un geste qui avait alors provoqué une volée de condamnations internationales. S’il a bien lieu, l’autodafé du Coran prévu entre 13h et 15h locales (11h et 13h TU) à Stockholm sera le troisième depuis janvier. Ce type d’actes a déjà eu lieu en Suède ou dans d’autres pays d’Europe, parfois à l’initiative de mouvements d’extrême-droite.
« Nous sommes mobilisés aujourd’hui pour dénoncer le fait de brûler le Coran, qui n’est qu’amour et foi », a indiqué à l’AFP un manifestant à Bagdad. « Nous exigeons du gouvernement suédois et du gouvernement irakien que cesse ce type d’initiative », a-t-il martelé. « Nous n’avons pas attendu le matin, nous avons pénétré à l’aube, on a incendié l’ambassade de Suède », a indiqué un autre jeune manifestant, avant de scander « Moqtada Moqtada Moqtada » du nom de l’influent dirigeant religieux. S’exprimant sous couvert de l’anonymat, le manifestant a indiqué que « les enfants du courant sadriste » avaient agi après l’autorisation donnée une nouvelle fois à Salwan Momika « de manifester pour brûler le Coran » en Suède.
Le ministère irakien des Affaires étrangères a condamné jeudi « dans les termes les plus durs » l’incendie de l’ambassade de Suède à Bagdad, réclamant aux forces de sécurité l’ouverture d’une « enquête urgente », selon un communiqué. « Le gouvernement irakien a chargé les services de sécurité compétents de mener une enquête urgente et de prendre toutes les mesures nécessaires pour mettre au jour les circonstances de l’incident et en identifier les auteurs pour leur faire rendre des comptes conformément à la loi », selon le communiqué.
De son côté, la Suède a annoncé la convocation du chargé d’affaires irakien. « Ce qui s’est produit est totalement inacceptable et le gouvernement condamne ces attaques de la façon la plus véhémente qui soit », a affirmé Tobias Billström, ministre suédois des Affaires étrangères, dans un communiqué. « Les autorités irakiennes ont une obligation limpide de protéger les missions et personnels diplomatiques en vertu de la Convention de Vienne », a souligné T. Billström. « Il est évident que les autorités irakiennes ont sérieusement manqué à leurs responsabilités », a-t-il ajouté.