L’avance obtenue lors des épreuves des urnes de juillet dernier n’ont pas permis de dégager de majorité claire en faveur d’A. N. Feijóo. Le leader de la droite qui promettait de revoir les relations avec le Maroc, n’a recueilli mercredi que les 172 voix des députés de son Parti Populaire (PP), de la formation d’extrême droite Vox et de deux petits partis. Peu pour être investi au poste de chef du gouvernement, obtenir le soutien de la majorité absolue de la Chambre des députés, soit 176 voix sur 350.
Cet échec prévisible lance un compte à rebours de deux mois avant la convocation de nouvelles élections législatives avant le 27 novembre 2023. Deux mois durant lesquels Pedro Sánchez, chef du gouvernement sortant, qui a prouvé ces dernières années sa capacité de survie politique, va pouvoir tenter à son tour d’obtenir la confiance du Parlement pour être reconduit au pouvoir.
Un deuxième tour aura lieu vendredi pour lequel A.N. Feijóo n’aura besoin que d’une majorité simple cette fois, mais, là encore, il semble peu probable qu’il l’obtienne. Conséquence : ce sera sans doute P. Sánchez qui devra essayer d’obtenir le soutien d’une majorité des députés et notamment celui des indépendantistes catalans. En cas d’échec, les Espagnols devront retourner aux urnes en janvier 2014.
Conscient de son échec à venir, le leader de la droite traditionnelle a passé l’essentiel de la session d’investiture ouverte mardi à attaquer P. Sánchez et les indépendantistes catalans dont dépend l’éventuelle reconduction au pouvoir du socialiste. Assurant défendre l’« intérêt général » et « l’égalité de tous les Espagnols », il a accusé son rival socialiste, qui n’a pas pris la parole dans l’hémicycle, de céder au « chantage de ceux qui ne croient pas en notre pays ».
Mardi, il avait déjà critiqué le fait que l’éventuelle reconduction au pouvoir de P. Sánchez dépendrait uniquement « de ce que voudra ou pas Carles Puigdemont », leader de la tentative de sécession de la Catalogne en 2017, vomi par la droite. Faiseurs de roi dans un Parlement très fragmenté, C Puigdemon et les sept députés de sa formation réclament l’amnistie des séparatistes catalans poursuivis par la justice espagnole en échange de leur soutien. « Une attaque directe aux valeurs démocratiques essentielles de notre pays » et un « chantage », selon le patron du PP.
Au-delà de l’opposition de la droite qui a mobilisé des dizaines de milliers de personnes dimanche 24 septembre dans le centre de Madrid, l’éventuelle amnistie suscite le malaise de certains membres du Parti socialiste, formation qui rejetait catégoriquement une telle idée par le passé.
Des négociations périlleuses se profilent donc pour P. Sánchez appelé dès lors à trouver une formule contentant les indépendantistes sans déclencher de fronde au sein de son parti. Optimiste sur sa reconduction au pouvoir, le Premier ministre, qui a déjà gracié en 2021 les indépendantistes condamnés à la prison pour les évènements de 2017, n’a rien dit publiquement sur cette amnistie, mais a promis d’être « cohérent avec la politique de retour à la normale » en Catalogne qu’il a appliquée depuis son arrivée au pouvoir en 2018.
Après des semaines de pourparlers, Pere Aragonès, président catalan, a pour la première fois donné, mardi, pour acquise l’amnistie des indépendantistes condamnés ou poursuivis par la justice : « On sait que l’amnistie n’est pas seulement nécessaire, mais qu’elle sera une réalité. On la disait impossible, mais elle aura lieu, c’est inévitable. » Une affirmation osée – et unilatérale – qui n’est que la première condition au soutien de ses troupes au candidat à la présidence du gouvernement espagnol : « Il faut désormais ouvrir le deuxième sujet qu’on disait impossible. On a la clé de la gouvernabilité du pays et on doit l’utiliser pour obtenir l’engagement de Pedro Sánchez pour que la Catalogne vote. Si on a eu un jour la force de rendre ça possible, c’est maintenant. »
Et le leader catalan exige que ce référendum soit fixé d’ici à la fin de la législature en 2027. La balle est désormais dans le camp de P. Sánchez, alors que l’échec de la candidature du patron du PP au poste de Premier ministre se profile.