L’idylle entre la France et l’Algérie ne tient qu’à un fil, et la nouvelle réplique du président algérien montre l’étendue des relations difficiles et conflictuelles entre les deux pays. Dans un communiqué de la présidence algérienne, Abdelmadjid Tebboune a officiellement protesté contre l’exfiltration de la militante Amira Bouraoui depuis Tunis.
« Dans le prolongement de la note officielle par laquelle l’Algérie a protesté fermement contre l’exfiltration clandestine et illégale d’une ressortissante algérienne dont la présence physique sur le territoire national est prescrite par la justice algérienne, le président de la République, Abdelmadjid Tebboune a ordonné le rappel en consultations de l’Ambassadeur d’Algérie en France, Saïd Moussi, avec effet immédiat », a indiqué un communiqué au ton agressif et irrité.
La militante franco-algérienne a réussi à quitter l’Algérie via Tunis grâce à l’aide de l’ambassade de France et ce sauvetage, en pleine crise des droits de l’homme et chasse aux journaliste et musellement de la presse en Algérie, a provoqué la colère de l’Algérie dans ce qui lui semble être une ingérence dans ses affaires.
A. Bouraoui, médecin de profession, opposante et animatrice depuis peu sur Radio M, une radio dont le régime algérien a déclaré la « mise à mort» en jetant son directeur, Ihsane El Kadi en prison depuis décembre dernier. Arrêtée vendredi à Tunis, l’opposante a pu s’en sortir lundi soir dans un vol Tunis vers Lyon.
Plus tôt, le ministère des Affaires étrangères algérien a exprimé sa « ferme condamnation » auprès de l’Ambassade de France, de ce qu’il appelle une « violation de la souveraineté nationale par des personnels diplomatiques, consulaires et de sécurité relevant de l’Etat français ».
Le ministère algérien est allé plus loin en affirmant qu’il est « inadmissible » et « inqualifiable » de voir l’Etat français participant « à une opération clandestine et illégale d’exfiltration d’une ressortissante algérienne », tout en ajoutant que ce développement cause un grand dommage aux relations algéro-françaises.
Réplique en Tunisie :
La brouille franco-algérienne a eu un écho insoupçonné en Tunisie. En effet, Othman Jerandi, ministre des Affaires étrangères, en a fait les frais. Il a été limogé par le président tunisien. C’est par un court communiqué diffusé sur les réseaux sociaux que les Tunisiens ont appris qu’O. Jerandi, jusqu’ici ministre des Affaires étrangères, était démis de ses fonctions. Il est remplacé par Nabil Ammar, auparavant ambassadeur de la Tunisie auprès de l’Union européenne.
L’annonce semble avoir surpris le ministre lui-même qui, quelques minutes auparavant, partageait encore ses dernières actualités officielles sur Twitter. « Mes fonctions de ministre des Affaires étrangères ont pris fin après 3 ans dans une circonstance délicate, ma seule boussole était l’intérêt suprême de la Tunisie », a réagi sur Twitter O. Jerandi, ajoutant que : « Où que je sois, je resterai au service de ce pays. Nous sommes tous de passage et la Tunisie reste le témoin de ceux qui l’ont aimée et qui lui ont été fidèles ».
Ce renvoi intervient au lendemain d’un bras de fer tendu entre Tunis, Alger et Paris autour du cas d’A. Bouraoui. Cette opposante au régime algérien de nationalité algérienne et française s’était réfugiée en Tunisie, d’où elle souhaitait s’envoler pour la France. Les Algériens demandaient aux Tunisiens de la renvoyer instamment mais les autorités françaises ont réussi à obtenir, à la dernière minute, qu’elle quitte le territoire tunisien pour la France.